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27/03/2008

Dédé et les magiciens

Henri Christiné et Albert Willemetz avaient triomphé avec Phi-phi en 1918, et Dédé, créé en 1921, garantit de belles rentrées au théâtre des Bouffes-Parisiens. Après la grande boucherie de la Guerre, on avait besoin de rire de tout. Olivier Desbordes a vu dans Dédé de quoi nourrir sa verve caustique. De la bluette, il réalise un tableau social jubilatoire. Dédé y trouve une actualité incroyable !

D’un côté, le naïf Dédé (Éric Pérez) et son complice de goguette Robert (Michel Fau), face à Odette (Sandrine Montcoudiol), une allumeuse rencontrée au « bal de Élysée », et qui tergiverse : « j’ose pas ! ». Entre les deux parties, les travailleuses, la première, Denise (Dalila Khatir) amoureuse du patron, dirigeant Anne Barbier, Flore Boixel, Agnès Bove, Gaëlle Pinheiro, vendeuses le jour et danseuses au Casino de Paris le soir, pour « gagner tout ce qu’on veut », (on ne disait pas « gagner plus », mais on le pensait déjà).

Naturellement « tous les chemins mènent à l’amour », sur fond de boutique excentrique, où le burlesque rejoint le surréalisme. C’est vrai que c’est une « drôle de boutique ». Boîtes à chaussures géantes, escarpins géants comme sur un Dalí, apparitions de têtes de vaches, poursuites à la René Clair, l’univers de l’opérette déjà déraille vers le train des revendications culturelles et sociales. On ne s’étonne pas de voir un grand gaillard de syndicaliste manipulé, un innocent arrêté, un notaire qui parle comme un marlou. Le patron ? Il rêve de « tout rénover ». Il n’y parvient pas, mais trouve l’amour.

Willemetz adore les bons mots, les saillies incongrues, les calembours. Il les fait en chansons : « Votre descente est trop décente », Et Robert ? Il « s’donne… un mal de chien ».

Ce qui est réjouissant avec l’opérette, c’est que tout se termine bien : « Dans la vie faut pas s’en faire ! ». Même quand on s’est trompé, l’important est de le reconnaître : « Si j’avais su évidemment, j’aurais agi tout autrement ! », et le refrain devient un hymne populaire.

Ce qui est merveilleux avec l’Opéra éclaté, c’est qu’un pianiste (Roger Pouly) et deux musiciens, restituent l’atmosphère de la Gaîté Lyrique. Olivier Desbordes et sa troupe sont des magiciens ! Ils vous réjouissent le cœur et éclaircissent le jugement.

Opéra éclaté au Théâtre Silvia Monfort.

Renseignements et location : 01 56 08 33 88

24/03/2008

Un entomologiste avisé

     Betty (Émilien Tessier) est seule dans sa cuisine. Elle attend une visite. Elle s’affaire, prépare une grande salade au thon, et se verse de petits verres de rouge, pour se donner du coeur. Enfin « les voilà ! »* : Ruth (Florence Giorgetti), Nelly (Hélène Foubert), Hervé (Nicolas Maury). Ils arrivent avec un bouquet de fleurs et des sourires appliqués qui étirent leurs lèvres et réjouissent leurs visages. Ils parlent tous en même temps, pour ne pas dire grand-chose. Nelly vient de trouver du boulot dans une « coffee shop », Hervé est graphiste, et Ruth qui « vit avec son mari par intermittences », prend des photos « pour immortaliser cet instant ». Betty, « bien tranquille » dans sa petite maison, s’endort par moments, mais « trouve que le courant passe bien entre » eux. Ils reviendront !

      « Ainsi le temps se coule et le présent fait place/Au futur importun », disait Ronsard. Ainsi « le temps passe » de visite en visite. Ainsi la vie passe. Un jour, la pétillante Ruth cesse les va et vient, et reste à demeure chez Betty « vieille femme seule », « ordinaire », mais toujours alerte dans sa robe indémodable. Entre vieillardes, faut s’entr’aider, n’est-ce pas ?

     En interprétant un rôle féminin à l’âge où toute féminité est déniée, Émilien Tessier est remarquable de sobriété. Nicolas Maury donne un être irritable, souvent arrogant et maladroit. Hélène Foubert joue une jeune femme inquiète et sensible. Florence Giorgetti est Ruth, brouillonne et exubérante dont les sautes d’humeur annoncent un déséquilibre certain. Elle met aussi en scène avec le dynamisme et le brio qu’on lui connaît, dans une scénographie naturaliste et des lumières de Laurent P. Berger.

     Philippe Minyana, en entomologiste avisé, s'amuse de voir s'agiter ses personnages « entre banal et extravagance ». Pas de grands sentiments, pas d’attendrissement, pas de drame, mais la lente décrépitude qui mène chacun vers la mort, cette solitude éternelle qui ne sera pas plus triste que l’existence qu’ils ont menée. Pauvres vies ? Ce sont les nôtres.

     Le regard est lucide, jamais affligé. Ruth chante, Betty danse le madison avec ses amis. Les tableaux sont vifs, souvent joyeux, les rapports entre les êtres se nouent, se distendent, mais jamais ne se rompent.

     Le réel est toujours plus désespéré.

 

 

 

 

Voilà de Philippe Minyana

publié aux éditions de L'Arche

Au Théâtre du Rond-Point jusqu’au 25 avril

01 44 95 98 21

22:10 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre, littérature |  Facebook | |  Imprimer

Lectures pour temps maussade

Que faire d'un temps pareil ? Lire, et naturellement lire du Théâtre...

Étroits petits tours d’Adeline Picaut, trois monologues.

Et Elsa boit : Pourquoi boit-elle ? Elsa livre peu à peu son secret. Elsa a vraiment trop bu !

Un homme à la ligne, il est accro, il est désespéré, il n’a que vingt-cinq ans, il n’a pas choisi sa vie, mais il choisit sa mort.

Émoi au bord du monde, c’est une comédienne qui a une audition et qui tombe une amoureuse.

Un homme et une femme racontent, se racontent. Entre nouvelles et monologues, une nouvelle écriture théâtrale.

Editions théâtrales, ouvrage publié avec l’aide de la fondation Beaumarchais : 13, 50 €

Caravanes, sur le thème de la sédentarisation des gens du voyage, quatre auteurs, à partir d’enquêtes, restituent la parole de personnages qui se sont confiés à eux.

Chaque pièce comporte deux personnages dont les voix se heurtent, s’entrecroisent, se répondent.

Partir-Rester de Rémi de Vos, Carcan et Flèches de Fabrice Melquiot, Amérique d’Emmanuelle Marie, et Prestiges de Pauline Sales. Gilles Granouillet qui signe la préface, en a réalisé un spectacle dans le cadre des « Transurbaines ». Bouleversant !

Espaces 34 : ouvrage publié avec l’aide du CNL : 11 €

14:35 Écrit par Dadumas dans Livre, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Livres, théâtre |  Facebook | |  Imprimer