01/02/2009
Avant le mariage
Lorsque Miriam (Michelle Brûlé) a quitté David (Rufus), leur fille Ruth (Yaël Elhadad), avait huit ans. Elles sont retournées vivre à Montréal, lui est resté au kibboutz. Vingt ans plus tard, elle se marie, et Ben (Franck Bussi), le fiancé, « lui aussi en perte de père », a tenu à ce que David soit présent. Il est donc allé à sa recherche, en Israël. Il l’a trouvé, il le ramène, et tous les deux rassemblés se ressemblent bougrement : même altruisme, même judaïsme pacifique et bienveillant : « je prends ce que la vie me donne », dt le père.
Comme Ruth ressemble à son père, on sent bien que ceux-là vont vite refermer les blessures d’autrefois.
Miriam, ayant plus à se faire pardonner, y met plus de rancœur. Cependant, Rifkha (Sylvie Guermont), la mère de Ben, sert de confidente. Elle permet aux deux femmes de s’expliquer « avant la cérémonie ». Elle leur dit aussi qu’ « un enfant n’aime pas davantage sa mère quand il déteste son père. »
À travers cette histoire de famille, l’auteur, Naïm Kattan, juif né à Bagdad, pose la question de l’identité, de l’appartenance à un peuple, à un pays, car « un pays ne remplace pas une identité. »
Florence Camoin, dans sa mise en scène, fait évoluer les personnages dans deux décors symétriques : à jardin, l’espace de Ben et sa mère, à cour, l’espace de Ruth. Au proscenium, du côté de chez Ruth, la musicienne, Christine Kotschi, avec ses instruments à cordes, de l’autre, le guéridon d’un café ou David s’installe pour réfléchir… Les lumières d'Anne Gayan basculent astucieusement sur l’un ou l’autre espace. Les scènes sont brèves, ponctuées de musique, ou introduites par des chants traditionnels modulés par Mitchélée (chant).
Le spectacle est émouvant, et, dans la salle, certains spectateurs vivaient la situation…
Avant la cérémonie de Naïm Kattan
Prix de l’Académie française 2007
Espace Rachi
01 42 17 10 38
jusqu’au 8 février
reprise les 6 et 7 avril au Théâtre de Saint-Maur
01 48 89 99 10
12:34 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, judaïsme | Facebook | | Imprimer
31/01/2009
Livres (suite)
Les arbres de Ville-Évrard lorsqu’ils deviennent passage des cigognes dans le ciel d’Armand Gatti est un poème fleuve qui serpente et divague du ciel à la terre, de l’hôpital où furent internés Camille Claudel et Antonin Artaud, de la banlieue à la forêt de Berbeyrolle, de La Turbie aux bouleaux d’Auschwitz avec trente cinq « stagiaires » de quatorze pays différents.
« Un arbre peut-il se dire autrement que dans le cosmos ? » demande Gatti.
Comme Gatti, éternel révolté qui apostrophe le ciel, à quatre-vingt-cinq ans, l’homme, lui ressemble dans « sa vérticalité insurrectionnelle ».
Les arbres de Ville-Évrard d’Armand Gatti
Publié avec le concours du C. N. L.
Editions Verdier, 14 €
18:02 Écrit par Dadumas dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, théâtre | Facebook | | Imprimer
29/01/2009
Le rôle de leurs rêves
Le titre donne le ton. Dans la version originale, l’inspecteur s’appelait « Hound », nom d’une race de chiens destinés à la chasse. Pour la version que Jean-Luc Revol met en scène et dont il signe le texte français, c’est l’onomatopée de l’aboiement qui nomme l’inspecteur. Les autres personnages suivent le même chemin parodique, conformément à l’esprit de Tom Stoppard, car tout peut se traduire quand on a l’intelligence et le goût des turlupinades. L’auteur, et l’adaptateur mêlent avec art l’esprit du boulevard du crime et celui du cabaret de chansonniers. Le genre policier bascule dans la bouffonnerie et le public s’amuse.
Deux critiques dramatiques, Lunule (Jacques Fontanel) et Deboulette (Eric Théobald), assistent à la représentation d’une pièce policière. Lunule est l’intérim d’un certain Ferson, son chef de rubrique, absent. Deboulette, homme à femmes est sorti la veille avec la jeune première dont il vante les mérites artistiques à Lunule assez sceptique, uniquement préoccupé de savoir où est passé Ferson. La pièce commence, Les costumes d’Aurore Popineau sont congruents, mais les lumières de Philippe Lacombe soulignent les effets spéciaux sur des personnages stéréotypés, une situation convenue, et des comédiens qui jouent dans l’outrance, et volontairement à contretemps. Les rires redoublent.
La femme de ménage expose la situation gravement et avec force clichés. Dans le manoir de Muldoon, « coupé du monde » par la marée et « le brouillard qui se lève », il se passe des choses étranges. Sir Albert Muldoon a disparu un an auparavant, son frère infirme Magnus (Elrik Thomas) s’est installé auprès Lady Cynthia qu’il courtise. Un jeune homme, Simon (Pierre Deladonchamps), vient d’arriver et se partage les faveurs de la voluptueuse Cynthia (Viviane Marcenaro) et de son invitée Felicity (Anne Bouvier). La police recherche un criminel qui s’est échappé, et un cadavre, que nul ne semble remarquer, gît sous le canapé (Décor Sophie Jacobs). Lunule, très cuistre, commente sérieusement. Deboulette est fasciné par l’actrice qui joue Cynthia et a oublié qu’il est venu pour celle qui joue Félicité.
Le deuxième acte « a du mal à tenir ses promesses », mais l’inspecteur Whaff (Jean-Luc Revol) remarque enfin le cadavre, et pendant l’entr’acte du troisième acte, Deboulette passe sur scène, et devient Simon. Nous ne dévoilerons pas comment, toutes les conventions périclitant, Lunule se retrouve aussi sur scène, troquant le carnet du critique contre celui de l’inspecteur. Lunule et Deboulette vivent le rôle de leurs rêves… Mais pas pour très longtemps…
Les comédiens sont irréprochables et la malice de Jean-Luc Revol chatouille délicieusement les zygomatiques.
Pour compléter la fête, les auditeurs du Masque et la Plume auront droit à un jeu supplémentaire.
Qui se cache derrière les noms-valises de Ferson et de Leonardiliot ?
L’inspecteur Whaff
De Tom Stoppard
Texte français de Jean-Luc Revol
depuis le 27 janvier
Théâtre Tristan Bernard
01 45 22 08 40
19:38 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, revol, stoppard | Facebook | | Imprimer