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24/01/2014

Un "incurable amour"

 

 

Hippolyte (Thomas de la Taille) veut quitter Trézène pour partir à la recherche de son père Thésée (Jean-Marie Bellemain) disparu lors de conquêtes improbables. théâtre,littérature,racine,théâtre de nesle,bernard belin,christine narovitch,michel pilorgé,maryvonne courtrot,margaux laplaceSon précepteur, Théramène (Michel Pilorgé) soupçonne d’autres raisons, et, en effet, le jeune homme avoue qu’il est tombé amoureux de « la charmante Aricie » (Clémentine Stépanoff ou Maryvonne Coutrot), fille et sœur des ennemis de son père.

Mais plutôt que de fuir un amour partagé, le jeune homme devrait éviter la passion coupable de la Reine. Théâtre, littérature, racine, Théâtre de Nesle, Bernard Belin, Christine Narovitch, Michel Pilorgé, Maryvonne Courtrot, Margaux LaplacePhèdre (Sonia El Houmani) en est tombée amoureuse dès qu’elle l’a vu, et, si elle reconnaît « Vénus et ses feux redoutables », si elle a dissimulé sa passion sous le masque de la haine, l’annonce de la mort de Thésée, les mauvais conseils de sa nourrice Oenone (Christine Narovitch) la conduiront à avouer cet "incurable amour" et à faire des avances au jeune homme, qui, s'échappe épouvanté, alors qu’elle lui a pris son épée.

Objet phallique, objet du délit, et Oenone fabrique le mensonge et l’accusation quand inopportunément le mari rapplique ! La femme de Putiphar accusa Joseph, Phèdre, par la bouche d’Oenone accuse Hippolyte.

Malédictions et morts !

Les murs de pierres apparentes du Théâtre de Nesle sont déjà un décor et pour Phèdre, dispensent le metteur en scène, Bernard Belin, de tout décor construit. Il y trouve aisément « l’épure, la sobriété » qu’il recherche pour Racine. Et, comme la scène manque de dégagement, il résout aisément le problème en faisant sortir souvent les comédiens côté public.

théâtre,littérature,racine,théâtre de nesle,bernard belin,christine narovitch,michel pilorgé,maryvonne courtrot,margaux laplaceMais que n’a-t-il donné plus de cohésion à sa troupe en choisissant les costumes dans le stock de Bruno Marchini ?

Si la robe de  velours rouge, drapée à l’antique de Phèdre, est royale, avec ses « vains ornements », ceinture et bijoux, pourquoi Thésée avance-t-il habillé en Clovis, roi des Francs, tandis qu’Hippolyte semble sortir de Lorenzaccio, Théramène du Roi s’amuse, et Oenone d’On ne badine pas avec l’amour (rôle de Madame Pluche) ? La sobre vêture noire liserée d’or d’Aricie et  Panope/Ismène (Margaux Laplace ou Sophie Fontaine) donne plus de vraisemblance à leurs scènes.

On retiendra les noms de ces jeunes femmes qui jouent avec naturel les rôles secondaires. Christine Narovitch module admirablement le vers de Racine et confère à Oenone la dimension poignante de celle qui « a tout quitté » pour servir sa maîtresse.

Vous connaissez la fin tragique d’Hippolyte, Michel Pilorgé en fait un récit détaillé, sans emphase, avec une émotion contenue, déchirante, qui installe dans la salle ce silence ébloui où plus un fauteuil ne craque, et où cessent les bruits familiers parasites. 

Raison de plus de ne pas manquer cette Phèdre !

 

 

Photos : © François Vila

 

 

Phèdre  de Racine

Théâtre de Nesle* jusqu’au 15 février,

Les jeudi, vendredis et samedis à 21 h

01 46 34 61 04

 

·       voir également la programmation jeune public sur

·       www.theatredenesle.com

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23/01/2014

Pierre Charras

Théâtre, Littérature, Pierre CharrasIl était si discret, si cultivé, si courtois que les journaux télévisés n’ont pas parlé de lui. Pierre Charras né le 19 mars 1945 à Saint-Etienne s’est éteint le 19 janvier 2014, à Bagnolet.

Il faisait des études d’anglais quand son ami stéphanois Alain Scoff, l’entraîna vers le théâtre. Il devint comédien. Ce fut l’aventure de J’ai confiance dans la justice de mon pays, prélude à beaucoup d’autres notamment avec Régis Santon et Jacques Mauclair. Il tourna aussi de nombreux films et téléfilms.

Il devint auteur et publia quinze romans, - dont la plupart au Mercure de France. Il reçut de nombreux prix dont celui des deux Magots en 1994 pour Monsieur Henri, le prix Valéry Larbaud en 2000 pour Comédien ; le prix du roman FNAC en 2003 pour Dix-neuf secondes.

Comédien et écrivain il écrit tout naturellement pour le théâtre : Dimanche prochain*, Prix CIC Paris Théâtre, Rameau le Fou, d’après Diderot, et Figure**, adapté de son Francis Bacon, le Ring de la Douleur.

Angliciste et écrivain, il a bien sûr traduit Michael Frayn, Dave Eggers, Justin Cronin, James Lasdun. Nous aimions beaucoup son talent et sa passion.

« Et tout le reste est silence » comme aurait dit son ami William...

 

·       N°1001 de l’Avant-Scène Théâtre

·       ** Avant-Scène Théâtre

11/01/2014

Mourir ensemble

 

 

 Orphée (Sam Richez), violoniste désabusé traîne son ennui au côté de son Père (Jean-Laurent Cochet, musicien médiocre. Ils vivent chichement et vont de ville en ville jouer aux terrasses des cafés, espérant un engagement au casino de Palavas. théâtre,théâtre 14,anouilh,j. - l.- cochetCe soir-là, au buffet de la gare, sous l’œil d’un garçon imperturbable (Fabrice Delorme) et d’une caissière muette (Maryse Flaquet), tandis qu’ils attendent leur train, apparaît Eurydice (Norah Lehembre), parmi les comédiens d’une troupe en tournée. Coup de foudre : « tout est devenu beau ! ». Orphée et Eurydice décident de fuir ensemble, lui abandonnant son père, et elle, fuyant Mathias (Julien Morin) l’homme qui l’aime, sa mère (Catherine Griffoni) et son amant (Jean-Pierre Leroux), et l’odieux  imprésario, Dulac (Jean-Claude Eskenazi). Un mystérieux témoin les suit jusqu’à Marseille : Monsieur Henri (Vincent Simon) aux allures de voyageur de commerce. Le bonheur des amants est de courte durée. Voulant fuir le passé que Dulac menace de révéler, Eurydice trouve la mort dans « le car de Toulon ». M. Henri, pactise avec la mort et ramène Eurydice, à condition qu’Orphée ne la regarde pas avant le matin. Orphée est trop jaloux pour tenir sa parole. Il plonge son regard dans les yeux d'Eurydice...

Malgré les témoignages favorables du petit régisseur (Jacques Ibranosyan), du chauffeur du car (Nicolas Natkin), du garçon d’hôtel (François Pouron), du secrétaire du commissaire (Pierre Ensergeix), et de la caissière qui parle enfin, Eurydice disparaît à jamais, et M. Henri propose à Orphée de la rejoindre Eurydice, en mourant. Ainsi, les deux amants sont réunis pour toujours.théâtre,théâtre 14,anouilh,j. - l.- cochet

Jean Anouilh renouvelle le mythe grec en transposant l’histoire dans la modernité des années 40 où se débattent des gens ordinaires, ni riches, ni pauvres, ni honnêtes, satisfaits de peu, âmes avares et morales mesquines. Le poids du passé écrase ceux qui s’aiment dans une société cornée où il vaut mieux mourir ensemble plutôt que d'essayer de vivre dans un monde « difficile ».

Jean-Laurent Cochet et Sam Richez, signent la mise en scène dans un accord exceptionnel car beaucoup de ces jeunes gens ont été formés par le maître qui joue le Père dans toute l’acception du terme. On y découvre avec bonheur la jeune Norah Lehembre, sensible, émouvante et belle dans le couple passionnel qu’elle forme avec Sam Richez.

« il est difficile de toujours expliquer tout » dit Eurydice.

Il est « difficile » de ne pas les aimer tous, ces jeunes comédiens, « beaux, insolents et terribles » unis autour de leur maître, pour porter la parole d'un auteur et servir le Théâtre.

 

Photos : © LOT

 

Eurydice de Jean Anouilh

Jusqu’au 22 février

Théâtre 14

01 45 45 49 77