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15/11/2008

Menu de soirée

 

 Elle a de la volonté Bertille (Céline Garribaldie) ! bertille%20avec%20carte_0.jpg Dans ce restaurant huppé où il va dîner, il faut réserver sa place un an à l’avance. Elle en a rêvé, elle s’y est préparée avec constance, comme pour un rendez-vous amoureux, assortissant ses tenues au menu qu’elle commande (Costumes Jef Castaing). Bertille 2.jpgPeau d’Âne ne commandait que des robes couleur de temps ou de lune, Bertille, ose la robe « velouté », la robe « poissons et crustacés », la robe « poulette », la robe rôti », la robe « salade », et jusqu’au café, elle dépouille, jupe après jupe les mets de la carte. Satisfaisant sa gourmandise, elle effeuille les textes qu’une vingtaine d’auteurs ont dédiés aux plaisirs sensuels de la table. Seule en scène, voluptueuse, elle rayonne.  

Les lumières de Jean-Frédéric Beal donnent du jus à la mise en scène de Frantz Herman, et la voix charmeuse de Bertille enveloppe les mots de douceurs qui mettent le spectateur en appétit. Les mignardises du dîner précèdent toujours les bagatelles de la porte. Mais seuls les connaisseurs le savent.

 

 

 

 

 

Bertille ou La Cerise sur le gâteau

Depuis le 13 novembre

A la Folie-Théâtre à 19 h du jeudi au samedi

01 43 55 14 80

 

07/11/2008

La nuit du coup de couteau

 

 

Ils portent la même veste noire, coupe sobre, tissu sec, facture bon marché. Ils sont de la même famille sociale. Milieu modeste dont on s’élève par les cours du soir, et  le travail. Tous ? Sauf une, Hélène, la narratrice (Laure Wolf), velours noir et revers de satin, la belle tentatrice, venue s’encanailler au Tropical Bar, un soir, le soir du crime…

Et aujourd’hui, ils sont là, réunis pour le procès. Le présumé coupable, Alex (Raphaël Leguillon), répète : « Ce n’est pas mon histoire ». Rebelle à toute discipline, il a déjà été placé en foyer. Ce soir-là, il a abusé du rhum et du shit, tous les témoins le disent. C’est un mauvais garçon, il attire les regards, enveniment les querelles. Le Père (Jean-Jacques Simonian) et la Mère (Virginie Volmann), s’interrogent, maladroits, dépassés, mais solidaires de leurs enfants, accompagnés de Frédéric, son frère (Anthony Breurec), l’un à côté de l’autre, côté jardin.

Côté cour, Germain, le frère de la victime (Arnaud Stéphan) : il est seul, il dit la dévastation de sa famille, sa souffrance, son chagrin. Il demande justice.

Entre les deux, au proscenium, une jeune femme, Cécile, (Flora Brunier), bénévole à la prison, elle y enseigne. Elle a été « émue » par Alex, enfermé dans ses refus, sa révolte suicidaire. 

Maintenant, elle l’aime, et se demande s’il est « récupérable ». Elle sait que « ce n’est pas à la prison qu’on soigne », mais elle voudrait savoir s’il est « foutu », ou s’il n’est qu’un « accidenté ». Pourquoi, comment, a-t-il « franchi la ligne » ?

Nadia Xerri-L. l’auteur, a été bouleversée par un fait divers, et par l’attitude de l’accusé pendant les audiences : un assassin, sans doute, mais pas un Zucco. Alex ne reconnaît pas son crime, il n’avouera jamais. L’arme du crime n’a pas été retrouvée. Le doute s’installe. Pourtant, la nuit où Remi a été saigné à mort, il était le seul à en avoir un. Qui a frappé Rémi, la nuit du coup de couteau ? Quel rôle a joué Hélène, l’allumeuse, dans ce milieu qui n’était pas le sien ?

La mise en scène de l’auteur recrée une cour d’assises, avec un espace décliné en niveaux différents. L’accusé est debout sur la plus haute estrade, on n’ose pas dire l’échafaud, d’où partent deux « promenoirs » qui vont s’éclairer de rouge. De cette plate-forme, descendent symétriquement deux escaliers qui mènent au niveau des témoins, assis sur une banquette qui referme le tribunal d’une longue ligne sombre. Tout est noir. Seuls, les « promenoirs » vont s’éclairer du rouge des Assises. Quant aux  personnages, le rare blanc qui éclaire leur costume vient du T-shirt ou de la chemise. Hélène porte un haut de satin rose provocateur.

Rien de réaliste dans ce tribunal, et pourtant, tout est conforme à l’angoisse qui en sourd. Pas de réalisme temporel non plus. Tout ce qui se dit ici est comprimé dans les trois minutes qui précèdent l’entrée de la Cour.

Chacun revit la soirée tragique, commencée dans l’allégresse d’un anniversaire, dans la joie du karaoké, des chansons d’Étienne Daho, de Dalida et de Johnny. Les acteurs habitent avec passion et rigueur un texte impressionnant.

Couteau de nuit parle avec talent de notre société de ses errances, de ses victimes, de ses désarrois. Ne manquez pas les représentations.

 

 

 

 

Couteau de nuit  de Nadia Xerri-L

Jusqu’au 22 novembre

au Théâtre de la Ville/théâtre des Abbesses

01 48 87 54 42

ensuite en tournée :

1er-5 décembre au Théâtre universitaire de Nantes

11, 18 décembre à Montluçon

1301/09 à Châtenay-Malabry

29-31 janvier à Aix-en-Provence

4-6 février Évry

10-12 février Brétigny

17-21 mars Comédie de Saint-Étienne

25-27 mars le Volcan au Havre

17:59 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, justice, xerri-l |  Facebook | |  Imprimer

05/11/2008

Le retour de Koltès

 Le théâtre de Koltès est devenu international. Le Retour au désert, récemment entré au répertoire de la Comédie-Française*, nous revient aujourd’hui du Brésil. Catherine Marnas, l’a mis en scène à São Paolo en juillet dernier. La troupe est entièrement bilingue, chaque comédien brésilien ayant son double qui parle portugais.

C'est superbement cruel...

Mathilde, vêtue de rouge débarque, suivie de son double, même robe mais en gris sombre. « Maudite Mathilde » disait la chanson de Brel qui sonne ici comme un hymne. Mathilde ressemble  à  la maison familiale où elle retrouve Adrien son frère. La maison Serpenoise est un bloc couleur de muraille à l’extérieur, rouge sang à l’intérieur (scénographie de Carlos Calvo). Elle se fracture pour ouvrir sur la chambre de Mathilde, elle ouvre des couloirs pour isoler les êtres, elle se clôt sur des complots racistes, elle s’hérisse en forteresse pour abriter les secrets honteux. Les inimitiés familiales s’y sont mijotées pendant plus de vingt ans, attisées par l’hypocrisie d’une société provinciale où chacun guette les tares des autres, et où les conflits coloniaux rouvrent les cicatrices mal fermées de l’épuration. Entre le frère et la sœur, c’est la guerre…

La haine guide les personnages. Le théâtre de Koltès est frère du théâtre « désagréable » de Nelson Rodrigès. C’est à cette parenté qu’on reconnaît les auteurs universels.

Sous la direction de Catherine Marnas,  une formidable troupe, (André Auke, Eliete Cigarini, Julien Duval, Aline Filocom, Franck manzoni, Gisella Millas, Maud Narboni, Olivier Pauls, Rita  Pisano, Ricardo Romao, Davi Rosa, Bébédicte Simon, Gustavo Trestini) investit l’espace comme un champ de bataille. Pas de quartiers, chacun y laissera ou sa vie, ou son âme. Et le spectateur n’en sort pas indemne…

Courez-y, ils ne sont là que jusqu'à samedi...

 

 

 *Voir notre note de février 2007.

 

 

Théâtre de la Ville

Du 4 au 8 novembre

01.42 74 22 77

17:30 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, koltès, mornas, brésil |  Facebook | |  Imprimer