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06/03/2007

Adam et Ève sont en enfer


Elle a de la chance, la jolie Ève (Julie Denisse), elle vient d’épouser, le matin même, Adam (Olivier Werner), jeune ingénieur qui construit des ponts. Ils ont une chambre dans un appartement communautaire chez Ania (Sabine Macher), et ils peuvent partir en voyage de noces. Adam croit en l’avenir radieux du communisme, à l’organisation sans faille de l’Union soviétique, et à la science. Boulgakov, qui écrit cette œuvre en 1930 commence à en douter. Mais on n’a pas le droit de le dire au pays de la liberté rouge, et sa pièce sera interdite.

Il est vrai que ses interrogations passent la frontière du scepticisme et qu’il ne ménage guère ses dirigeants. Que nous montre-t-il ?

Un savant idéaliste Efrossimov (Axel Bogousslavski), au lieu de créer des armes de destruction massive pour le gouvernement de son pays, invente un rayon destiné à protéger ses frères des attaques chimiques. Efrosimov est un doux rêveur qui soigne même ses ennemis : Daragan (Miloud Khetib), Markisov (Philippe Smith), et s’émeut quand il entend des chiens pleurer. Pire, Efrosimov veut confier  sa découverte, non pas au comité, mais à « tous les pays à la fois », pour « sauver l’humanité du malheur ». Daragan charge Pontchik (Armen Godel), de le dénoncer, à la milice et aux camarades syndicalistes, avant de rejoindre son escadrille de chasseurs, et avant que la grande conflagration ne détruise entièrement Léningrad. Le communisme n’était peut-être pas le paradis, mais, brutalement, Adam et  Ève  plongent en enfer. Grâce au rayon inventé par Efrossimov, les protagonistes qui ont accueilli le savant chez eux, survivent. Sous la férule d’Adam, ils réorganisent une  communauté d’après l’apocalypse, dans la forêt protectrice. Tout n’est pas pour le mieux dans ce monde impossible. La fin est pessimiste et Adam reste seul dans son purgatoire.

La mise en scène de Daniel Jeannete au peint cette désespérance. Le premier décor est gris, étriqué, l’espace est rétréci. Adam et Ève, tout à leurs certitudes heureuses, prennent des poses calquées sur les images de propagandes  que démentent les protagonistes se glissant avec gêne autour de la table, et le mur du fond, qui a, sinon des oreilles, du moins un œil en forme de judas, corrobore cette impression de malaise. Les décors suivants, dans leur naturalisme, accentuent encore l’irrésistible terreur. Metteur en scène et comédiens défendent ici avec maîtrise, la grand œuvre dramatique  d’un théâtre militant et poétique

On sort sidéré d’un tel génie prémonitoire. Et bouleversé par le sort des personnages qui se débattent pour rester des hommes.

Adam et Ève de Mikhaïl Boulgakov

Traduction de Macha Zonina et Jean-Pierre Thibaudat

Théâtre Gérard Philipe à Saint-Denis

Du 5mars au 8 avril

01 48 13 70 00

17:20 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

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