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30/03/2018

Il nous plaît bien !

 

 

Les « pastourelles » médiévales avec la musique, les travestissements, les cache-cache nocturnes et les décors champêtres, qui avaient plu dans le Jeu de Robin et Marion et Le Jeu de la Feuillée au XIIIe siècle, ont-elles influencé les premières comédies shakespeariennes ? Le Songe d’une nuit d’été, Peines d’amour perdues et Comme il vous plaira en conservent la trace. Shakespeare les rend plus païennes, y ajoute les bouffons qu’on n’appelle pas encore « clowns », et parle aussi de l’arbitraire du pouvoir. Elles continuent d’inspirer nos contemporains.

C’est avec une belle traduction de Jean-Michel Déprats que Christophe Rauck en propose aujourd’hui une nouvelle version. C’est « un montage » qui « met en valeur […] les joutes entre les deux couples d’amoureux que sont Orlando (Pierre-François Garel) et Rosalinde (Cécile Garcia Fogel) et Silvius (Pierre-Félix Gravière) et Phébé (Luanda Siqueira) » et le monologue de Jacques le mélancolique (John Arnold) :

« Le monde entier est un théâtre… »

que nous connaissons tous mais dont nous avions oublié l’origine.

théâtre,théâtre 71,shakespeare,christian rauck,jean-michel déprats,alain trétoutLe plateau est nu et lisse, mais, en découverte et sur les côtés, des toiles peintes figurent la forêt d’Arden (ou des Ardennes ?), étrange et brumeuse, peuplée de cerfs, de biches, de faons et de renards empaillés. Hommes et femmes bannis par un méchant duc (Jean-Claude Durand) y ont trouvé refuge ainsi que Jacques le mélancolique, un philosophe excentrique et misanthrope.

Rosalinde et Célia (Maud Le Grévellec), vêtues de robes bois de rose, semblables, mais pas identiques, se travestissent pour échapper aux persécutions. Le rouge est mis. Rouge brique pour la salopette de Rosalinde qui devient Ganymède, rouge vif pour la robe de sa cousine devenue Aliéna (Costumes de Coralie Sanvoisin).

Malicieux choix que ce prénom de Ganymède, le bel adolescent dont Zeus devint amoureux ! En ce temps-là, le gendrisme ne choquait personne ! Mais déjà les revendications féministes perçaient dans la comédie. Et on n’hésitait pas à ridiculiser les mâles paillards comme Pierre de Touche (Alain Trétout) et les vierges un peu rassises comme Audrey (Jean-François Lombard). Les vrais amoureux, Orlando et Silvius sont attendrissants, et justes, comme tous les comédiens.

Heureuse est l’option du metteur en scène qui parcourt en musique un répertoire anglais très éclectique, magnifiquement chanté.

Le spectateur va de surprise en surprise, et de sourire en rire. Comme il vous plaira lui plaît !

S’il suit le conseil de Shakespeare « : « Aimez ce qui vous fera plaisir. », tout ira pour le mieux dans notre monde impossible !

 

 

Photo: © Simon Gosselin 

 

 

Comme il vous plaira de William Shakespeare

Traduction de Jean-Michel Déprats

 

Théâtre 71 à Malakoff, jusqu’au 13 avril 

Mercredi, jeudi, samedi 19 h 30

Mardi, vendredi, 20 h 30

Dimanche, 16 h (sauf le 1er avril)

 

01 55 48 91 00

Bateau Feu à Dunkerque, les 17 et 18 avril,

Théâtre de Sénart, du 3 au 5 mai,

Maison de la Culture d’Amiens, les 15 et 16 mai.

17/06/2016

Un songe enchanté

 

 

 

Théâtre, théâtre 14, Shakespeare, Purcell, musique, poésie, littératureLe Songe d’une nuit d’été de Shakespeare a inspiré à Purcell un « semi-opéra » : The Fairy Queen. Je ne sais pas très bien ce qu’est un « semi-opéra », mais, j’affirmerais volontiers qu’Un songe d’une nuit d’été, adaptation des deux œuvres en une seule, par Wajdi Lahami, appartient au genre « chef d’œuvre ».

Le jeune Lysandre (Ivan Herbez) et la belle Hermia (Laetitia Ayrès) s’aiment et voudraient se marier. Mais le pater familias en a décidé autrement. « Ma fille m’appartient » et il veut qu’elle épouse Demetrius (Jules Dousset), duquel son amie Helena (Ariane Brousse) est éprise. Entre épouser ou mourir, les amants trouvent une troisième voie : l’enlèvement. Ils se donnent rendez-vous dans le bois d’Athènes pendant cette nuit d’été où tout un monde païen de fées, de lutins malicieux, d’êtres invisibles et souveraines, entoure les hommes d’une invisible et invincible puissance.Théâtre, théâtre 14, Shakespeare, Purcell, musique, poésie, littérature

À cause de la jalousie d’Oberon (Maxime de Toledo), de la maladresse de Puck (Francisco Gil), la pauvre reine des fées Titania (Orianne Moretti) tombera amoureuse d’un âne, et Lysandre d’Helena. La magie (signée Nicolas Audouze) joue quelquefois des tours pendables.

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Au bout d’une nuit très agitée, les amoureux seront réconciliés et réunis, et Puck dans son adresse au public dissipera l’illusion du spectacle en souhaitant « 
bonne nuit à tous. »

Certains rigoristes seront troublés de voir que dans l’adaptation de Wajdi Lahami, le Duc Thésée ne figure plus que sous la forme d’un persona tutélaire au premier acte, que la reine des Amazones a disparu ainsi que la troupe de comédiens qui joue Pyrame et Thisbé. Mais Ils devront reconnaître que l’esprit de Shakespeare est bien vivant dans l’heureuse mise en scène d’Antoine Herbez .


Les sept comédiens, qui sont aussi chanteurs, sont accompagnés de trois musiciens : Victorien Disse, (théorbe et guitare baroque) interprète aussi Papillon, Alice Picaud (violoncelle) est aussi Toile d’Araignée et Marie Salvat, (violon) est également Graine de Moutarde. Et quelle voix merveilleuses pour les chants issus de The Fairy Queen, judicieusement insérés dans l’ouvrage !théâtre,théâtre 14,shakespeare,purcell,musique,poésie,littérature

Les lumières Fouad Souaker rendent onirique la scénographie de Charlotte Villermet, construite de panneaux à la fois opaques et translucides, éléments mobiles sur fond de nuit américaine. Les costumes de Madeleine Lhopitallier opposent les couleurs froides ((blanc et indigo) de la réalité contrariée des amants, à celles chaudes et fauves des créatures surnaturelles. Il reste à féliciter Claire Faurot pour sa chorégraphie impeccable, et à remercier le Théâtre 14 d’accueillir sur sa scène étroite cet univers enchanteur pour ce songe enchanté.

 

  

Photos : © LOT 

 

Un songe d’une nuit d’été d’après Shakespeare, musique de Purcell (The Fairy Queen) adaptation de Wajdi Lahami

Direction musicale Didier Benetti

Théâtre 14

01 45 45 49 77

Jusqu’au 1er juillet 2016

Mardis, vendredis et samedis à 20h30,

les mercredi et jeudis à 19h

matinée samedi 16 h - supplémentaire lundi 27 juin à 20h30

 

 

 

 

 

 

11/05/2014

Faire et défaire

 

 

Théâtre, Théâtre du Soleil, Ariane Mnouchkine, ShakespeareJusqu’au 7 mai, à la Cartoucherie, fidèle à ses principes, Ariane Mnouchkine avertissait les spectateurs qu’ils assistaient à une « répétition », et demandait  à ceux « qui n’avaient jamais supporté d’assister à un accouchement » de rentrer chez eux et de « revenir une fois l’enfant lavé. »

Eh bien ! Cette fois, c’est fait ! Macbeth est né ! L’enfant et la mère se portent bien… Et les spectateurs  sont transportés d’enthousiasme.

Macbeth ? Rappelez-vous… « Une histoire pleine de bruit et de fureur », une tragédie nocturne où les tambours roulent, le tonnerre gronde, les fanfares éclatent, les chevaux brisent leurs stalles, les cloches sonnent, les hiboux crient, et les assassins agissent en silence.

Le sire de Cawdor a trahi Duncan, son suzerain, en s’alliant au roi de Norvège. Macbeth, comte de Glamis, gagne la bataille contre les Norvégiens, et pour le récompenser, Duncan lui offre ce titre. Trois sorcières, sur la lande ont déjà prévenu Macbeth de sa promotion. Il était avec un autre capitaine, Banquo. À Macbeth, elles ont aussi prédit qu’il serait roi, et à Banquo qu’il engendrerait des rois. Ces oracles mystérieux et imparfaits vont pousser Macbeth au régicide, et une fois le premier crime accompli à les enchaîner jusqu’à ce que les féodaux se liguent contre lui et l’anéantissent. Macbeth a « fait » le crime et ne peut le « défaire ».

À la Cartoucherie, près de cinquante comédiens, sont engagés dans l’héroïque parcours. L’époque est incertaine. Les guerriers sont modernes, dissimulés dans des tumulus, aidés de partisans vêtus de peaux et d’oripeaux. On entend les hélicoptères de combats et les fusillades. Les sorcières n’ont pas d’âge, grotesques et effrayantes elles jouent avec les ordinateurs comme avec des objets rituels. Hécate est tapie dans un Mac. Les puissants aiment le luxe, les canapés profonds, les écrans plats et les micros qu’on leur tend pour composer leur gloire.

La lande fait place au camp, qui se modifie en salle, en cour, en antichambre, en roseraie. Les lieux et les châteaux se suivent, et les champs de batailles succèdent aux plaines. Tout se meut, change à vue, entraînant le spectateur dans la poursuite infernale de l'ambitieux Macbeth (Serge Nicolaï) et de sa « précieuse associée », Lady Macbeth (Nirupama Nityanandan). Il était encore « plein du lait de la tendresse humaine », elle va s'attacher à transformer ce « lait en fiel ». Ils en perdent le sommeil et errent dans les cauchemars sinistres de leur culpabilité. « Les agents des ténèbres » les poursuivent dans leur « besogne sanglante ». Des êtres de chair sont « massacrés sauvagement », d’autres, ballottés par des haines qui les abusent, tentent d’aimer, de vivre malgré le chaos dont ils ne sont pas responsables. C’est splendide et terrifiant.

Jean-Jacques Lemêtre orchestre les cris, les sons, les gémissements et les soupirs.

Dans la nouvelle traduction d’Ariane Mnouchkine, dans sa mise en scène somptueuse, Macbeth  montre l’ambition cynique, la course diabolique du pouvoir, et dévoile également la soif de justice de l’homme et son éternel combat pour la rétablir.

 

 

 

Théâtre du Soleil

À 19 h 30 du mercredi au samedi,

Les samedis et dimanche à 13 h 30

01 43 74 24 08

www.theatre-du-soleil.fr

 

La troupe : Samir Abdul Jabbar Saed, Taher Baig,

Shaghayegh Beheshti, Duccio Bellugi-Vannuccini,

François Bombaglia, Victor Bombaglia,

Aline Borsari,Lucien Bradier,

Sébastien Brottet-Michel,

Sergio Canto, Juliana Carneiro da Cunha,

 Marie Chaufour,

Camilia De Freitas Viana De Moraes,

Saboor Dilawar,

Eve Doe-Bruce, Ana Amelia Dosse,

Maurice Durozier, Blas Durozier,

Man Waï Fok, Camille Grandville,

Astrid Grant, Joshua Halévi,

Martial Jacques, Sylvain Jailloux,

Dominique Jambert, Judit Jancso,

Wajma Tota Khil, Seear Kohi,

Eraj Kohi, Shafiq Kohi,

Iwan Lambert, Quentin Lashermes,

 Agustin Letelier, Vincent Mangado,

Dionisio Mangado, Andrea Marchant,

Jean-Sébastien Merle, Alice Milléquant,

Serge Nicolaï,

Nirupama Nityanandan,

Miguel Nogueira Da Gama, Seietsu Onochi,

Vijayan Panikkaveettil, Ghulam Raza Rajabi,

Omid Rawendah, Armand Saribekyan,

Harold Savary, Luciana Velocci Silva,

Frédérique Voruz