04/06/2007
Une belle page d'espérance
Il fallait, sans trahir l’auteur, inventer la dramaturgie pour ces trois actes inachevés,Géraldine Cohen a adapté le texte avec finesse et respect. Il fallait jouer sur un plateau immense fait pour des décors extraordinaires, Béatrice Collet a imaginé une scénographie dépouillée et efficace. Christophe Ouvrard a évité le piège des uniformes honnis, des reconstitutions cruelles. Ses costumes atemporels, évitent les rayures maudites et les insignes abhorrés.
La scène est close, au fond, d’un mur sombre au centre duquel une porte se découpe. Au dessus, dans le lointain, un fronton où, on peut lire, à l’envers, une devise « le travail c’est la santé », qui démarque celle d’Auschwitz tristement célèbre.
Le Naturaliste, comme le meneur de revue de Cabaret, porte une redingote chamarrée. Il est à l’aise, un brin méprisant, mais la vie du camp aura raison de sa superbe et justifiera sa disparition au troisième acte. Alain Fromager donne sa prestance à cet observateur ambigu, porte-parole de l’auteur qui, ayant su analyser le système concentrationnaire, pouvait en désarmer l’apparente absurdité.
Le Naturaliste parle d’abord au proscenium, seul devant un rideau noir qui peu à peu perd de son opacité pour révéler des silhouettes des détenues, assises sur des bancs de bois brut, de chaque côté. La première soliste c’est Nénette (Claire Delgado-Boge), magnifique soprano qui sur la Habanera de Carmen chante son arrestation.
Le ton parodique ce sont les co-détenues qui vont le donner : Lulu de Colmar (Hélène Delavault, dont la chaude voix de mezzo-soprano bouleverse), Lulu de Belleville (Emmanuelle Goizé), Marguerite (Gaëlle Le Roi), Havas (Jeannette Fischer), sopranos émouvantes, et Marmotte (Carinne Séchehaye, troublante mezzo-soprano), que les chœurs relaient et soutiennent sur des airs populaires comme « Mon papa est venu me chercher » ou des liturgies comme le De profundis clamavit. Elles se moquent de leur peur et de leur faim, de leur corps amaigri : « notre sex-appeal était réputé, aujourd’hui la pile est bien déchargée », de leurs « petits païens » qui tombent, et elles rêvent de nourriture et de repos.
Les chœurs ? Ce sont les élèves des collèges Camille Claudel et Evariste Gallois du XIIIe arrondissement de Paris, avec leurs professeurs de musique, et la Maîtrise de Paris. S’y sont joints les jeunes danseuses des conservatoires municipaux de la Ville de Paris. Elles deviennent sujets dans le ballet des julots, elles deviennent brigade de restauration dans les songes des déportées, et troupeau des verfügbar qu’on emmène sans résistance à la mort.
Christophe Maudot a restitué les musiques qui ont demandé quelquefois beaucoup de recherches, et des re-créations. Les musiciens de l’orchestre de chambre Pelléas sont dirigés par Hélène Bouchez, et la formation passe avec art de l’opéra à la mélodie et à la chansonnette. Rien n’est vulgaire pour les grands mélomanes. Merci à tous dont la foi et la ferveur ont créé ce chef d'oeuvre.
On n’a trouvé que deux jours dans la programmation parisienne pour l’inscrire à l’affiche. Mais nous faisons confiance à tous ceux qui du parterre au poulailler ont communié dans l’émotion de ces représentations. Le Verfügbar aux enfers ne peut pas se terminer si vite. Il est aussi nécessaire que la lettre de Guy Môquet pour célébrer la mémoire et la fraternité, et ne jamais désespérer du genre humain.
Théâtre du Châtelet les 2 et 3 juin 2007
Le Verfügbar aux enfers "une opérette-revue à Ravensbrück"
* Le verfügbar est une déportée qui refuse de travailler pour le régime nazi, et qui, lorsqu’elle y est contrainte, sabote le travail : une sorte de « tire-au-flanc » à conscience politique.
(voir notes de fevrier 2006 et Mai 2007)
15:45 Écrit par Dadumas dans culture, éducation, Musique, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre, littérature, musique, Résistance, éducation | Facebook | | Imprimer
29/05/2007
Rire pour survivre
Germaine Tillion a aujourd’hui cent ans et elle nous invite à partager un moment terrible de sa vie.
14:35 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre, histire, littérature, résistance | Facebook | | Imprimer
21/05/2007
Une centenaire en pleine forme
La FNCTA (Fédération Nationale des Compagnies de Théâtre et d’Animation) a cent ans cette année. Depuis 1907, un réseau de plus en plus actif maille le territoire. Troupe pacifique, mais troupe d’élites, elle est de tous les assauts contre la bêtise, le sectarisme, l’indifférence. Rude tâche !
Pendant les congés de l’Ascension, les grands manœuvres de la région Rhône-Alpes se déroulent traditionnellement à Châtillon-sur-Chalaronne, un des plus beaux villages fleuris de notre hexagone bien aimé. (Je dis un des premiers, et non pas le premier pour n’avoir aucune réclamation des autres villages de France et de Navarre dont la réputation est internationale !)
Pendant quatre jours, à Châtillon-sur-Chalaronne, des mordus de la scène organisent des rencontres entre compagnies, auteurs et spectateurs. Car la spécialité locale, et, pour la 21e édition, c’est le spectacle vivant. Pas étonnant que les échanges soient quelquefois très vifs. Et que les enthousiasmes apaisent les maladresses.
Autre spécialité locale (outre le poulet de Bresse), la création (en 1998), de l’Académie internationale des auteurs : Jean-Paul Alègre, Claude Broussouloux, Denise Chalem, Louise Doutreligne, Jean-Claude Grumberg, Victor Haïm, Israël Horovitz, Jean Larriaga, Robert Poudérou, Anca Visdéi, tous auteurs de bonne compagnie. Ceux qui étaient présents ont depuis toutes ces années tissé de vrais liens d’amitié avec les compagnies amateurs.
Amateurs ? Pas tant que ça ! Il faut voir avec quel soin ils préparent leurs représentations et comment ils respectent les textes et acceptent les conseils ! Certains professionnels sont quelquefois moins scrupuleux. Il n’est pas d’usage de nommer les acteurs amateurs mais félicitons les équipes : le TQS, Terre de Scène, le Théâtre de l’Escarpin, l’ATC, et le Théâtre du Torrent, a région Rhône-Alpes et le village de Châtillon-sur-Chalaronne pour cette grand fête de l’amitié.10:20 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre | Facebook | | Imprimer