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28/02/2007

Au nom de la République

 

Le théâtre était à  l’honneur aujourd’hui rue de Valois. Ou plutôt, les hommes de théâtre auxquels M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture, remettait l’ordre des Arts et Lettres : Bernard Sobel, promu commandeur,  Jean-Paul Alègre nommé chevalier.

Bernard Sobel, fondateur du Théâtre de Gennevilliers a été pendant plus de quarante ans l’âme de cette banlieue populaire où il créa des spectacles exemplaires.

Il ne s’agissait pas selon lui de donner du sens à la vie, mais de montrer que même si la vie n’a pas de sens, le théâtre lui donne de la valeur.

Quant à Jean-Paul Alègre, il osa le paradoxe de juger le théâtre « inutile et indispensable ».

C’est pour ces raisons, que je blogue, voyez-vous.

Et que je félicite ceux qui viennent d'être ainsi distingués par la République.

15:50 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

22/02/2007

Les Brigands sont de retour

 

Ces brigands-là, on les adore, ils vous mettent la joie au cœur et aux lèvres, et une représentation de leur compagnie vous laisse heureux au présent et confiants dans l’avenir. On les avait découverts avec Docteur Ox, suivis avec Ta bouche et Toi c’est moi. Cette année ils ont choisi un opéra bouffe de Jacques Offenbach dont le titre rejoint l’intitulé de leur troupe : Les Brigands.

L’œuvre est écrite pour plus de trente interprètes, ils ne sont que quinze, qui dialoguent avec une quinzaine de musiciens, Thibault Perrine a donc élagué pour adapter, et le résultat donne ainsi plus de force à cette satire qui date de 1869 et se lit comme la joyeuse parodie d’un empire chahuté par des scandales financiers.

Le livret de Meilhac et Halévy tricote une intrigue amoureuse à gros points, se souvenant de Corneille : « Jeune présomptueux ! », « As-tu du cœur ? », et de L’Ecclésiaste : « S’il est un temps pour la parole, il en est un pour la prudence ». La fille du brigand Falsacappa est amoureuse d’un jeune paysan qui s’enrôle dans la bande de son père. Mais « le sentier de la vertu » emprunte quelquefois des détours inattendus, et elle sauve un jeune aristocrate qui se révèle être le prince de Mantoue, lequel doit épouser la princesse de Grenade afin de régler les dettes de son royaume : trois millions, que Falsacappa espère bien encaisser pour son compte puisque « Il faut voler selon la position qu’on occupe ». Travestissements des bandits, corruption des puissants, inconstance des amoureux, et morgue des Espagnols, les ingrédients étaient déjà dans La Périchole, et la recette est toujours goûteuse.

La musique assaisonne les mets d’une sapidité piquante. Benjamin Lévy, Prix de la révélation musicale 2005, conduit l’orchestre avec une allégresse qu’il communique à tous. Loïc Boissier et Stéphane Vallé mettent gaillardement en scène, dans une scénographie à transformations signée Florence Évrard. Élisabeth de Sauverzac a habillé de costumes disparates non seulement les bandits mais également les musiciens. Quant aux nobles espagnols, tout droit sortis d’un tableau de Vélasquez revu par le Gérard Oury de La Folie des grandeurs, le noir brodé d’argent leur sied à merveille. Tous sont gentiment extravagants.

Et les voix peuvent vocaliser, les chœurs tonitruer ou chanter en sourdine, piano,  pianissimo, le public est conquis. Comment résister aux voix charmeuses d’Emmanuelle Goizé en Chérubin séducteur ? À celles de Marie-Bénédicte Souquet, Charlotte Plasse, Camille Slosse, Ainhoa Zuazua Rubira, Jeanne-Marie Lévy, toutes enchanteresses ? Jean-Philippe Catusse, Gilles Favreau, Ronan Nédélec barytonnent chaudement, Mathieu Cabanès, Christophe Crapez, David Ghilardi, Olivier Hernandez, sont des ténors troublants, et Christophe Grapperon, Matthieu Heim, Jacques Gomez sont des basses qui font palpiter les sens.

Ces Brigands sont de bonne compagnie, et leur succès, ils ne l’ont pas volé !

Les Brigands de Jacques Offenbach Athénée

jusqu’au 4 mars 01 53 05 19 19

et en tournée en France (Lannion, Chelles, Narbonne, Marseille, Arras, Beauvais, Niort, Nîmes, Saint-Louis) et en Suisse

20:40 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

20/02/2007

Le désert est dans les coeurs

 

La propriété est ceinte de hauts murs. Les portes qui la ferment sont étroites et la famille Serpenoise les garde bien closes afin que ses secrets ne s’échappent pas. Quinze ans auparavant, Mathilde (Martine Chevalier), la fille rebelle et déshonorée, avait fui. Aujourd’hui, elle a quitté l’Algérie en guerre pour revenir chez elle, avec ses deux enfants, Édouard (Thomas Blanchard) et Fatima (Julie Sicard), bien décidée à récupérer sa maison, régler ses comptes avec son frère Adrien (Bruno Raffaelli) et les notables de la ville, ses ennemis. Adrien pense qu’elle revient dans cette demeure pour « la sécurité », mais elle le détrompe d’entrée : « Je viens ici apporter la guerre »

Adrien pontifie entre un fils attardé, Mathieu (Grégory Gadebois) et sa seconde femme Marthe (Catherine Hiegel) qui a l’éthylisme mystique. La gouvernante, Madame Queuleu (Catherine Ferran) voudrait bien réconcilier la sœur rancunière et le frère perfide, « plus de chamailleries », dit-elle, mais en vain. Ces deux-là ne se cherchent que pour s’insulter, et s’opposer. Et autour d’eux, rien n’incite à l’apaisement. Trop de mystères inexplicables entourent cette fratrie antagoniste. De qui sont les enfants de Mathilde ? Comment Marie (Catherine Sauval), la première femme d’Adrien est-elle morte ? Pourquoi Plantières (Michel Vuillermoz) a-t-il désigné Mathilde à la vindicte populaire ? Quel complot les amis d’Adrien, Sablon (Pierre-Louis Calixte), Borny (Alain Lenglet) et Plantières fomentent-ils dans cette petite ville de garnison ?

Il se passe « des choses étranges dans cette maison », Mathilde déchaîne les querelles, Fatima s’attarde dans le jardin où le fantôme de Marie apparaît, Mathieu et Édouard franchissent le mur pour découvrir la ville avec Aziz (Michel Favory), tandis qu’un grand parachutiste noir (Bakary Sangaré) admoneste Adrien au nom de la Patrie : « Nous en sommes le cœur et les poumons, vous les bourgeois, vous en êtes les intestins », avant de réclamer « les femmes ». Le crime rôde. La haine assèche ces cœurs stériles. Adrien et Mathilde n’écoutent personne et pensent que « la vraie tares de (leurs) vie, ce sont (leurs) enfants ». Des gifles pour Mathieu, pas un regard pour les nouveau-nés de Fatima, pas un mot de regret pour Aziz tué dans un attentat : le désert est dans les cœurs.

Bernard-Marie Koltès avait écrit une comédie noire, et Muriel Mayette la traite avec une virtuosité  exceptionnelle. Elle révèle le côté farcesque et tragique des protagonistes, enfants shakespeariens au centre d’un drame qu’ils ont provoqué et qui les dépasse. Derrière le mur qui cache l’horizon, l’arbre mort d’En attendant Godot, dresse son squelette grisâtre, pour mieux accrocher l’apparition d’une Marie en robe et auréole saint-sulpiciennes (scénographie et lumières d’Yves Bernard). Les amis séditieux d’Adrien ressemblent aux Pieds Nickelés : Croquignol, Filochard et Ribouldingue de province dont les petites turpitudes confortent les grandes fortunes, pantins qui soutiennent des sociétés closes et corrompues. Les acteurs sont tous excellents, leurs propos sont soulignés par une musique qui ricane (Michel Portal) sur des dysharmonies goguenardes.

Retour au désert entre brillamment au répertoire et les ombres de Jean-Luc Boutté, de Richard Fontana, d’Antoine Vitez et de Jacques Toja qui ont tant aimé Koltès et cette maison, doivent se réjouir de cet honneur.

Retour au désert de Bernard-Marie Koltès

Comédie-Française Salle Richelieu

en alternance 0825 10 16 80
www.comedie-francaise.fr

11:30 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer