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27/12/2012

Le Théâtre de Robert Poudérou

Le Théâtre de Robert Poudérou

 

Le Théâtre de Robert Poudérou est devenu le sujet d’une thèse de Guy Sabatier : Le  rêve d’une société plus équitable  (1971-2011). Elle vient d’être publiée, et pour ceux qui pensent encore que les auteurs contemporains français ne traitent pas les grands problèmes de notre société, voici un beau camouflet !

« Il est un des auteurs qui a le plus cassé les silences de l’Histoire de notre pays », écrivait Gilles Costaz dans L’Avant-Scène Théâtre.

 Je l’avais découvert avec Pendant que vous dormiez, en 1987, et jamais aucune de ses œuvres ne m’a laissée indifférente.

Guy Sabatier, en lui consacrant cette étude, montre que Robert Poudérou, « auteur-citoyen », donne aux spectateurs une conscience morale, une mémoire respectueuse des minorités, une tendresse envers l’humanité… tout en les divertissant.

Auteur discret, rare et généreux, il ne vous décevra pas.

 

 

 

 

 

Le Théâtre de Robert Poudérou, éditions de L’Harmattan, 30 €

18:57 Écrit par Dadumas dans Livre, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer

15/12/2012

Bohèmes

 L'exposition s'appelle "Bohèmes", et elle décline l'histoire d'un peuple rêvé par les artistes, les personnages qu'ils peignirent ou qu'ils imaginèrent, et comment d'un peuple exclu, les mêmes artistes créèrent un univers mythique, celui de l'artiste maudit.

Bohémiens, tsiganes inspirent les peintres du XVe siècle au XIXe, et on raconte que Jacques Callot leur doit protection dans son voyage à Rome.

En 1832, Hugo publie Notre-Dame de Paris et bien avant la comédie musicale que vous connaissez, son personnage d'Esméralda inspira un opéra à Louise Bertin (livret de Hugo lui-même). Un peintre d'origine russe, le baron Charles de Steuben la représente avec la petite chèvre Djali, inspiré sans doute par ce passage du roman :

exposition Bohèmes, Grand Palais, Hugo "La danseuse des rues était, en parlant ainsi, d’une beauté qui frappait singulièrement Gringoire, et lui semblait en rapport parfait avec l’exaltation presque orientale de ses paroles. Ses lèvres roses et pures souriaient à demi ; son front candide et serein devenait trouble par moments sous sa pensée, comme un miroir sous une haleine ; et de ses longs cils noirs baissés s’échappait une sorte de lumière ineffable qui donnait à son profil cette suavité idéale que Raphaël retrouva depuis au point d’intersection mystique de la virginité, de la maternité et de la divinité."

Personne n'est oublié dans cette exposition, ni  la Carmen de Mérimée, ni celle de Bizet.

Les rapins, les musiciens, rejoignent Van Gogh, Corot,Courbet,Cézanne,Dehodencq ,Casas, Signac, et tant d'autres, tandis que Rimbaud y  tire "les élastiques de (ses) souliers blessés, un pied près de (son) coeur."


Au Grand Palais

jusqu'au 14 janvier 2013


12/12/2012

La violence et le sacré

 

 

Vlad Troitskyi est l’hôte, pour quelques jours encore, du Théâtre de la Ville et de son théâtre associé, le Monfort. Dans ce dernier, il a donné Le Roi Lear-prologue, qui s’inspire du début et de la fin de la pièce éponyme de Shakespeare. On y reconnaît les trois filles, les deux ingrates et la triste Cordélia, mais quelque chose est pourri dans le royaume de Lear, et ce qu’on partage sur scène relève de la mafia. Vlad Troitskyi est un maître de la mise en scène et sa troupe ukrainienne est stupéfiante.

Sous les masques de Natalia Marinenko, les bandes rivales s’affrontent, au rythme  des musiciens du DaskhaBrakha : Marko Halanevych,  Nina Garenetska, Iryna Kovalenko, Olena Tsybulska. Quand tous les liens filiaux sont rompus, Cordélia renvoyée, quand Lear erre sur la lande et qu’il devient la marionnette du Fou, le plateau se peuple d’étranges créatures, incarnées par des comédiens magnifiquement dirigés : Natalka Bida, Daria Bondareva, Dmytro Iaroshenko, Ruslana Khazipova, Roman  Iasynovskyi, Dmytro Kostyumynskyi, Viktoriia Lytvynenko, Iasynovska, Solomiia Melnyk, VolodymyrMinenko, Anna Nikityna, Igor Postolov, Vyshnya, Zo. Pas de dialogues, mais des chants, des rixes, des danses qui renvoient à Shakespeare et, par le jeu de la distanciation aux luttes éternelles des hommes avides de pouvoir.

Dans Le Viï-le roi terre, Vlad Troitskyi adapte un texte de Klim qui s’inspire lui-même de Nicolas Gogol. La nouvelle initiale emprunte aux contes fantastiques d’un « monde archaïque ». Elle est tissée de superstitions païennes et de rites d’une « vieille église » qui les a accommodées pour mieux asservir les âmes villageoises. La femme y est sorcière, et les hommes brutaux.

Des voix légères flottent dans une futaie suspendue où la lumière est rare. Les deux étudiants revenus au pays natal s’y risquent à tâtons. Une noce déboule avec ses danses, une sorcière au seuil de la mort réclame une disciple, un possédé vaticine. La violence et le sacré s’allient pour détruire les hommes. La pitié vient des persécutés, comme dans l’étonnant tableau où la sorcière berce le possédé pour le calmer, et où l’étudiant étreint tendrement la sorcière. Mais la fraternité est à réinventer. Les icônes qui épient les humains finiront dans les flammes (création vidéo : Maksym Poberezhskyi, Oleksii Tyschenko).

Les musiciens du DaskhaBrakha  se mêlent aux comédiens : Pierre-Antoine Dubey, Bartek Sozanski,
Anatolii Cherkov, Nataliia Halanevych, Tanya Havrylyuk,
Dmytro Iaroshenko, Roman Iasinovskyi,
Ruslana Khazipova, Dmytro Kostiumynskyi,
 Solomiia Melnyk, Volodymyr Minenko, Tetyana Vasylenko, Kateryna Vyshneva, Nataliia Zozul. Les « portes de l’enfer » s’ouvrent. La sorcière mourra, et l’un des étudiants y perdra la vie.  On reste pétrifié devant la beauté sauvage de l’ensemble.

 

 

Théâtre de la Ville

Jusqu’au 14 décembre

01 42 74 22 77

Créé au  Théâtre Vidy-Lausanne
COPRODUCTION Théâtre de la Ville-Paris – Festival Passages, Metz

Avec le soutien de  Ukrainian Art Project, Fondation Landis & Gyr

Viï – le roi terre est dédié à René Gonzalez.