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17/10/2011

Humeur

 

 

 

Je reçois un dossier de presse. J’en reçois tous les jours. Mais celui-là m’interpelle.

Il émane du « Monfort-Théâtre ».

- Tiens, me dis-je, encore un nouveau lieu ! Diantre ! (Comme on dit chez Molière), « l’avignonisation » de Paris continue, - comme dirait mon ami Victor (Haïm).

J’ouvre l’enveloppe.

Je cherche l’adresse. « 106, rue Brancion » !

Nom de…***

C’était le Théâtre Silvia Monfort !

Pourquoi l’a-t-on ainsi castré de son prénom ?

Imagine-t-on le collège Moulin, au lieu de Jean Moulin ? Ce n’est pas du tout la même farine !

Le lycée Renoir, c’est le peintre ? Le cinéaste ? Le comédien ?

Et avec l’hôpital Debré, je m’interroge ? Le ministre ? Le peintre ? Le médecin ? Et lequel ?

Il y a des prénoms indissociables de leur patronyme.

Silvia Monfort, grande dame de la Résistance, avait gardé le nom qu’elle portait dans la clandestinité, pour l’illustrer au firmament du Théâtre. On l’aimait ainsi, tout entière…

Qui, dans un an, dans dix ans se souviendra de ce qu’elle représenta pour les auteurs, les comédiens, ses amis du Théâtre et des Lettres, ses compagnons de lutte, et même la ville de Paris ?

Que veut-on nous faire oublier ?

 

 

 

 

*** Suivant votre religion, vous choisissez le blasphème qui vous convient…

 

02/10/2011

Réécritures


 

La contrée de l’enfance est souvent, pour un auteur une inspiration rémanente, Marguerite Duras y a largement puisé son inspiration. Elle a aussi souvent repris ses récits, pour en modifier, la forme, le point de vue, la portée. Et ses réécritures successives, en approfondissant les personnages, détaillant les événements, ont aussi quelquefois changé de genres. Ainsi, ce conte, Ah ! Ernesto, des années 70, devint-il, un film, Enfants, en 1984, puis fut publié en roman La Pluie d’été en1990, avant de passer à la scène en 1993.

La version qu’en donne aujourd’hui Emmanuel Daumas rend limpide un texte dense qui ne craint ni les analyses psychologiques ni les études sociologiques. La Pluie d’été raconte la vie d’une famille de marginaux à la fin des années cinquante, à Vitry, quand la banlieue se transforme.

Les immigrés, la Mère slave (Claude Mathieu),  Emilio le Père (Christian Gonon) italien, vont quitter leur logement précaire dont le toit laisse passer la « pluie d’été » pour de solides HLM. C’est aussi le monde de l’enfance qu’il faudra quitter pour Ernesto (Jérémy Lopez), et Jeanne (Adeline d’Hermy). Pas tellement « vert paradis », cet univers-là, pour Duras, mais plutôt « noir enfer des terreurs enfantines », puisqu’ils redoutent d’être « abandonnés » par des parents dépassés par leur progéniture et les difficultés de la vie de prolo. Leur âge est incertain. « Entre douze et vingt ans » pour Ernesto, « entre onze et dix-sept » pour Jeanne. Les prénoms fluctuent, et les cinq autres frères et sœurs sont désignés par les termes « brothers et sisters ». Les parents vivent des « allocations », lisent des livres trouvés, vivent dans un bric-à-brac récupéré de gazinières, lavabos, tables,  tuyaux, seaux, chaises. Ils ne se plaignent pas, et s’aiment tant, que l’inceste ne semble pas les culpabiliser.

Dans cette curieuse famille, les enfants ne sont pas scolarisés. Et quand on s’aperçoit qu’Ernesto a appris à lire tout seul, qu’on l’envoie à l’école, il y restera à peine une journée, car, dit-il : « on y apprend des choses qu’on ne sait pas. »

Il s’aperçoit vite que « le monde est loupé », avant de se lancer à la poursuite du vent. Deux personnages témoins complètent le récit : l’Instituteur (Éric Génovèse) émerveillé des possibilités de l’enfant, et une Journaliste (Marie-Sophie Ferdane), qui n’en croit ni ses yeux, ni ses oreilles.

Les comédiens alternent, récits et dialogues dans un enchaînement cadencé. Une chanson de Souchon « Allo, Maman, bobo ! », dit avec humour les blessures. Puis la subtile À la claire fontaine rappelle les rêves enfantins. La jeune pensionnaire, Adeline d’Hermy, est rayonnante, Jérémy Lopez surprenant, Marie-Sophie Ferdane savoureuse, et que dire des sociétaires ? Ils sont parfaits.

La réussite est totale.

 

 

 

Pluie d’été de Marguerite Duras

Théâtre du Vieux-Colombier

Jusqu’au 30 octobre

 

 

29/09/2011

Anniversaire

 

 

 

Mardi soir, on fêtait à Malakoff, les quarante ans du théâtre 71.

Oui, le théâtre qui a transformé la Place du 11 novembre, a été créé en 1971, et ainsi dénommé parce qu’on célébrait, à l’époque, le centenaire de la Commune de Paris (18 mars-28mai 1871).

En ce temps-là on ne lésinait pas sur la culture. Et la municipalité a continué, et continue malgré la crise, de soutenir tout ce qui peut enrichir l’esprit et les relations humaines. Le sénateur Jack Ralite donna à son historique des accents d’épopée.

Grand moment d’émotion où l’on retrouva les témoins et ceux qui par leur action, leur ténacité donnèrent une âme à ce lieu. Le nouveau, Pierre-François Roussillon, recevait aussi l’ancien directeur Pierre Ascaride, et sans nostalgie, on fit des projets pour l’avenir.

 

Après les discours, ce fut « place au Théâtre » évidemment, avec L’Augmentation de Georges Pérec. Dans ce parcours du combattant que constitue une demande d’augmentation, deux comédiens éblouissants, dirigés par Anne-Laure Liégeois. Ce petit chef d’œuvre d’ironie, analyse sociologique pimentée de burlesque vient à point dans notre paysage « récessionnaire »…

La pièce est programmée au Rond-Point. Ne la laissez surtout pas passer. Vous saurez tout ce qui vous attend si vous osez vous plaindre de vos bas salaires, et de votre faible pouvoir d’achat.

Dur, dur d’être prolo !