Comédie tragique (11/09/2010)

 

 

Vous croyiez qu’avec Solness le constructeur, Ibsen avait écrit un drame, celui d’un homme mûr saisi par un vertige orgueilleux devant la jeunesse, hanté par un passé trouble, partagé entre des ambitions matérialistes et des superstitions païennes. Pas du tout ! Hans Peter Cloos, qui met en scène, affirme qu’il s’agit d’une comédie.

Soit ! Halvard Solness (Jacques Weber) papillonne entre son épouse Aline (Édith Scob), et sa maîtresse, la jeune Kaja Fosli (Nathalie Niel). Il l’a chipée à son assistant Ragnar (Thibault Lacroix) et il la plaque sans ménagement quand la belle Hilde (Mélanie Doutey) pointe son joli minois. Il a tant méprisé le vieux Brovik (Jacques Marchand), trompé sa femme, manqué à ses  promesses, que personne ne le plaindra quand il tombera du haut de la tour qu’il inaugure. Dans le décor de Jean Haas glacé de maquettes blanches, même le docteur (Sava Lolov) semble indifférent à son patient.

Comédie ? Mais comédie tragique. Il y a mort d’homme !

Jacques Marchand dit avec force la douleur et la haine, Thibault Lacroix incarne la rage et la rancœur et sifflote le thème du Peer Gynt de Grieg avec insolence*. Édith Scob explore les fêlures de sa vie en souriant. Jacques Weber souverain, montre le désir de puissance mêlé à l’angoisse du « châtiment ».

Car enfin, n'est-il pas responsable de l'incendie qui a anéanti la maison de sa femme, ses souvenirs, ses enfants ? N'a-t-il pas manoeuvré pour bâtir son empire immobilier ? N'at-il pas dépouillé Brovik de son entreprise ? Brimé Ragnar ? Séduit Kaja, qu'il abandonne ensuite ?

À moins d’être particulièrement cynique, la situation ne prête pas à rire. Sauf à se moquer de cette Hilde, grande petite fille qui croit aux serments des hommes. Mais là encore, difficile de ne pas avoir le cœur brisé.

 

 

 

 

Solness le constructeur d’Henrik Ibsen

Théâtre Hébertot

01 48 87 23 23

* Mon ami Karim me signale que c'est l'air que siffle l'assassin dans M le maudit. Thibault Lacroix a donc tout compris !

00:03 Écrit par Dadumas | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, ibsen, hébertot |  Facebook | |  Imprimer