À feu et à sang ! (22/03/2017)
Il est des hommes qui ne transigent pas avec la notion de justice. Heinrich von Kleist s’intéressa à Hans Kohlhase dès 1805. Il raconta, dans un feuilleton, Michael Kohlhaas l’histoire de ce héros roturier qui, au XVIe siècle fit trembler les nobles de Saxe. On en a, depuis fait des adaptations théâtrales, et cinématographiques.
Gilbert Ponté, comédien-conteur qui s’est donné Dario Fo pour modèle, fait revivre l’homme révolté.
Seul en scène sous les voûtes de pierres séculaires qui s’accordent au récit, il ressuscite non seulement Kohlhaas, mais aussi le grand seigneur méchant homme qui lui fit injustice, la cour, l’empereur, les conseillers, les avocats, les bons et les faux amis, les gueux qui formèrent une armée vengeresse, la pauvre Lisette son épouse dévouée, Martin Luther, et même les chevaux, objets du préjudice que lui causa le baron von Tronka.
Le nom vous rappelle quelqu’un ? On ne peut s’empêche de penser au Candide de Voltaire, face au baron Thunder der Tronckh, et on sait bien que Kleist eut quelques ennuis avec les princes allemands qui l’accusèrent d’espionnage au service de la France et avec les Français qui en firent un prisonnier de guerre…
Car Kleist aussi était malmené par le destin et persécuté par le pouvoir…
Et quel pouvoir ! Des nobles hypocrites qui font régner l’arbitraire, inconscients que l’injustice les fera sombrer.
Gilbert Ponté porte la parole de Kleist avec rigueur et vigueur. Le texte cogne et résonne. Tout se concentre sur son corps, son visage et ses mains. Il est d’abord un homme paisible, et juste, il devient l’humilié, avant de se muer en homme désespéré puis en ange exterminateur. Il est extraordinaire !
Fallait-il mettre la Saxe à feu et à sang pour le vol de deux chevaux moreaux aussi beaux soient-ils ? « Il y a la loi. » répète l’éleveur de chevaux. Elle doit être la même pour tous. Et si les puissants ne la respectent pas, pourquoi l’imposent-ils aux faibles ?
Que faire avec ceux qui font le mal en toute impunité ?
« Souviens-toi de pardonner » dit la Bible, mais comment pardonner à ceux qui n’ont même pas conscience d’avoir commis une faute ?
Et êtes-vous sûrs de répondre aujourd’hui aux interrogations que soulève Michael Kohlhaas ?
Photo © La Birba compagnie
Michael Kohlhaas, l’homme révolté, d’après Heinrich von Kleist
Adaptation de Marco Baliani et Remo Rostagno
Traduction d’Olivier Favier
jusqu'au 27 juin
Théâtre Essaïon
01 42 78 46 42
Le lundi et le mardi à 19 h 45
16:12 Écrit par Dadumas | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, théâtre essaïon, kleist, gibert ponté | Facebook | | Imprimer