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06/04/2015

Un surprenant malade

 

 

théâtre,théâtre de l'atelier,daniel pennac,humour,olivier saladinIl est toujours délicat d’adapter pour la scène, une œuvre qui a été conçue pour la lecture. Ancien malade des hôpitaux de Paris est d’abord un court roman de Daniel Pennac où le docteur Galvan, urgentiste de garde, vit une nuit d’apocalypse.

Un patient qui « ne se sent pas très bien », présente les uns après les autres, tous les symptômes de maladies mortelles. Le Docteur Galvan le trimballe à toute allure dans tous les services, avant de… Mais gardons-nous de dévoiler la fin.

Combien de personnages ? Une trentaine dans le roman. Combien de comédiens sur scène ? Un seul, Olivier Saladin, véritable génie comique.

Il est tour à tour le Dr Galvan et sa compagne, tous les pontes de la chirurgie qui épient et commentent son diagnostic et ses capacités, l’infirmière de garde et le brancardier, l’anesthésiste et le patient, sans compter les malades de la salle d’attente où « ça sentait la douleur humaine » et la médecin légiste de la morgue.théâtre,théâtre de l'atelier,daniel pennac,humour,olivier saladin

Il prend des accents différents, des phrasés distinctifs, des gestes particuliers pour incarner tous ces gens.

Il est extraordinaire.

La mise en scène de Benjamin Guillard est sobre et pleine de surprises.  Le texte de Daniel Pennac aussi. Et les spectateurs sont tout aussi médusés que les médecins mais s’amusent beaucoup plus !

 

 

 

Photo : © Emmanuel Noblet

 

Ancien malade des hôpitaux de Paris de Daniel Pennac

Théâtre de l’Atelier

 01 46 06 49 24

depuis le 21 mars 2015


du mardi au samedi à 21h - Dimanche à 15h (Relâches exceptionnelles les 12 et 13 mai)

 

 

 

 

Un coeur tendre

 

 

Théâtre, Horovitz, Marcel Maréchal, théâtre Petit-HébertotIsraël Horovitz est un auteur américain chéri des Français. Une nouvelle version de Park your car in Harvad Yard, traduite sous le titre Opus cœur par Attica Guedj et Stephan Meldegg, se donne depuis quelques semaines au Petit-Hébertot.

On retrouve avec émotion Marcel Maréchal dans le personnage de Jacob Brakisch, vieux prof à la retraite, au caractère rugueux, qu’une jeune aide ménagère, Kathleen Hogan (Nathalie Newman) va apprivoiser.

Il est grincheux, elle est sensible. Il est injuste, elle est révoltée. Il n’aime que la musique classique et la littérature, elle préfère les chansonnettes. Tout les sépare, mais un lourd secret les réunit. Elle a vécu une enfance triste, et démunie et « c’est la première fois qu’elle a une chambre » à elle.  Elle est veuve et sans ressource. Il a toujours été farouchement célibataire. Il est maintenant sans ami, sans amour. Ses élèves seraient-ils ingrats ? Lui-même serait-il dénué de tout sentiment ?

C'est en réalité un coeur tendre et malheureux.

Caroline Darnay dirige ce duel avec une belle maîtrise dans une scénographie de Caroline Mexme. Les lumières de Michel Cabrera ponctuent les séquences et le son de Michel Winogradoff rythme les affrontements verbaux des deux caractères bien trempés. Leur histoire baignée d'humour ravit les spectateurs.

Ceux qui ont besoin du « lait de l’humaine tendresse » trouveront dans Opus cœur   cette émotion teintée d’’humour qu’Israël Horovitz sait parfaitement manier.

 

 

Opus Cœur  d’Israël Horovitz

Texte français d’Attica Guedj et Stephan Meldegg

Théâtre du Petit-Hébertot

01 42 93 13 04

Du mercredi au samedi à 21 h

Dimanche, 15 h

 

 

14/03/2015

Les libertins à Auteuil

 

 théâtre,jean-marie besset,molière,baronEn 2002, dans Baron, Jean-Marie Besset, comparait le penchant de Jean pour Michel à la relation de Molière avec Baron. Aujourd’hui, il y revient, et ressuscite, dans Le Banquet d’Auteuil, ce XVIIe siècle libertin, dont les grandes figures, homosexuelles ou bisexuelles, composèrent tant d’œuvres immortelles.

Qui était Baron (Félix Beaupérin) ? Un enfant de la balle. Ses père et mère étaient comédiens. En 1662, il devient orphelin et il entre, en 1665 dans la troupe « des petits comédiens de M. le Dauphin ».Il a douze ans. On dit que Molière (Jean-Baptiste Marcenac) le remarque en 1666 et l’engage, avec l’autorisation du roi. L’enfant a du talent et toutes les audaces. Armande est jalouse. Baron s’enfuit. Mais en 1670, une lettre de Louis XIV lui ordonne d’intégrer la troupe de Molière. Le maître le loge chez lui à Auteuil.

Et c’est là que Jean-Marie Besset situe l’action. L’écrivain Chapelle (Hervé Lassïnce), ami de Molière, a réuni « des illustres convives », ceux que les mêmes goûts assemblent :Lully (Frédéric Quiring) et son ami Osman (Suentin Moriot), Jonsac (Roman Girelli) et Nantouillet (Grégory Cartelier), Dassoucy (Dominique Ratonnat), écrivain et musicien, et son page un peu hérétique, Pierrotin (Antoine Baillet-Devallez).théâtre,jean-marie besset,molière,baron

Que des hommes ? Eh bien, l’heure des révélations a sonné… 

Oh ! Bien sûr, certains seront déçus d’apprendre que Rostand, dans son Cyrano de Bergerac, avait édulcoré les choses. « Une robe a passé dans ma vie », lui faisait-il dire à Roxane. Cette robe fut plutôt un rhingrave puisque les chroniques de l’époque attestent que Cyrano (Alain Marcel) eut une liaison fort orageuse avec Dassoucy (Dominique Ratonnat).

Mais, direz-vous, Cyrano, est « depuis quinze ans […] chez les morts ».

C’est son ombre, de noir vêtue, qui préside aux agapes. Fantôme très concret puisqu’il va donner à Baron un exemplaire de son Pédant joué qui inspira Les Fourberies de Scapin. Molière transforme les personnages, la situation mais garde le « Qu’allait-il faire dans cette galère ? » Et parce qu’ « on riait », le Cyrano de Rostand disait à Ragueneau : « Il a bien fait !… »

Jean-Marie Besset aussi a « bien fait » de montrer, comment naît la création, et comment à partir du même thème, un auteur peut transcender un autre. Faut-il considérer que Le Banquet d’Auteuil inscrit Molière au cercle des homosexuels ?  théâtre,jean-marie besset,molière,baronCe serait dommage de n’y voir que cette dimension. « Mon Dieu !  Quelle désolation pour un être humain que d'être sexué. » disait Marina Tsvetaieva. Or, le sentiment intense qui unit le maître et son œuvre, le maître et son disciple, est en vérité une forme narcissique de l’amour. Il est indéniable que Molière a « fait » Baron et qu’il entretient avec lui ce que nous appelons le « complexe de Pygmalion ».

Ont-ils consommé ? À vrai dire, on s’en fout… On pourrait parodier Rostand pour écrire  Molière a du génie et Baron un beau cul", mais ne faut-il pas mieux écrire : « Molière a du génie et Baron du talent. » théâtre,jean-marie besset,molière,baronSi on veut s’attarder à l’aspect historique, il reste cependant une énigme. Pourquoi Baron quitte-t-il la scène en 1692, à trente-neuf ans et pourquoi y revient-il à soixante-sept ans ?

Jean-Baptiste Marcenac et Félix Beaupérin font résonner le verbe magnifique de Jean-Marie Besset. On y entend des alexandrins qui rythment sa prose. On y retrouve aussi l’écho du fantastique poétique de Cocteau.

Régis de Martrin-Donos met en scène la « folle nuit » à laquelle Molière, fatigué, ne participe que pour dissuader ses amis de rejoindre Cyrano dans le royaume des morts. Des changements à vue, conduits par les comédiens, soutenus par la musique de Jean-Pierre Stora, modifient l’espace et le temps avec fluidité. La lumière de Pierre Peyronnet accentue les changements de tempo. Et le public, comme on disait au Grand Siècle, est sensible au « charme » des dix comédiens.

 

Photos : © LOT 

 

Le Banquet d’Auteuil de Jean-Marie Besset

Théâtre 14

Jusqu’au 25 avril

01 45 45 49 77

mardi, vendredi, samedi, à 20 h 30

mercredi et jeudi, 19 h

samedi,  16 h