Merci Vauban ! (18/12/2007)
Nous ne sommes pas de ceux qui disent « Merde à Vauban ». Les villes qu’il fortifia ont célébré le tricentenaire de la mort du stratège exceptionnel qu’il fut. Le grand homme qui mourut en avril 1707 n’a pas fini d’être commenté par les architectes (voyez les expositions qui lui sont consacrées à Saint-Martin-de-Ré, comme à Paris). Avec son mémoire sur « la dîme royale », il a prôné aux législateurs l’impôt proportionnel. Sa lettre sur le retour des huguenots était un modèle de tolérance que Voltaire n’aurait pas renié, et les livres d’économie domestique recommandaient comme lui, l’élevage familial de la truie. Il analysait les problèmes de son époque avec précision et tâchait d’y apporter une solution. En cette année de commémoration ses nombreux écrits ont aussi inspiré les auteurs dramatiques. Nous dirions donc : « Merci Vauban »…
Nous avons eu des spectacles de tous genres pour célébrer Sébastien Le Prestre de Vauban. Collages de ses Oisivetés avec son testament, adaptation de sa correspondance, rencontre improbable avec un comédien à Blaye*, « fantaisie iconoclaste »** le mettant face à face avec un autre grand serviteur de l’Etat : Pierre Mendès France dont la république a oublié de fêter le centenaire, et enfin, La Tour défend le roy, de Florence Camoin, qui créa son spectacle à Avignon en juillet dernier.
Il ne manque pas un galon, pas une broderie, pas un brandebourg, pas une ganse, pas une dentelle aux magnifiques costumes (signés Dragos Moldoveanu) des personnages créés par Florence Camoin. Ne parlons pas des perruques, des chapeaux, et de la canne de Louis XIV, tout est adéquat.
La reconstitution est saisissante ! Que Vauban (René Camoin) soit avec son fidèle neveu et secrétaire, Antoine (Laurent Feuillebois), en son château de Bazoches, dans le Morvan où Louvois (Michel Chalmeau) vient le consulter, ou à Versailles où le roi louis XIV le reçoit en particulier, tout sonne juste. Le souci de Vauban dans la guerre ? La protection des populations civiles, l’efficacité du soldat, son armement, sa sauvegarde. Il outrepasse ses compétences, « Y a-t-il une question dans notre société dont vous ne vous soyez pas mêlé ? » tonne Louvois. Vauban imagine aussi bien la baïonnette et la poire à poudre, qu'une pension permettant aux anciens combattants invalides de rentrer chez eux avec les honneurs du royaume. Il s’oppose aux « dragonnades » qui humilient les huguenots et « vident la France de ses sujets les plus éminents ». enfin, il ose dire au roi que son royaume est « ruiné » et ses peuples dans « la misère ».
Chaque scène délivre une connaissance réelle des problèmes du grand siècle et une pertinence dramatique plaisante. Le plus joli morceau est sans doute le dialogue entre Vauban et Louis XIV, où, avec le vocabulaire poliorcétique (relatif à l’art d’assiéger les villes), Vauban enseigne à son roi, l’art de conquérir les belles… « Il faut tout d’abord connaître le territoire […] faire les plans, […], déterminer la force de sa garnison ». « Quelle garnison ? » demande le Roi. « Le père, le tuteur, les soupirants, les amants, le mari, les frères ! » répond Vauban…
La musique de Paul Lazar et Xavier Thépault s’inscrit dans une lignée classique congruente. C’est un vrai plaisir de la découverte pour certains et pour ceux qui connaissaient Vauban et ses luttes, une joie de le retrouver tel qu’en lui-même ils se l’imaginaient. On espère que le spectacle tournera encore…
* La Poudrière de Jean-Paul Alègre
**Une forteresse au paradis de Victor Haïm
Les 14 et 15 décembre à La Maline
La Couarde-sur-Mer
19:05 Écrit par Dadumas | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Histoire, Théâtre | Facebook | | Imprimer