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30/01/2007

Retraite forcée

 

Gildas Bourdet, officier des Arts et des Lettres, restitue ses décorations.

Directeur du Théâtre National du Nord Pas-de-Calais,  puis du Théâtre de la Criée à Marseille, il avait ensuite dirigé le Théâtre de l’Ouest Parisien, il vient d’apprendre que la convention qui liait sa compagnie au Ministère ne serait pas renouvelée.

« On » lui conseille de prendre sa retraite. Il a cinquante-neuf ans !

Au moment où on annonce partout qu’il va falloir travailler plus et plus longtemps, comme dirait Feydeau, elle est raide, celle-là !

Feydeau justement, fait-il partie des « auteurs indigents » qu’on l’accuse d’avoir mis à l’affiche ? Comme Ayckboun ? Calaferte ? et Molière ? Entre autres…

Invraisemblable… Injuste surtout, car outre un metteur en scène admirable, un peintre de talent, il est aussi un auteur de génie.

S’il a cessé de plaire dans les ministères, il devrait rebondir ailleurs. Aidons-le.

Compagnie Gildas Bourdet

77, rue de la Colonie

75013 Paris

12:00 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

29/01/2007

Fuite en sourdine

 

Pas très confortable pour un fils (Julien Rochefort), même adulte, de jouer les médiateurs entre sa mère (Catherine Rich) et son père (Pierre Santini). Alice est mystique, ardente, toujours en mouvement. Édouard est réaliste, placide, calme jusqu’à l’indifférence. Il lit un ouvrage consacré à l’hécatombe que fut la retraite de Russie, pendant qu’Alice vitupère contre la société qui consomme à outrance. « Pas de pitié ! » pour les faibles, d’où naît une comparaison. Jimmy  est comme son père, pudique, discret. Il n’a pas envie de « se disputer ». Il vient, en bon fils, passer le week-end avec eux.

Mais il va être obligé de prendre parti. Car ce père si réservé a un secret : une liaison. Il a décidé de quitter Alice pour Angela, tout le contraire de cette femme agitée qui vire quelquefois à la folie. Las de faire des efforts « pendant trente-trois ans », Édouard prend la fuite, sans éclats, en sourdine, mais Édouard « revient à la vie ». Il a le courage d’affronter la tempétueuse Alice, celui de régler l’intendance, de résister à la pitié devant l’épave qu’elle devient. Et le fils devient le confident des deux. Mais lui, qui câlinera son désarroi ?

 Le décor d’Antoine Ranson ménage deux espaces. Le fond surélevé par un praticable sert d’entrée au cottage, de passage entre deux lieux. La partie avancée représente la pièce à vivre. Des bascules de lumière, un cadre qui pivote et, à cour, le coin de la cheminée deviendra celui du living londonien où vit le fils  Au fond une grande découverte, comme une baie vitrée, s’ouvre sur un paysage d’arbres aux feuillages automnaux, puis à une route enneigée, bordée par les arbres dénudés. Jolie façon d’indiquer que les mois passent.

Tout est simple, évident, merveilleusement joué par les trois protagonistes. On partage chaque cri de révolte d’Alice. Chaque argument d’Édouard touche, ainsi que la détresse de Jimmy. La délicatesse de l’auteur ne permet pas d’accuser l’un ou l’autre, et c’est cette  « neutralité » bienveillante qui a dû séduire Gérald Sibleyras qui signe l’adaptation. Entre gens intelligents, férus de poésie, il ne peut en être autrement...

 

 

La Retraite de Russie de William Nicholson

adaptation française de Gérald Sibleyras

Petit-Montparnasse

01 43 22 77 74

17:50 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre |  Facebook | |  Imprimer

27/01/2007

La porte de la folie

  La porte s’est refermée, dit-il, alors qu’il raccompagnait un disciple sur le palier. Il peste contre son visiteur, contre lui-même et « l’absurdité de ce geste imbécile ». Il gronde contre les voisins absents, s’irrite du gardien qui ne répond pas et refuse de déranger sa sœur cadette pourtant si dévouée avec lui depuis la mort de ses parents et de ses enfants.

C’est qu’il n’est plus tout jeune, le professeur de philosophie « à la renommée internationale ». Vieillard atrabilaire, il expose ses griefs contre les ambitieux, les hypocrites, les opportunistes, les paresseux, les incultes, la télé, enfin tout ce qui nuit à l’ordre de l’univers tel qu’il l’a connu, et qu’il ne reconnaît plus, lui, l’adepte de Platon, le commentateur du Phédon. Sans indulgence, il voudrait qu’on s’apitoie sur son sort.

On en rit. Il porte encore une veste de pyjama sous son costume un peu avachi, et peu à peu son raisonnement s’égare jusqu’à la ratiocination.  Il louvoie dans le passé jusqu’au ressassement. Et le bouffon devient tragique.

Il confond ce qu’il vit, ce qu’il croit vivre et ce qu’il a vécu. Michel Aumont, admirablement dirigé par Marcel Bluwal qui signe aussi l’adaptation, inspire la compassion, la crainte. La démence surgit par bouffées, imprévisible. « Le monde n’existe que dans les questions qu’on lui pose » dit le professeur qui pense encore. « Mais de quelle chambres est-ce que je parle ? » dit le vieux qui s’égare. Expulsé de chez lui, expulsé de lui-même, en dehors de la normalité, il a franchi la porte de la Folie.

Pour donner « la sensation de dépouillement et de nudité » dont parle le vieil homme, la scène est vide, meublée par instants de quelques chaises blanches qu’on enlève. La musique de Jean-Baptiste Favory et la lumière Jacques Rouveyrollis matérialisent le désordre de la pensée. C’est quelquefois terrifiant. On pense à Althusser, on pense à ces vieillards hallucinés qu’on découvre irresponsables une fois l’irréparable commis. Et c’est déchirant.

 

À la porte de Vincent Delecroix

depuis le 15 janvier

Théâtre de l’œuvre

01 44 53 88 88

16:35 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre |  Facebook | |  Imprimer