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13/10/2016

Drôle de chameau !

 

 

 

 

Théâtre, théâtre de l'Atelier, Murielle Magellan« Au théâtre, la scène est le lieu des conflits » répétait Anne Ubersfeld dans ses cours sur la dramaturgie. L’Éveil du chameau de Murielle Magellan en est une brillante démonstration puisque la pièce met face à face deux êtres que tout oppose.

Lui, Mickaël (Pascal Elbé), mâle jouisseur et cyniquement prédateur, a toujours refusé la responsabilité de la paternité, et au nom de ce seul principe ne s’est jamais occupé de son fils, Simon. Alors, quand Maryse (Barbara Schulz), bardée de principes, petite bourgeoise un peu guindée, débarque, il ne veut rien entendre des raisons qui la conduisent à réclamer son intervention. Que son fils Simon ait abandonné Claire, la fille de Maryse, peu lui importe ! Que Claire attende un enfant de Simon, ce n’est pas son affaire ! Et que Maryse le traite de « chameau », quand il attendait plutôt le mot « salaud », il s’en moque !

Et ce ne sont pas les conseils ou le remarques de son assistante (Valérie Decobert) qui vont changer son attitude.Théâtre, théâtre de l'Atelier, Murielle Magellan

Mais Maryse est déterminée, et tenace, du genre à rentrer par la fenêtre quand on la met à la porte, alors peu à peu, le drôle de chameau s’apprivoise… Mais Mickaël est séduisant, et Maryse découvre la puissance du désir… Ses sens s’éveillent chez elle, tandis que chez lui, ce sont les sentiments…

Nous n’en dirons pas plus…

Tout paraît sage dans la mise en scène d’Anouche Setbon, dans le décor et les costumes d’Orua Puppo, mais les lumières de Patrick Clitus, la musique de Michel Winogradoff, soulignent les étapes des personnages.

Barbara Schulz froide Maryse, mère douloureuse et appliquée devient sensuelle, Pascal Elbé hautain et railleur sent vibrer la compassion paternelle, Valérie Decobert, souriante et soumise se révolte.

Chaque réplique aiguise l’épée de l’autre, et il faut voir ce duel passionnel.

 

 

Photo : © Chantal Depagne Palazon

 

 

L’ Éveil du chameau de Murielle Magellan

Théâtre de l’Atelier

Du mardi au samedi à 19 h

Samedi à 16 h 30

Tel : 01 46 06 49 24

 

Le texte est édité dans une nouvelle collection "les quinquets de Dacres" aux éditions Dacres

 

 

28/09/2016

Le jeu du désamour

 

 

théâtre,théâtre de l'atelier,simenon,didier long,myriam boyer,jean benguiguiCes deux-là n’auraient jamais dû se rencontrer. Elle, Marguerite (Myriam Boyer) petite-fille de bourgeois chef d’entreprise, et lui, Émile (Jean Benguigui), vrai prolo. Mais ils vivent dans le même quartier d’une banlieue où les prometteurs immobiliers démolissent les pavillons et les usines désaffectées. Elle est veuve, lui aussi. Ils avaient cru qu’ « unir leurs solitudes » suffirait à recréer un couple. Celui du Chat dans le roman de Georges Simenon est terrifiant de détestation. Pour la première fois au théâtre, l’adaptation du roman, signée Christian Lyon et Blandine Stintzy restitue l’atmosphère sombre du roman.

Elle aime la grande musique, lui préfère guincher dans les guinguettes. Elle a un perroquet, Coco, parce que « ça lui fait quelqu’un à qui parler ». Il a reporté toute son affection sur le chat qu’il a recueilli, et nommé Joseph. Elle est bigote et trouve choquant de donner un nom de saint à un animal. Femme de principes et homme intègre, ils ont vécu jusqu’alors des petites vies résignées et remué des pensées mesquines. Ils ne vont pas réussir à s’apprivoiser. Car, comme toujours chez Simenon, les protagonistes, contraints par leur position sociale, ont un passé qui brise tout élan vers l’autre. Quand le chat meurt, les couteaux sont tirés, les hostilités commencent.

Nous ne saurons jamais qui a tué le chat Joseph, mais peu à peu, par des retours en arrière, des bonds au présent, nous apprendrons tout du désert affectif de Marguerite et d’Émile.théâtre,théâtre de l'atelier,simenon,didier long,myriam boyer,jean benguigui

La mise en scène de Didier Long présente remarquablement les trois temps de ce jeu du désamour. Dans les lumières de Philippe Sazerat, le décor Jean-Michel Adam installe à jardin, la cuisine de formica, modeste et propre, à cour le salon, simple et confortable. Au centre de la scène un panneau tournant montre le temps de la rencontre et de l’espoir, avec l’image colorée et chaude d’une petite rue provinciale pavée, bordée de charmantes maisonnettes. Puis vient le temps des malentendus, avec les pavillons murés et le ciel gris rayé par le bras d’une grue menaçante. Enfin, apparaît le temps de la malveillance et des antagonismes, avec l’amas de gravats et de moellons, les grues, et une bande sonore insidieuse qui use les nerfs et empêche toute communication. La musique de François Peyrony souligne les sentiments des deux personnages. Il est odieux. Elle devient abominable. Ils se haïssent et chacun sait que « la haine est l’hiver du cœur »[1].

Myriam Boyer interprète une Marguerite revêche, guindée, mais attendrissante par instants, murée à jamais dans une posture d’enfant, bouleversante dans sa confession : « mon cœur n’a pas grandi, il s’est recroquevillé. » Jean Benguigui compose un balourd impressionnant qui voudrait bien faire et n’en peut mais.

La direction d’acteurs de Didier Long les rend poignants tous les deux. Nous ne pourrons pas donner raison à l’un ou l’autre, car c’est cet étrange duo qui nous émeut et qu’il faut voir. Nous en serons peut-être plus indulgents envers ceux que la vie a malmenés.

 

 

 

 

Le Chat d’après l’œuvre de Georges Simenon

Adaptation de Christian Lyon et Blandine Stintzy

Mise en scène de Didier Long

Théâtre de l’Atelier

01 46 06 49 24

Du mardi au samedi 21 h

Dimanche à 15 h

 

 

[1] -Victor Hugo. Les Contemplations, « Il fait froid ».

13/03/2016

Richard Bohringer, le retour

théâtre,rochard bohringer,théâtre de l'atelierRichard Bohringer est de retour.

Seul en scène. Œil pétillant, sourire aux lèvres. Il nous raconte des bouts de sa vie, écrits dans les attentes, rejoués dans les espoirs, imaginés dans les craintes.

Car, pour lui, depuis longtemps, « L’écriture est la seule vérité. Être vertical. Jeter les germes de l’amer. Trouver le son qui fera rebondir. L’inspiration court comme un nuage. Vite et sans remords. Le désespoir d’écrire devient cristal. Écrire.

Dieu païen, aide ton serviteur. Donne-moi l’oiseau bariolé. Celui qui aide à souffler la page blanche. »

Il dit sa « révolte », son présent, et un peu son espérance.théâtre,rochard bohringer,théâtre de l'atelier

Il se confesse : « Je suis pas un gars de la syntaxe. Je suis de la syncope. Du bouleversement ultime. Je me fous du verbe et de son complément. »

Il évoque ses copains, embarqués dans « l’aéronef céleste », et conseille : « Faut pas faire le malin avec les mots. Faut les aimer. Ça file du bonheur les mots. »

Les siens, nous filent un sacré coup de tendresse.

 

Photo : © Alain Rousseau 

Traîne pas trop sous la pluie de et par Richard Bohringer

Théâtre de l’Atelier,

Du mardi au samedi à 19 h

01 46 06 49 24

Pour trente représentations

depuis le 8 mars