06/11/2014
Au nom du père
Ils sont incroyables les pères ! Ils veulent tout diriger dans la vie de leurs enfants, ils emploient quelquefois la manière forte pour être obéis et ils voudraient qu’on les aime. Il en est même un que Dominique Warluzel imagine, dans Fratricide, jouant au Roi Lear en laissant, par testament authentique, sa fortune à celui de ses fils qui lui témoignera le plus d’attachement, ou à part égales, s’ils prouvent l’un et l’autre leur affection… devant notaire ! (Bertrand Nadler ou Franck Borde)
Jean (Pierre Santini) et Fabien (Jean-Pierre Kalfon) sont frères. Ils ne se sont pas vus depuis vingt ans et se retrouvent chez le notaire pour la lecture du testament. Salon douillet, velours rouge, whisky offert (Décor, Catherine Bluwal), les deux hommes vont s’affronter et déballer leurs souvenirs. Les lumières de Marie-Hélène Pinon basculent.
Jean a réussi sa carrière d’avocat. Fabien était en prison. Engagé volontaire très jeune, pour échapper à sa famille, il a d’abord été inculpé pour « vol de matériel militaire », puis adhérent à l’O. A. S., chassé de l’armée, il est devenu proxénète avant de terminer assassin.
Fabien est brutal : « J’ai jamais aimé mon père. » Car ce père, dit-il, ne l’a jamais aimé, et a toujours préféré Jean. Il montre un paquet de lettres qu’il lui a envoyées et qui lui ont été retournées, avec la mention « retour à l’envoyeur ».
Au nom du père, les reproches pleuvent que Jean s’efforce d’atténuer. Mais la rage de Fabien ne tarit pas, jusqu’au moment où Jean lui révèle que lui-même a un fils, jusqu’à ce que la dernière compagne du « vieux », apporte le codicille qui va tout changer au testament.
Vous dire que les deux comédiens, protagonistes du duel familial, sont extraordinaires paraît banal, tant l’intensité des échanges est mordante, l’ironie du texte capricante, leur langage cru.
On ne choisit pas sa famille, mais on peut choisir son spectacle. Je vous recommande celui-ci.
Photos : © Patrick Osenda
Fratricide de DominiqueWarluzel
Mise en scène, Delphine de Malherbe
Théâtre de Poche-Montparnasse
01 45 44 50 21
Du 4 novembre au 1er mars
19h du mardi au samedi, dimanche 17h30
Et, toujours au Poche Montparnasse,
Mise en scène, Daniel Colas
Avec Marianne Epin, Daniel Colas, Mathilde Penin, Philippe Rigot
Depuis le 28 octobre et jusqu’au 11 janvier
21h du mardi au samedi, dimanche 15h
Photo © Brigitte Enguerand
15:12 Écrit par Dadumas dans Blog, Histoire, langue, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : théâtre, théâtre de poche-montparnasse, pierre santini, jean-pierre kalfon, delphine de malherbe | Facebook | | Imprimer