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10/01/2008

Vive Voltaire

     Quand parut L’Ingénu, en 1767, Voltaire semblait souscrire à la mode du roman sentimental. L’auteur, reprenant le thème du bon sauvage et de l’enfant retrouvé, n’y n’épargnait ni les jésuites, ni les prêtres, ni les jansénistes, ni les puissants, ni les préjugés, ni le confesseur du Roi, c’est-à-dire que le roi lui-même n’échappait pas à ses sarcasmes. L’auteur situait le début de sa fiction le 15 juillet 1689, « l'abbé de Kerkabon, se promenait sur le bord de la mer avec mademoiselle de Kerkabon, sa soeur, pour prendre le frais. ». À cette époque, on mettait les filles rebelles au couvent, et les innocents à la Bastille. La police se saisit des exemplaires. Cent ans plus tard, le 15 juillet 1789, la Bastille était prise.

     Arnaud Denis qu’on avait applaudi la saison passée avec Les Revenants d’Ibsen a, cette saison, engagé sa compagnie, les Compagnons de la chimère, dans l’aventure d’une adaptation de Voltaire, magistralement écrite par Jean Cosmos. Et c’est un grand moment de théâtre. À l’heure des foules moutonnières, des fanatiques de tous bords qui nous empoisonnent l’existence, il faut des gens sacrément intelligents pour faire rire en dénonçant l’arbitraire.

     Il faut aussi imaginer la mer, la guerre, un palais, le couvent, à partir du plateau nu. Les lumières de Laurent Béal assombrissent les murs, grillagent les cellules, « gothisent » le mur du fond en vitrail. Avec la scénographie de Mirjam Fruttiger, les voiles claquent au vent, la Rance coule vers son estuaire, les paravents d’argent de Versailles cachent les turpitudes, et la belle Saint-Yves meurt comme Atala.

     Douze comédiens interprètent une trentaine de rôles. Arnaud Denis, ne se contente pas de mettre en scène, il joue le rôle titre, et sa jeunesse, son ardeur, sa prestance font du Huron, un personnage exemplaire. L’orphelin élevé par des indiens sauvages, retrouve sa famille, est baptisé, éduqué, trahi, sauvé. Chantre de la « loi naturelle », il mène le combat contre l’hypocrisie. Autour de lui, Jacques Ciron donne au prieur de Kerkabon l’allure d’un brave prêtre. Monique Morisi, joue Crédule, vieille fille dont la sentimentalité combat la dévotion, et Romane Portail, prête sa beauté à Mademoiselle Saint-Yves, avec une passion qui émeut les spectateurs autant que les protagonistes. Géraldine Azouelos, est Henriette, dame de Cour, courtisane et maquerelle à ses heures. C’est elle qui livre la vertueuse Saint-Yves à l’abominable Saint-Pouange à qui Jonathan Bizet donne une onctuosité sournoise. Et bien sûr, il y a Jean-Pierre Leroux, qui administre la compagnie et endosse sur scène plusieurs rôles, metteur en scène-conteur, évêque, sergent, Gordon. Avec lui, Alexandre Guanse, tour à tour, régisseur, soldat anglais, laquais, jésuite, père Toutatous, déménageur, médecin. Citons encore Denis Laustriat : l’abbé Saint-Yves, Stéphane Peyran (le fils du Bailly, le garde breton, le gouverneur de la Bastille), Sébastien Tonnet (le jésuite, l’officier anglais, le commis, un déménageur, un médecin).et Geoffroy Veraghaenne : le Bailly de Saint-Malo.

     La troupe mène d’un train d’enfer le voyage de Saint-Malo à Versailles et retour. L’ironie de Voltaire légère passe dans un dialogue acéré et soutient un raisonnement sans failles.

     L’œuvre était polémique au XVIIIe siècle. Il se pourrait bien qu’elle le redevienne… « Écrasons l’infâme ! » aurait dit Voltaire. Vive Voltaire!…

 

 

 

 

L’Ingénu, d’après Voltaire, adaptation de Jean Cosmos

Vingtième Théâtre

à 21 h 30

01 43 66 01 13

Depuis le 9 janvier, jusqu’au 2 mars

 

09/01/2008

Maître Brecht

Vous connaissez tous la métamorphose éthylique de Maître Puntila, méchant à jeun, qui devient bon quand il a bu. Vous connaissez également Omar Porras et son goût pour les masques et la dérision. C’est donc en anarchiste qu’il met en scène Maître Puntila et son valet Matti, fable inspirée à Bertolt Brecht par son exil finlandais, en 1940.

Qu’il soit Sganarelle avec à Dom Juan, Sancho Pança avec Don Quichotte, Arlequin avec son (ou ses) maître (s), le valet par son bon sens, gagne sa cause auprès des spectateurs, mais perd souvent la face vis-à-vis de la société dans laquelle il vit.

Matti, qui refuse de partager un verre avec le diable, c’est-à-dire son employeur, résiste à ce traitement. Sobre dans ce qu’il absorbe, comme dans la gesticulation, Juliette Plumecocq-Mech en montre le sérieux, voire le tragique. Depuis Le Dragon d’Evgueni Schwartz, elle s’impose dans les rôles masculins de héros positif. Elle incarne la dignité d’un prolétaire quand tout le grotesque de la mise en scène charge les maîtres de veulerie. Maître Brecht eût apprécié. Dans Puntila, il n’est pas question de lutte des classes, Brecht peint la  résignation des humbles devant des maîtres despotes. Les revendications viennent des possédants et s’adressent au versatile Puntila. Juges, commerçants, ministre, nobles décavés se prêtent à toutes les bassesses. Et l’interrogation récurrente : « Qu’est-ce qu’un homme ? » sonne comme une accusation.

Les masques de Bernardo Rey, les postiches et le maquillage de Cécile Krestschmar chargent les comédiens. Puntila arbore mèche et moustaches hitlériennes. Les perruques des femmes rutilent. Les nuques plissent, les ventres prospèrent. La troupe au complet (Delphine Bibet, Jean-Luc Couchard, Camille Figuéréo, Louis Fortier, Stéphanie Gagneux, Pierre-Yves le Louarn, Fabiana Medina, Emiliano Suarez) parie sur la métaphore de l’équilibre pour souligner les palinodies acrobatiques auxquelles Puntila les soumet. Les meilleurs dessins animés ne jouent pas aussi bien avec le centre de gravité de leurs personnages. C’est stupéfiant !

Cette troupe franco-suisse, dirigée par un Colombien, interprétant un auteur allemand qui situe son action en Finlande, s’exprime avec l’accent belge. Le public glousse de joie.

Si c’est ça la mondialisation, on est pour !

Théâtre de la Ville 

Théâtre des Abbesses

jusqu'au 26 janvier

01 42 74 22 77

17:40 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Théâtre |  Facebook | |  Imprimer

03/01/2008

Hugo et Voltaire

LE FESTIVAL INTERNATIONAL VICTOR HUGO ET ÉGAUX présente en 2008  Hugo et Voltaire

 

Créé à l’initiative de la Société des amis de Victor Hugo, le Festival  international Victor Hugo et Égaux , lancé avec succès en 2007, se poursuivra du 1er février au 1er mars 2008 avec un programme très riche en événements, qui, parallèlement à Hugo,  célèbrera, cette année, Voltaire.

Fort de nouveaux partenariats prestigieux noués notamment avec le Palais des Arts de Valencia en Espagne et la Fondation L’Hermitage en Suisse, le festival se développe sur le plan international.  Les passionnés de Hugo pourront en effet entendre à Valencia l’opéra de David Alagna d’après Le Dernier Jour d’un condamné (avec Roberto Alagna et Angela Gheorghiu dans les rôles principaux) et admirer à Lausanne les dessins de Hugo. À Londres, s’ils ont la chance d’y être invités, c’est dans le cadre enchanteur de la Wallace Collection qu’ils pourront assister à un concert d’airs d’opéras ou de comédies musicales inspirés de ses pièces et de ses romans. 

En Île-de-France, Paris (la Maison de Victor Hugo, place des Vosges, l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, le Théâtre Darius-Milhaud, le Vingtième-Théâtre, etc.)  et Créteil (le Centre socioculturel Madeleine-Rebérioux) continueront à être les villes pilotes du festival, proposant de nombreuses manifestations hugoliennes et voltairiennes.  On pourra, par exemple, à Créteil puis au Théâtre Darius-Milhaud de Paris,  aller découvrir en création une comédie de Danièle Gasiglia, mise en scène par Vincent Auvet, « Moi, j’avais son amour… » ,  évocation très dynamique de moments forts de la relation entre Hugo (interprété par Michel Miramont) et celle qui lui sauva la vie lors du coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte,  Juliette Drouet (incarnée par Laurence Colussi). 

Au Centre Censier de l’Université Paris 3 se jouera une comédie savoureuse et très méconnue de Voltaire, Les Originaux, mise en scène par Didier Moine, et seront projetées de précieuses archives INA, parmi lesquelles une adaptation de  Zadig avec, dans le rôle titre, un  débutant nommé Gérard Depardieu et, dans la distribution, le jeune Pierre Arditi  que l’on retrouvera aussi dans une captation de Marie Tudor

Y sera présenté aussi le travail sur Le Théâtre en liberté d’un atelier d’acteurs de l’ANPE Spectacles et d’étudiants de Paris 3. Jean-Paul Zennacker qui en assumera la direction artistique fera entendre par ailleurs les dimensions ironique et politique de la poésie de Hugo. On se promènera  dans Paris sur les pas de Voltaire et de Victor Hugo, sous la conduite de Pierre Leufflen et d’Arnaud Laster. 

Deux cours d’interprétation du grand baryton François Le Roux  seront ouverts au public. La Péniche-Opéra accueillera le second ainsi qu’un récital de la soprano Françoise Masset, accompagnée par Françoise Tillard, consacré aux Orientales de Hugo mises en musique.  

 Les régions ne seront pas en reste avec, en Haute-Normandie, le premier Salon du livre Victor Hugo au Musée de Villequier, et un riche prolongement du festival en Région-Centre.

 Contact : festival.hugo-egaux@laposte.net 

ou 06  08 97 13 60.