26/01/2009
Pour une nuit ou pour la vie ?
Au théâtre, vous le savez, « tous les genres sont bons sauf le genre ennuyeux. » Pour ceux que les drames sanglants rebutent, et qui souhaitent se distraire en rencontrant des personnages à qui ils ressemblent ou à qui leurs ami(e)s ressemblent, "y’a c’qui faut en magasin"…
J’me sens pas belle fut d’abord un de ces films sur lesquels les distributeurs ne misent pas et qui font un succès populaire. Le réalisateur, auteur du scénario, Bernard Jeanjean l’avait écrit avec « sa muse » : Martine Fontaine. Comme les protagonistes sont deux, il était aisé de le transposer pour la scène, dans un lieu unique.
C’est fait. La mise en scène est signée Jade Duviquet, et Yvon Martin (Paul) donne la réplique à la muse, Fanny (Martine Fontaine). C’est l’histoire d’un amour naissant qui balbutie un peu, quand on ne sait pas si ce sera du genre « brève rencontre », ou « grande aventure », pour une nuit ou pour la vie.
Fanny n’est pas sûre d’elle, elle ment. Paul ne comprend pas quel jeu elle joue.
Le décor réaliste de Dorota Kleszcz. ne cache aucune des trivialités quotidiennes. Et pourtant, ils nous attendrissent avec leurs petites cachotteries, leurs petits artifices et leurs gros chagrins.
Ils se dévoilent peu à peu. L’un danse, l’autre écrit de très jolies chansons. Et le spectacle est charmant.
Alors, on leur souhaite d’être heureux longtemps et d’avoir beaucoup de spectateurs…
J’me sens pas belle
de Bernard Jeanjean
Manufacture des Abbesses
01 42 33 42 03
Du jeudi au samedi à 21 h, dimanche à 17 h
photos : François Vila
17:55 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre | Facebook | | Imprimer
Une famille impossible
Cécilie (Isabelle Carré) est infirmière dans le service du docteur Henrik (Éric Berger) à l’hôpital. Elle est aussi sa maîtresse. Le docteur Henrik est marié et Cécilie pleure de solitude le soir.
Sylvia (Hélène Viaux) est aussi célibataire, mais elle a un enfant de huit ans, Jim (Micha Lescot) qu’elle amène à la consultation. Elle a aussi un père abusif (Jean-Yves Chatelais). Mais pourquoi prétend-elle qu’il est décédé ? Le temps de prévenir le service de protection de l’enfance, d’apprendre qu’Henrik est le suborneur de Sylvia, et le grand-père casse la figure du médecin, puis tout se déglingue dans le blanc service hospitalier.
Ce pourrait être un vaudeville, et c’est un drame sanglant. Le décor de Patrick Dutertre est ravagé, l’infirmière transpercée d’un coup de couteau, le grand-père assassiné, la mère poignardée. Jim a exterminé sa famille et encourage tous les enfants à agir de même.
La faute à qui ? Au « sale gosse », « un garçon impossible », mal aimé, trop vite grandi, qui juge les adultes coupables de son mal être. Qui est le véritable monstre, Jim ou le grand-père ? Et Henrik, n’est-il pas aussi responsable ? Et si c'était la famille, qui était « impossible », ?
L’audace d'Un garçon impossible la pièce de Petter R. Rosenlud* est de revendiquer « l’étoffe de nos cauchemars » comme le tissu existentiel de ses personnages. Jean-Michel Ribes en montre l’humour noir, en donnant aux comédiens un rythme soutenu. La violence jaillit de la sarabande des personnages, véritables marionnettes animées par des mœurs hypocrites. Les comédiens sont tous excellents.
Jean-Michel Ribes, renommé pour son génie comique, prouve qu’il maîtrise aussi le sens du tragique.
Un garçon impossible de Petter S. Rosenlud,
texte français de Terje Sinding
Théâtre du Rond-Point
01 44 95 98 21
* première création en France, en novembre 2006, à l’Étoile du Nord, par Richard Leteurtre
11:14 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : théâtre, ribes, rosenlud | Facebook | | Imprimer
Résister
Il faut une sacrée dose d’humour pour faire rire de son pays miné par le chômage, les interdits religieux, la corruption. Dans Tous les Algériens sont des mécaniciens ce n’est plus seulement Fellag, qui rit des misères quotidiennes. Il s’est donné une partenaire, Shéhérazade (Marianne Épin), femme algérienne entre toutes les femmes, qui se débrouille, comme lui, pour survivre quotidiennement dans un pays, où l’eau courante est rationnée, le travail rare, les objets manufacturés introuvables.
Quand « le neuf n’existe pas », les plus ingénieux bricolent des pièces « provisoires » qui peuvent durer « trois ans ». Leurs histoires sont celles de tout un peuple qui pour résister, reconstruit une « fraternité originelle » autour… des voitures à réparer. Chacun se montre inventif et compétent. D’ailleurs, lui ne reconnaît le parent ou le voisin dont on lui parle que lorsque Shéhérazade lui dit « à quelle voiture il appartient ».
Trois rangées de draps accrochés construisent le décor. Le soleil les baigne. Le couple loge dans « un bidonville trois étoiles », et leur entente les a préservés des méchants. Il n’exprime nulle acrimonie contre les Français restés « centre trente-deux ans » en Algérie et qui n’ont « même pas appris à dire au revoir ». Il considère maintenant les Chinois, « peuple discipliné, docile », en « étrangers étranges ». Et Prévert n’est pas loin… Fellag et Marianne Épin, époustouflants de naturel, conversent ensemble et avec le public. La salle rit par houles généreuses.
Le spectacle s’émaille d’anecdotes, de réflexions politiques, historiques et même philosophiques.
Leurs rêves s’effondrent, la vie ne les a pas gâtés, mais il reste la vie. Et, tel Zorba le Grec, Fellag danse sur les décombres…
Fellag
Jusqu’au 28 février
Théâtre du Rond-Point, 18 h 30
01 44 95 98 21
10:25 Écrit par Dadumas dans humour, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, humour, fellag | Facebook | | Imprimer