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20/02/2007

Le désert est dans les coeurs

 

La propriété est ceinte de hauts murs. Les portes qui la ferment sont étroites et la famille Serpenoise les garde bien closes afin que ses secrets ne s’échappent pas. Quinze ans auparavant, Mathilde (Martine Chevalier), la fille rebelle et déshonorée, avait fui. Aujourd’hui, elle a quitté l’Algérie en guerre pour revenir chez elle, avec ses deux enfants, Édouard (Thomas Blanchard) et Fatima (Julie Sicard), bien décidée à récupérer sa maison, régler ses comptes avec son frère Adrien (Bruno Raffaelli) et les notables de la ville, ses ennemis. Adrien pense qu’elle revient dans cette demeure pour « la sécurité », mais elle le détrompe d’entrée : « Je viens ici apporter la guerre »

Adrien pontifie entre un fils attardé, Mathieu (Grégory Gadebois) et sa seconde femme Marthe (Catherine Hiegel) qui a l’éthylisme mystique. La gouvernante, Madame Queuleu (Catherine Ferran) voudrait bien réconcilier la sœur rancunière et le frère perfide, « plus de chamailleries », dit-elle, mais en vain. Ces deux-là ne se cherchent que pour s’insulter, et s’opposer. Et autour d’eux, rien n’incite à l’apaisement. Trop de mystères inexplicables entourent cette fratrie antagoniste. De qui sont les enfants de Mathilde ? Comment Marie (Catherine Sauval), la première femme d’Adrien est-elle morte ? Pourquoi Plantières (Michel Vuillermoz) a-t-il désigné Mathilde à la vindicte populaire ? Quel complot les amis d’Adrien, Sablon (Pierre-Louis Calixte), Borny (Alain Lenglet) et Plantières fomentent-ils dans cette petite ville de garnison ?

Il se passe « des choses étranges dans cette maison », Mathilde déchaîne les querelles, Fatima s’attarde dans le jardin où le fantôme de Marie apparaît, Mathieu et Édouard franchissent le mur pour découvrir la ville avec Aziz (Michel Favory), tandis qu’un grand parachutiste noir (Bakary Sangaré) admoneste Adrien au nom de la Patrie : « Nous en sommes le cœur et les poumons, vous les bourgeois, vous en êtes les intestins », avant de réclamer « les femmes ». Le crime rôde. La haine assèche ces cœurs stériles. Adrien et Mathilde n’écoutent personne et pensent que « la vraie tares de (leurs) vie, ce sont (leurs) enfants ». Des gifles pour Mathieu, pas un regard pour les nouveau-nés de Fatima, pas un mot de regret pour Aziz tué dans un attentat : le désert est dans les cœurs.

Bernard-Marie Koltès avait écrit une comédie noire, et Muriel Mayette la traite avec une virtuosité  exceptionnelle. Elle révèle le côté farcesque et tragique des protagonistes, enfants shakespeariens au centre d’un drame qu’ils ont provoqué et qui les dépasse. Derrière le mur qui cache l’horizon, l’arbre mort d’En attendant Godot, dresse son squelette grisâtre, pour mieux accrocher l’apparition d’une Marie en robe et auréole saint-sulpiciennes (scénographie et lumières d’Yves Bernard). Les amis séditieux d’Adrien ressemblent aux Pieds Nickelés : Croquignol, Filochard et Ribouldingue de province dont les petites turpitudes confortent les grandes fortunes, pantins qui soutiennent des sociétés closes et corrompues. Les acteurs sont tous excellents, leurs propos sont soulignés par une musique qui ricane (Michel Portal) sur des dysharmonies goguenardes.

Retour au désert entre brillamment au répertoire et les ombres de Jean-Luc Boutté, de Richard Fontana, d’Antoine Vitez et de Jacques Toja qui ont tant aimé Koltès et cette maison, doivent se réjouir de cet honneur.

Retour au désert de Bernard-Marie Koltès

Comédie-Française Salle Richelieu

en alternance 0825 10 16 80
www.comedie-francaise.fr

11:30 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

15/02/2007

Guitares en folie

 

  On connaissait la guitare sèche et la guitare électrique, avec Olé, j’ai découvert la guitare fumante : celle de Paul Morocco, un plantureux gaillard qui pète le feu et dont le caractère est aussi vif que le rouge de sa redingote. Il tyrannise ses complices, Guillermo de Endaya, qui voudrait jouer les crooners, et Antonio Gomez les latin lovers. Il est hargneux, imprévisible, irascible et jaloux.

Mais en réalité, rien de sérieux, c’est tout pour rire ! Guillermo vient de Bilbao. Antonio a quitté La Havane depuis plus de dix ans, et Paul, Cajun par son père et Marocain par sa mère avait choisi l’Angleterre. Ils sillonnent ensemble l’Europe. Et le trio interprète avec brio un numéro de clowns guitaristes assez déjantés.

Sollicitant le public, ils obtiennent aisément sa complicité, et la soirée, est placée sous le signe de l’humour autant que sous celui de la musique. Ils sont virtuoses et leurs voix sont profondes, on aimerait qu’ils chantent encore. Ils multiplient les gags, jonglent, imaginent des accessoires délirants, et on passerait bien la nuit à s’amuser de leurs trouvailles. Car avec eux, « Olé ! », les guitares en folie passent de la salsa au flamenco, du jazz au folklore, des romances slaves au pop américain, et d’Antonio Gadès au Marx Brothers.

Avec Olé !Y’a d’la joie !

 

Olé

À la Nouvelle Ève

du mercredi au samedi à 21 h 30

dimanche à 16 h

Jusqu’au 11  mars

08 25 01 75 75

 

20:40 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

14/02/2007

Le onzième jour

Tout va très vite aujourd’hui. Quand Lise a rencontré Jules, au bout de dix secondes, ils se sont embrassés, au bout de dix minutes, ils ont fait l’amour, et au bout de dix jours, les voilà qui se disputent. Le cap du onzième jour sera-t-il « le cap Horn » ou celui de  « Bonne Espérance » ? « Un gouffre plein de mots se creuse » entre eux. Gouffre sans fond, puisque Jules ne finit jamais ses phrases, gouffre infranchissable puisque Lise oppose des barrières procédurières à toute velléité de réconciliation.

Dans le foyer du Théâtre de la Madeleine, Bernadette Le Saché et Jean-Louis Bauer, épouse et mari à la ville, jouent les amants terribles à la scène, « sous le regard amical de Stéphanie Tesson et Michel Couvelard ». Il est passionné, elle est raisonneuse. Il est lyrique, elle ratiocine. Il a de l'humour, elle a mauvais caractère.

Dix jours ensemble raconte cette querelle d’amoureux qui au bout de dix jours parviennent pourtant à s’étonner l’un l’autre… Sous la scène de ménage couve une maladie mortelle pour les couples : la terrible censure d’une époque qui aime les blasés, les cyniques, les sans cœur et dans laquelle « le manque de paroles d’amour » est si banal, que les mots « je t’aime » deviennent des armes dangereuses.   

 Jean-Louis Bauer quitte tout réalisme et laisse venir à lui, et à nous, l’imaginaire bienfaisant qui explore les songes et les sentiments. Il est doux, dans ces grands théâtre, de trouver des plages modestes et qui, sans autre ambition que de vous divertir, donnent aussi à rêver.

 

 Dix jours ensemble de Jean-Louis Bauer

Théâtre de la Madeleine

à 19 h jusqu’au 23 février

01 42 65 06 28

10:50 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre |  Facebook | |  Imprimer