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21/12/2007

L’Amoureux fou

   Jacques Noël a travaillé pour les grands auteurs, les interprètes prestigieux, dans des théâtres minuscules (Le Théâtre de la Huchette ou le Théâtre du Marais) comme dans des espaces institutionnels, (Opéra Garnier, Odéon, Comédie-Française) et les théâtres privés (Théâtre de l’Atelier, Théâtre Antoine, Théâtre de la Michodière). 

     Il vient à bout de toutes les contraintes spatiales, il élargit le plus petit espace, enjolive le plus dénudé. Depuis 1946, Jacques Noël a signé plus de 400 décors de théâtre. Il a aussi dessiné des costumes et des affiches pour cet art qui englobe tous les autres. Et il reste modeste et effacé, « au service » des auteurs.

     Actes Sud lui rend hommage avec « un beau livre » accompagné d’un DVD : Jacques Noël, décors et dessins de théâtre. Magnifiques traces pour conserver l'éphémère ! 150 pages, 100 photographies reproduisent les maquettes de décor, de véritables tableaux, « oeuvres d’un peintre minutieux », « tons en parfaite harmonie », « ingéniosité au service de la fantasmagorie » commente Victor Haïm qui explique le fonctionnement des décors, les astuces du génial architecte de scène,qui ne "cherche pas à imposer sa vision", mais met son talent à faire éclore celle des artistes.

      Le DVD conçu par Danielle Mathieu-Bouillon est un film de trente minutes  qui réunit les témoins et les acteurs de l’aventure théâtrale des cinquante dernières années. C’est vif, monté avec un regard tendre sur la profession, "acte d'estime et d'admiration" envers Jacques Noël qui se veut "un artisan".

     Pour présenter l’œuvre et l’homme, une préface de Nancy Huston et un biographie signée par l’historienne du théâtre : Geneviève Latour qui connaît tout de cet « amoureux fou du théâtre ».C’est un livre précieux…

     Il ne sera en librairie que le 4 janvier. Ceux qui ne croient plus au Père Noël font des cadeaux toute l’année, et je suis sûre que vous êtes de ceux-là.

Jacques Noël Décors et dessins de théâtre

Actes Sud

Ouvrage publié avec le concours du CNL

Prix : DVD inclus, 36 €

10:05 Écrit par Dadumas dans Livre, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Livre, littérature, théâtre |  Facebook | |  Imprimer

20/12/2007

Soirée africaine

     Qu’est-il arrivé à Antoine Fragonard (Bruno Rochette), pendant son séjour au « pays des hommes intègres », le Burkina Faso ? Depuis qu’il en est revenu Sylvia (Sylvie Rolland), sa compagne le trouve distant, absent, indifférent. Il se renferme comme un enfant coupable et refuse toute explication. L’arrivée d’un autre Antoine, un condisciple de l’école de Cinéma, Antoine Traoré (Alain Héma), son double africain va peu à peu révéler le secret qui « squatte sa cervelle ». Pas causant non plus le Traoré en ce qui concerne l’atelier de cinéma qu’Antoine F. a effectué au Burkina Faso six mois auparavant ! On parle de la lenteur insondable des administrations africaines, des petits trafics auxquels le cousin Félix (Ildevert Méda) se livre pour survivre. On discute longuement d’un scénario refusé et d’un autre accepté, du « cinéma comme arme d’émancipation » en Afrique, des conditions difficiles de l’artiste en France et ailleurs. On boit beaucoup sans oublier. Nicolas (Michel Burstin), l’ami blanc d’Antoine F., désespère d’être utile à tous chez les capitalistes.

     Noirs ou Blancs, les hommes ont bien du mal à rester intègres quand les chefs politiques, comme Sankara sont assassinés, et qu’une terrible maladie fauche les vies. Quelle maladie? Celle qui dévaste les corps ou celle qui pourrit les âmes? Il faut du temps et de l’intelligence, il faut mesurer ses paroles et les confronter à celles des autres pour admettre son impuissance et lutter contre l’impossible quand on ne veut pas l’accepter.

     L’auteur, Eric Durnez décale le drame en jouant sur la situation éponyme d’un titre : Quelqu’un va venir du Norvégien Jon Fosse que Sylvia, comédienne répète. Peu avant la première, le cousin Félix débarque et les Antoine livreront une partie du mystère.60ba34bbd5f13be3c214a49824868dd4.jpg

     Bruno Rochette est allé travailler au Burkina pour Sparadrap. Il est revenu avec l’équipe burkinabé pour Dragonnier. Sparadrap mis en scène par Michel Burstin est suivi de Dragonnier mis en scène par Ildevert Méda et forme un diptyque signé Eric Durnez et interprété par la compagnie Hercub et le théâtre Éclair. Difficile entreprise puisqu’il est dit qu’un « toubab ne peut pas comprendre ». Projet réussi puisque le but était de « supprimer les frontières », et de faire que « le monde soit moins injuste ».

     Sparadrap se joue en premier, mais chronologiquement, l’action se déroule après Dragonnier donné en deuxième partie. Jeu dramatique intéressant qui consiste à poser des repères et obliger le spectateur à répondre aux questions qu’ils se posent. Plaisir aussi de tout comprendre, et de découvrir la clé de l’énigme, cette beauté noire qui répond au nom de Parfaite (Amélie Wahébi). Les créations sonores de Max Vandervorst dans Sparadrap, la scénographie de Papa Kouyaté dans Dragonnier créent des univers différents et cependant très proches. 87831841e953fc9d785a5f8fc87936af.jpgL’univers du cinéma est évoqué par des scènes en ombres noires sur un drap blanc tendu (photo © Soux) et la présence d’un objet : une caméra sur pied, bien visible, mais sans emploi puisque le scénario est en panne quelque part chez un producteur.

     Ces deux spectacles touchent les spectateurs par les thèmes abordés avec pudeur et sincérité. Il fait froid, la salle est mal chauffée, mais la chaleur de l’Afrique vous gagne au Théâtre de Ménilmontant.

 


 

 

Sparadrap et Dragonnier publiés aux éditions Lansman

Sparadrap est joué à 19 h

Dragonnier à 21 h

Le café-bar, le Maquis assure une collation à l’entr’acte

 

Théâtre de Méminlmontant

Du 19 décembre au 20 janvier

01 46 36 98 60

P. S. le 19 décembre…   la compagnie Hercub’ a fêté son 16ème anniversaire.

Par ailleurs la compagnie communique :

Dans le cadre des projections-débats que nous organisons au théâtre, autour des représentations, le samedi 29 décembre à 17h : Une Femme pour Souleymane de Dyana Gaye. C’est un très beau et très sensible court-métrage sur la difficulté d’être immigré, et la responsabilité qui pèse sur les épaules de celui qui est parti, vis-à-vis de toute la communauté. Nous avions découvert ce film lors du Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand.

Le film Borry Bana* de Abdulaye Diallo** et Luc Damiba, est prévu pour samedi 12 janvier à 17h. C’est un documentaire qui traite des circonstances obscures de la mort du journaliste d’investigation Norbert Zongo, dont l’assassinat pour des raisons politiques avait été déguisé en accident de la circulation.

*Borry Bana est une expression en langue Bambara qui veut dire « la fuite est terminée ».
** Abdulaye Diallo est un ami. Historien, journaliste, il dirige à Ouagadougou, le Centre National de Presse, courageusement baptisé… Norbert Zongo.

 

 

11:45 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre, Afrique |  Facebook | |  Imprimer

18/12/2007

Merci Vauban !

     Nous ne sommes pas de ceux qui disent « Merde à Vauban ». Les villes qu’il fortifia ont célébré le tricentenaire de la mort du stratège exceptionnel qu’il fut. Le grand homme qui mourut en avril 1707 n’a pas fini d’être commenté par les architectes (voyez les expositions qui lui sont consacrées à Saint-Martin-de-Ré, comme à Paris). Avec son mémoire sur « la dîme royale », il a prôné aux législateurs l’impôt proportionnel. Sa lettre sur le retour des huguenots était un modèle de tolérance que Voltaire n’aurait pas renié, et les livres d’économie domestique recommandaient comme lui, l’élevage familial de la truie. Il analysait les problèmes de son époque avec précision et tâchait d’y apporter une solution. En cette année de commémoration ses nombreux écrits ont aussi inspiré les auteurs dramatiques. Nous dirions donc : « Merci Vauban »…

     Nous avons eu des spectacles de tous genres pour célébrer Sébastien Le Prestre de Vauban. Collages de ses Oisivetés avec son testament, adaptation de sa correspondance, rencontre improbable avec un comédien à Blaye*, « fantaisie iconoclaste »** le mettant face à face avec un autre grand serviteur de l’Etat : Pierre Mendès France dont la république a oublié de fêter le centenaire, et enfin, La Tour défend le roy, de Florence Camoin, qui créa son spectacle à Avignon en juillet dernier.

 b361193aec63e8dc9dde8bfe651c2d24.jpg    Il ne manque pas un galon, pas une broderie, pas un brandebourg, pas une ganse, pas une dentelle aux magnifiques costumes (signés Dragos Moldoveanu) des personnages créés par Florence Camoin. Ne parlons pas des perruques, des chapeaux, et de la canne de Louis XIV, tout est adéquat.

     La reconstitution est saisissante ! Que Vauban (René Camoin) soit avec son fidèle neveu et secrétaire, Antoine (Laurent Feuillebois), en son château de Bazoches, dans le Morvan où Louvois (Michel Chalmeau) vient le consulter, ou à Versailles où le roi louis XIV le reçoit en particulier, tout sonne juste. Le souci de Vauban dans la guerre ? La protection des populations civiles, l’efficacité du soldat, son armement, sa sauvegarde. Il outrepasse ses compétences, «  Y a-t-il une question dans notre société dont vous ne vous soyez pas mêlé ? » tonne Louvois. Vauban imagine aussi bien la baïonnette et la poire à poudre, qu'une pension permettant aux anciens combattants invalides de rentrer chez eux avec les honneurs du royaume. Il s’oppose aux « dragonnades » qui humilient les huguenots et « vident la France de ses sujets les plus éminents ». enfin, il ose dire au roi que son royaume est « ruiné » et ses peuples dans « la misère ».

     Chaque scène délivre une connaissance réelle des problèmes du grand siècle et une pertinence dramatique plaisante. Le plus joli morceau est sans doute le dialogue entre Vauban et Louis XIV, où, avec le vocabulaire poliorcétique (relatif à l’art d’assiéger les villes), Vauban enseigne à son roi, l’art de conquérir les belles… « Il faut tout d’abord connaître le territoire […] faire les plans, […], déterminer la force de sa garnison ». « Quelle garnison ? » demande le Roi. « Le père, le tuteur, les soupirants, les amants, le mari, les frères ! » répond Vauban…

La musique de Paul Lazar et Xavier Thépault s’inscrit dans une lignée classique congruente. C’est un vrai plaisir de la découverte pour certains et pour ceux qui connaissaient Vauban et ses luttes, une joie de le retrouver tel qu’en lui-même ils se l’imaginaient. On espère que le spectacle tournera encore…    

* La Poudrière de Jean-Paul Alègre

**Une forteresse au paradis de Victor Haïm    

Les 14 et 15 décembre à La Maline  

La Couarde-sur-Mer

19:05 Écrit par Dadumas | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Histoire, Théâtre |  Facebook | |  Imprimer