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26/09/2006

Blanc comme la mort

Elles se ressemblent : même silhouette, même blondeur, même pâleur, même sourire, même fragilité. C’est normal, elles sont sœurs à la scène, Isabelle Carré et Léa Drucker, dans la pièce d’Emmanuelle Marie, Blanc.  « Voyez la grande sœur et la petite sœur » disait Hugo, mais ici, on dit : « l’aînée » et « la cadette », parce que « la petite » et « la grande », elles n’aiment pas ça. C’est normal, maintenant, elles sont grandes toutes les deux. Elles sont adultes et l’enfant qu’elles soignent, c’est leur mère qui va mourir.

Mais elles ne pleurent pas, « jamais devant elle » en tout cas, ni devant nous. Fortes, elles le seront, comme leur mère leur a appris, occupant leur esprit en occupant leurs mains à des « travaux ennuyeux et faciles »,  comme font les femmes qui demandent qu’on s’oublie soi-même pour prouver son amour aux autres. Elles épluchent des légumes, elles préparent le repas, elles étendent la lessive, redonnant aux draps souillés par la malade, le blanc de la propreté, de la pureté de leurs sentiments.

Veiller à la matérialité de la vie quotidienne, c’est en être la gardienne, c’est reculer un peu l’échéance fatale, mettre de la distance entre la mère chérie et la mort. Elles l’attendent pourtant, « l’éternelle Dame en blanc », qui va délivrer leur mère de la souffrance. Elles attendent aussi le père, l’absent un peu lâche, que la cadette a prévenu, parce que, à la fin, il faut aussi pardonner, se pardonner.

Sur ce thème tragique de la destinée humaine, Emmanuelle Marie a écrit un duo d’une lucidité déchirante. Zabou Breitman, le met en scène avec une tendresse profonde et en contre,point ajoute une violoncelliste, Maëva Le Berre qui a composé la musique avec Joachim Mazeau. Elle brise le cadre étroit et étouffant d’une cuisine banale pour ouvrir les murs sur un décor champêtre, (décor de Jean-Marc Stehlé) et grâce à des projections vidéo de Pierre Nouvel, élargit l’espace sur des images de liberté.

La mère, derrière la porte, étouffe. Ouvrir la fenêtre ne suffit pas, c’est la clé des champs, la clé du rêve qu’il fallait inventer, pour briser « les chaînes » et Zabou Breitman s’y entend. Léa Drucker et Isabelle Carré aussi, redevenues petites filles devant le père qui vient pour l’ultime rendez-vous. Bouleversantes... Mais pas tristes, ni graves, ni sérieuses, simplement humaines, d'une justesse rare.

 

 

Théâtre de la Madeleine

 01 42 66 32 42

 

15:30 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer

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