19/03/2011
Un généreux égoïste
Léon de Saint-Pé est un personnage récurrent dans les dernières pièces d’Anouilh, et de La Culotte au Nombril, il fulmine contre les siens, la société, les journalistes, la terre entière. Foutu caractère que Léon et foutue famille que les Saint-Pé !
Jean Anouilh n’a jamais été un tendre, et, à l’automne de sa carrière, miné par la maladie, malmené par la critique, vampirisé par tous les pique-assiette qui le croient fort riche, il est devenu un peu ce Saint-Pé (Francis Perrin), cet auteur atrabilaire qui juge bien ingrats les humains, et injuste l’existence qu’ils lui font mener.
Il cite Molière « Pourquoi ne m’aimer pas, Madame l’impudente »*, car, devenu barbon, il doute de la sincérité de sa jeune maîtresse (Alexandra Ansidei). Il ne fait guère confiance à son ami Gaston (Éric Laugerias), tapeur professionnel, il se méfie de son médecin (Jean-Paul Bordes), ruse avec son ex (Francine Bergé), ses filles (Sarah Grappin, Perrine Tourneux), son gendre (Davy Sardou), mais finit toujours par céder. Chèques à la famille, chèque à Gaston, ou pourboires au livreur (Christian Bouillette), le soi-disant « égoïste », arrose tous les solliciteurs. Lui qui est accusé de « se regarder le nombril », écoute les doléances de chacun et les entretient malgré une lucidité amère. Il a l'égoïsme généreux, Léon de Saint-Pé ! Ou peut-être est-ce un faible qui ne sait pas dire non, et paye pour avoir la paix. Mal lui en prend !
Pour sa dernière mise en scène, Michel Fagadau a fait confiance aux acteurs qui dansent autour de Francis Perrin une parade cocasse, dans un décor trop sage de Mathieu Lorry-Dupuy, des costumes de Pascale Bordet qui situent la pièce dans les années cinquante plus que dans la décennie 80 où elle fut créée.
Anouilh reste un maître dans la réplique assassine, et la farandole des « fâcheux » se termine en ballet farcesque à la dernière séquence. La pièce aurait pu devenir un « bal des voleurs » plus actuel. Car, hélas ! Les humains ne se sont pas corrigés en trente ans…
* L’Ecole des femmes
Le Nombril de Jean Anouilh
Comédie des Champs-Elysées
01 53 23 99 19
20 h 45
22:03 Écrit par Dadumas dans culture, humour, Littérature, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anouilh, le nombril, comédie des champs-élysées | Facebook | | Imprimer
29/06/2010
A lire (8)
Jean Anouilh aurait eu cent ans cette année. Pour commémorer l’auteur qui l’a encouragée à écrire, Anca Visdei publie une biographie : Anouilh, un auteur « inconsolable et gai.
Elle retrace les étapes de la carrière du grand auteur dramatique, gravit avec lui le chemin de ses succès, explique les raisons des échecs, commente les inimitiés tenaces (et injustes) dont il fut l’objet, corrige un certain nombre de préjugés. Elle entrecroise des témoignages, des critiques, avec des citations de Brel, autre grand pessimiste, pourfendeur d’hypocrisie. Elle recense les interprètes qui l’adulèrent et les critiques qui le haïrent.
Cette saison, on a vu Colombe (Comédie des Champs-Élysées), cet automne, on verra Léocadia (Théâtre 14), à quand un hommage du théâtre non subventionné auquel Jean Anouilh donna la plupart de ses œuvres ?
Visdei Anca, Anouilh, un auteur « inconsolable et gai édition les Cygnes, prix : 20 €
13:51 Écrit par Dadumas dans Littérature, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : théâtre, littérature, anouilh, visdei | Facebook | | Imprimer