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19/02/2010

Le peuple des Évangiles

 

 

 

Vous savez tous que le Théâtre, en France, est né dans une église. À Saint-Benoît-sur-Loire, une aube de Pâques, au Xe siècle, les moines, déguisés en saintes femmes, ont joué la Résurrection du Christ dans la langue du peuple, afin que celui-ci en comprenne le Mystère Glorieux.

Ce mercredi des Cendres, en 2010, Dario Fo a fait entrer le peuple des Évangiles à la Comédie-Française avec Mystero Buffo qui raconte, à la manière des petites gens, les mystères lumineux, et les mystères douloureux tels qu’ils les ont vécus. Muriel Mayette, en les mettant en scène ressuscite la tradition du jongleur.

Catherine Hiégel, Véronique Vella, Christian Blanc, Alexandre Pavloff, Hervé Pierre, Stéphane Varupenne, Christain Hecq seront les jongleurs, conteurs de ces épisodes. Vêtus de noir, pantalon et pull (Costumes Virginie Merlin), ils évoluent sur une scène resserrée, nue et claire, devant un salle semi éclairée. Comme sur un tréteau, ils prennent à témoin le public, le sollicitent.

Catherine Hiegel ouvre le ban, expliquant ce qu’est un mystero buffo : « mystère grotesque », moyen d’expression du peuple, moyen de provocation, de libération.

Puis viendra Christain Hecq, pour raconter un mystère lumineux : la résurrection de Lazare, non pas tels que les évangélistes la disent, mais tel que le gardien du cimetière a pu la vivre, avec ses petits trafics, « Les miracles, ça marche très fort ! » et cette foule d’anonymes, badauds, convaincus, incrédules, râleurs, et vide-gousset…

Entre les deux récits, le fond de scène s’illumine, la salle s’éteint, (scénographie et lumières : Yves Bernard) et le Christ vit la Passion, dans des tableaux vivants et colorés empruntés à l’iconographie chrétienne, joués par les élèves-comédiens de la Comédie-Française : Camille Blouet, Christophe Dumas, Florent Gouëlou, Géraldine Roguez, Chloë Schumtz, Renaud Triffault, illustrés d’une musique d’Arthur Besson.

En marge de cet évangile apocryphe, Hervé Pierre nous enseignera la règle de Saint-Benoît, il sera aussi le jongleur final, celui par qui tout le théâtre peut commencer. Et nous apprendrons aussi avec Alexandre Pavloff comment le fou essaya de d’empêcher la Mort de prendre Jésus, comment les femmes retinrent Marie pour qu’elle ne voie pas à la crucifixion de son Fils, comment Marie y assista, chassa l’ange Gabriel, et comment Jésus lui demanda de se résigner…

Le Stabat Mater que joue alors Catherine Hiegel a de quoi bouleverser les plus mécréants.

Mais entre Gethsémani et Golgotha, Véronique Vella, Yves Gasc, Christian Blanc et Stéphane Varupenne racontent des épisodes plus païens et grotesques, fabliaux scatologiques, scènes d’inversion des rôles : l’énorme rire de Rabelais, l’érotisme de Boccace participent du théâtre de Dario Fo.

Les comédiens se plient avec bonheur à toutes les énormités.

On rit, on s’émeut, on comprend « comment ça s’est passé ».

 Iconoclaste Dario Fo ? Non au contraire, il sacralise le peuple.

 Il n’y a pas de blasphème dans ses tableaux gouailleurs, juste un immense amour de l’humanité.

 

 

 

 

Mystero Buffo et Fabulages de Dario Fo

Comédie-Française

Salle Richelieu

0825 10 16

Rencontres avec Dario Fo : 25 mars, 5 et 27 mai à l’Institut culturel italien.

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