01/03/2009
Dans le regard des autres
Il se crée décidément beaucoup de pièces contemporaines dans ce nouveau lieu, la Manufacture des Abbesses. Après Lonely Planet de Steven Dietz, (note du ), Gilbert Désveaux y met en scène le Regard des autres, une pièce de Christopher Shinn, adaptée par Sophie Vonlanthen. L’auteur est new-yorkais. Il raconte avec humour les difficultés de trois jeunes artistes qui veulent vivre de leur art sans renoncer à leur idéal.
Ils partagent le même appartement. Noël approche, et chacun souhaite qu’avec la nouvelle année ses vœux les plus chers soient exaucés. Petra (Leïla Moguez) fait du strip-tease en attendant de se faire un nom. Stephen (Yann Reuzeau) attend une bourse. Il pourra lâcher les piges d’un journal de cinéma qui exige des critiques « plus musclées » et écrire la pièce qui lui permettra d’être reconnu. Mais c’est le journal qui le largue. Mark (Julien Large), jeune réalisateur, est sorti de la drogue et se compose « un nouveau moi avec l’aide du seigneur ». Mysticisme trop fervent pour être authentique. Il repousse l'amour de Mark, mais le premier tentateur, un loubard tendre et sans complexe, Tan (Geoffroy Rondeau), fera craquer le vernis du dévot. Petra, elle, ne trouvera pas chez Darren (Walter Hotton), le regard qu’elle attend et Stephen malheureux en amour, pourra se consacrer à l’écriture.
Les comédiens, bien choisis, bien dirigés, construisent des personnages attachants. Chacun souffre de ne pas être reconnu, de ne pas être aimé, car c’est « le regard des autres » qui permet d’avoir confiance en soi. Ni Petra, ni Stephen ne veulent de compromissions. Ils doutent, se cherchent, et on voudrait tant qu’ils se réalisent.
Le Regard des autres
De Christopher Shinn
Manufactures des Abbesses
Lundi, Mardi, Mercredi à 21 h
01 42 33 42 03
www.manufacturedesabbesses.com
19:40 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, art, homosexualité | Facebook | | Imprimer
27/11/2008
Une planète refuge
Jody (Michel Burstin) est un rêveur mélancolique. Il sort peu de sa boutique entièrement dédiée aux cartes géographiques et aux guides. Un jour son ami Carl (Bruno Rochette), plutôt expansif, lui apporte une chaise.
Drôle de cadeau ! Curieux cadeau qu’il renouvelle. À chaque visite, sa chaise : siège unique, différent de celui déjà offert. Elles s’accumulent, de formes et de matières diverses, s’empilent, forment une diagonale dans l’espace.
D’où viennent-elles ? Ont-elles été « trouvées dans la rue » comme le prétend d’abord Carl, qui se récuse et finit par dire qu’elles sont « adoptées » ? Il dit la vérité alors, puisque ces chaises sont orphelines de leurs propriétaires qu’une sale maladie a emportés. « Je ne supporte pas de les voir abandonnées » dit Carl.
Dans la scénographie de Jack Percher, un portulan ocré s’inscrit sur le sol parqueté de bois, et les trappes qui s’ouvrent dressent des cartes bistrées. La boutique de Jody est comme « une petite planète au milieu d’un vide gigantesque », une planète refuge pour ces deux amis inquiets d’être à leur tour malades, et qui, épigones de Ionesco, veulent « laisser des traces car (ils sont) des personnes ». Sylvie Rolland met en scène avec pudeur, et sensibilité, rien n’est inutile. L’intensité dramatique croît, sans pathos.
- « Tu garderas ma chaise, Jody ? » demande Carl un soir.
- - « Je te le promets » répond Jody.
Steven Dietz, l’auteur, sait, avec peu d’effets, toucher le secret des âmes.
Lonely Planet de Steven Dietz
Manufacture des Abbesses
à 19 h, du mercredi au samedi,
Jusqu’au 27 décembre
01 42 33 42 03
16:12 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, homosexualité | Facebook | | Imprimer