Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

07/10/2011

Sacrée Femme !

 

 

La tendance est papale cet automne. Au cinéma, avec Habemus papam, Nani Moretti imagine un maelström au Vatican, avec un pape qui refuse d’assumer sa charge. Au théâtre, La Papesse américaine est à Paris après avoir fait un succès à Avignon.

Tiré d’un pamphlet d’Esther Vilar paru en 1982, et adapté par Robert Poudérou, le texte avait été créé par Eléonore Hirt. Il est toujours succulent.

théâtre,nathalie mann,robert poudérou,essaïonAujourd’hui, Nathalie Mann incarne cette femme, qui, en 2040, accède au trône de Saint Pierre. Elle triomphe, car depuis plus de deux mille ans, l’ Église catholique n’avait accepté les femmes que pour les tâches domestiques ». La légende veut qu’une femme, au IXe siècle ait berné la Curie et caché son identité sexuelle. Elle fut pape quelques mois sous le nom de Jean (la chronique n’est pas d’accord sur le quantième). Et que la supercherie fut découverte quand elle accoucha en pleine messe… Mais ce sont des médisances antipapistes, bien sûr.

En 2040, plus question de faire régner une loi « salique ». L’ Église catholique est en panne.

Plus d’ors, plus de pierres précieuses, d’aubes et de capes rebrodées, de tiare somptueuse, plus de faste, plus de conclave. Le pape est élu par ses fidèles, comme aux premiers siècles il était désigné par acclamations du peuple. Le trône est un fauteuil de plexiglas, l’impétrante est vêtue d’une longue robe noire élimée, et elle officie en studio, parrainée par la publicité.

Tout a été vendu aux banques et aux compagnies d’assurances. L’Église catholique est en ruines et a perdu cent millions de fidèles. Elle a pourtant levé tous les interdits : le célibat des prêtres, l’avortement, le divorce, l’homosexualité. Elle a montré la voie de la modestie par sa pauvreté, Elle n’a réussi qu’à renforcer les doctrines « radicales ».

La papesse Jeanne II, regard clair, verbe haut, sourire tranchant se propose de réparer les erreurs, et de rétablir le chef de l’ Église catholique dans sa fonction sacrée. théâtre,nathalie mann,robert poudérou,essaïon

Sacrée femme ! Car elle se demande si l’homme aime vraiment être libre, s’il n’y a pas, pour la plupart un confort à obéir à un Dieu, et si l’âme n’est pas stimulée par la contrainte.

Nathalie Mann est superbe. Plus diablesse que prélate, plus pétroleuse que béate, elle est intrépide. Thierry Harcourt l’a mise en scène avec sobriété et efficacité.

Entraînera-t-elle des conversions ?

 

 

Photos : Mehdi Benhafessa

 

 

 

 

La Papesse américaine d’après Esther Vilar, adaptation de Robert Poudérou

Théâtre Essaïon

Du jeudi au samedi à 20 h

Jusqu’au 14 janvier

01 42 78 46 42

 

06/10/2011

À lire (4)

 

Théâtre en livre

 

 

Chez Pierre Notte, le cercle de famille ressemble à une arène de combats. On se jauge, on s’insulte, on s’agresse. Mais que les parents déraillent ou vous quittent, on s’interroge, on ne les tient pas quittes pour autant.

Les mères sont maladroites, les fils fugueurs, les filles égocentriques et les pères coupables. Et tous ces personnages ponctuent leur quête par des chansons très dadaïstes. L’humanité est imparfaite et Dieu est absent.

Heureusement, il y a les saints modernes, les étoiles du cinéma, Catherine Deneuve, Gérard Philipe, et maintenant Liz Taylor. Heureusement, il y a les bêtes qui, avec une généreuse clairvoyance, témoignent de la cruauté imbécile des hommes. Loup, ourse, dans les pièces précédentes, voici le chien dans Sortir de sa mère. Et il reste le Théâtre !

L’animal « nottien » a remplacé le conteur brechtien.

On a gagné au change.

 

Notte  Pierre, Sortir de sa mère,  prologue de Fernando Arrabal, L’Avant-scène Théâtre, coll. Quatre-Vents, 10 €

 

 

05/10/2011

« Mésentente parfaite »

théâtre,cinéma,théâtre 71 

Ils avaient théâtralisé leurs débats, et le dimanche soir, nous écoutions Georges Charensol et Jean-Louis Bory au Masque et la Plume pour jubiler de leurs affrontements. Les querelles argumentées sont toujours tellement plus intéressantes que les plates louanges ! L’un commençait toujours par s’opposer à l’autre, et les joutes auxquelles ils se livraient suscitaient le désir d’aller vérifier la sincérité de leurs critiques. On allait au cinéma pour donner raison à Bory et tort à Charensol, ou l’inverse. Mais on avait envie d’aller au cinéma…

François Morel a eu l’idée de faire incarner ces journalistes passionnés et passionnants, par Olivier Broche (Bory) et Olivier Saladin (Charensol). Je ne connaissais que leurs voix, mais ils avaient « tout à fait la tête de Bory », et « le profil de Charensol », m’ont dit ceux qui les ont croisés à Cannes. Déjà physiquement à l’aise avec leurs personnages, les comédiens pouvaient interpréter leurs rôles avec brio. Et c’est un bonheur…

François Morel a effacé les autres intervenants du Masque et n’a gardé que les duettistes à la « mésentente parfaite ». Il les situe dans une salle de projection un peu désuète, où les deux rangées de fauteuils, incomplètes, sont séparées par un large tapis rouge. théâtre,cinéma,théâtre 71Cette frontière aisément franchissable, devient espace scénique de dispute et de réconciliation, tandis qu’au fond, la cabine de projection peut se transformer en castelet de guignol (décor d’Édouard Laug). Il a imaginé une sorte d’Ariel, esprit ludique et bienfaisant. Lucrèce Sassella au piano, tout de rouge vêtue, module et chante la « météo marine » qui précède l’émission. Elle fera le lien entre chaque séquence, où ils dissèquent un film. Elle entraîne les deux protagonistes dans des chorégraphies fantaisistes et même les tance quand ils vont trop loin : « On le fera plus, Madame », diront-ils penauds comme des enfants.

Car c’est un jeu entre eux, un duo plus qu’un duel. Ils « traquaient les engouements de la mode », dira d’eux Bertrand Poirot-Delpech qui succéda à François-Régis Bastide pour diriger l’émission.

théâtre,cinéma,théâtre 71Quand l’un est agressif, l’autre est goguenard. Quand l’un est méprisant, l’autre est généreux. Mais ils sont d’accord sur l’essentiel : le cinéma est un art qu’ils défendent avec force. Et, pour Les Parapluies du Cherbourg, lorsque l’un dit : « c’est de la guimauve ! », l’autre dit : »c’est de la romance », que le piano attaque la mélodie, les voilà « dans le film », mimant la scène d’adieu, et s’éloignant sous un parapluie (lumière de Gaëlle Malglaive). Et lorsque Bory décrit la scène finale de Cris et Chuchotements, Charensol se tait, saisi, lui aussi par la même émotion...

Quel plus bel hommage pouvait-on rendre à ces deux amoureux du cinéma ?

 

 

 Photos : Manuelle Toussaint

Instants critiques de François Morel d’après les échanges de Georges Charensol et Jean-Louis Bory au Masque et la Plume

 

Théâtre 71 à Malakoff

 

01 55 48 91 00

 

www.theatre71.com

 

Jusqu’au 23 octobre

 

 

 

puis en tournée :

 Montpellier (Théâtre Jean Vilar) : 3 et 4 novembre,

puis Feignies, Cognac, Arcachon, Divonne-les-Bains, Villefontaine, Bourges, Vendôme, Ermont, Martigues, Saint-Etienne du Rouveray, Cébazat, Besançon, Gradignan, Saintes, Les Sables d'Olonne, Deauville, Canteleu, Vienne, Beauvais, Albi, Quimper, Cesson-Sévigné, Tarbes