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09/01/2008

Maître Brecht

Vous connaissez tous la métamorphose éthylique de Maître Puntila, méchant à jeun, qui devient bon quand il a bu. Vous connaissez également Omar Porras et son goût pour les masques et la dérision. C’est donc en anarchiste qu’il met en scène Maître Puntila et son valet Matti, fable inspirée à Bertolt Brecht par son exil finlandais, en 1940.

Qu’il soit Sganarelle avec à Dom Juan, Sancho Pança avec Don Quichotte, Arlequin avec son (ou ses) maître (s), le valet par son bon sens, gagne sa cause auprès des spectateurs, mais perd souvent la face vis-à-vis de la société dans laquelle il vit.

Matti, qui refuse de partager un verre avec le diable, c’est-à-dire son employeur, résiste à ce traitement. Sobre dans ce qu’il absorbe, comme dans la gesticulation, Juliette Plumecocq-Mech en montre le sérieux, voire le tragique. Depuis Le Dragon d’Evgueni Schwartz, elle s’impose dans les rôles masculins de héros positif. Elle incarne la dignité d’un prolétaire quand tout le grotesque de la mise en scène charge les maîtres de veulerie. Maître Brecht eût apprécié. Dans Puntila, il n’est pas question de lutte des classes, Brecht peint la  résignation des humbles devant des maîtres despotes. Les revendications viennent des possédants et s’adressent au versatile Puntila. Juges, commerçants, ministre, nobles décavés se prêtent à toutes les bassesses. Et l’interrogation récurrente : « Qu’est-ce qu’un homme ? » sonne comme une accusation.

Les masques de Bernardo Rey, les postiches et le maquillage de Cécile Krestschmar chargent les comédiens. Puntila arbore mèche et moustaches hitlériennes. Les perruques des femmes rutilent. Les nuques plissent, les ventres prospèrent. La troupe au complet (Delphine Bibet, Jean-Luc Couchard, Camille Figuéréo, Louis Fortier, Stéphanie Gagneux, Pierre-Yves le Louarn, Fabiana Medina, Emiliano Suarez) parie sur la métaphore de l’équilibre pour souligner les palinodies acrobatiques auxquelles Puntila les soumet. Les meilleurs dessins animés ne jouent pas aussi bien avec le centre de gravité de leurs personnages. C’est stupéfiant !

Cette troupe franco-suisse, dirigée par un Colombien, interprétant un auteur allemand qui situe son action en Finlande, s’exprime avec l’accent belge. Le public glousse de joie.

Si c’est ça la mondialisation, on est pour !

Théâtre de la Ville 

Théâtre des Abbesses

jusqu'au 26 janvier

01 42 74 22 77

17:40 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

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