Fuite en sourdine (29/01/2007)
Pas très confortable pour un fils (Julien Rochefort), même adulte, de jouer les médiateurs entre sa mère (Catherine Rich) et son père (Pierre Santini). Alice est mystique, ardente, toujours en mouvement. Édouard est réaliste, placide, calme jusqu’à l’indifférence. Il lit un ouvrage consacré à l’hécatombe que fut la retraite de Russie, pendant qu’Alice vitupère contre la société qui consomme à outrance. « Pas de pitié ! » pour les faibles, d’où naît une comparaison. Jimmy est comme son père, pudique, discret. Il n’a pas envie de « se disputer ». Il vient, en bon fils, passer le week-end avec eux.
Mais il va être obligé de prendre parti. Car ce père si réservé a un secret : une liaison. Il a décidé de quitter Alice pour Angela, tout le contraire de cette femme agitée qui vire quelquefois à la folie. Las de faire des efforts « pendant trente-trois ans », Édouard prend la fuite, sans éclats, en sourdine, mais Édouard « revient à la vie ». Il a le courage d’affronter la tempétueuse Alice, celui de régler l’intendance, de résister à la pitié devant l’épave qu’elle devient. Et le fils devient le confident des deux. Mais lui, qui câlinera son désarroi ?
Le décor d’Antoine Ranson ménage deux espaces. Le fond surélevé par un praticable sert d’entrée au cottage, de passage entre deux lieux. La partie avancée représente la pièce à vivre. Des bascules de lumière, un cadre qui pivote et, à cour, le coin de la cheminée deviendra celui du living londonien où vit le fils Au fond une grande découverte, comme une baie vitrée, s’ouvre sur un paysage d’arbres aux feuillages automnaux, puis à une route enneigée, bordée par les arbres dénudés. Jolie façon d’indiquer que les mois passent.
Tout est simple, évident, merveilleusement joué par les trois protagonistes. On partage chaque cri de révolte d’Alice. Chaque argument d’Édouard touche, ainsi que la détresse de Jimmy. La délicatesse de l’auteur ne permet pas d’accuser l’un ou l’autre, et c’est cette « neutralité » bienveillante qui a dû séduire Gérald Sibleyras qui signe l’adaptation. Entre gens intelligents, férus de poésie, il ne peut en être autrement...
La Retraite de Russie de William Nicholson
adaptation française de Gérald Sibleyras
Petit-Montparnasse
01 43 22 77 74
17:50 Écrit par Dadumas | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre | Facebook | | Imprimer