11/02/2012
Le pain de ménage
Il (Pierre Arditi) commence ses soirées par « moi je crois pas », et Elle (Catherine Hiegel), selon l’humeur, dit « moi j’y crois », ou « moi, pareil ». Mais quelle que soit son opinion, lui réfute, ou ratiocine, de façon à entretenir une zizanie qui tient lieu de pain de ménage.
Moi je crois pas ! de Jean-Claude Grumberg ne montre pas la discorde, seulement les désaccords d’un couple, comme si le moment de discussion stérile devenait, paradoxalement, un moment d’échanges.
Oh ! Ils regardent toujours dans la même direction... celle de la télévision. La scénographie de Vincent Tordjman les place face au public. Et dans la mise en scène de Charles Tordjman, ce sont les lumières de l’écran (lumières de Christian Pinaud), qui les réunissent. Ils ne se disent plus « je t’aime », mais, ils vivent toujours ensemble. Ils ne raisonnent plus, ils ont juste besoin de résonner. Programme télé et menu du soir règlent leur différends.
Il ricane souvent, il la raille. Elle, impassible conseille : « si ça t’énerve d’avoir tort, essaie d’avoir raison de temps en temps ». A-t-elle atteint la sérénité ? Elle n’en est pas loin, car si on la soupçonnait d’indifférence, la dernière scène, bouleversante, jette un regard plus tendre sur elle et lui…
Avec Catherine Hiegel, maussade, bourrue bienfaisante, et Pierre Arditi, rugueux, ombrageux, exaspérant de mauvaise foi, l’auteur ne pouvait rêver meilleurs interprètes. Et ces petits bourgeois franchouillards, arrogants, peureux, affichant un scepticisme teinté de crédulité, à qui ressemblent-ils pour qu'on en rie autant ?
Moi je crois pas ! de Jean-Claude Grumberg
Jusqu’au 24 mars à 18 h 30
Théâtre du Rond-Point
01 44 95 98 21
23:08 Écrit par Dadumas dans humour, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, grumberg, arditi, humour | Facebook | | Imprimer
Rire de tout
Dans Le Gros, la Vache et le Mainate, de Pierre Guillois, il y a bien sûr un mainate, un vrai qui vole vers le public. Il ne parle pas, il chante les rengaines de Luis Mariano. Il y a un petit gros sympa : Xavier (Olivier Martin-Salvan) qui chante sa joie d’être papa, enceint des œuvres de Paul (Pierre Guillois en alternance avec Gregory Gerreboo). Et la vache ? Qui fait la vache ?
Dans cette « opérette barge », qui rivalise avec Hellzapoppin de Henry C. Potter, un des chefs d’œuvre de l’absurde au cinéma, pas de ruminant, mais une tante Schmurtz (Jean-Paul Miel) qui dit « Meuh non ! » à moins que ce ne soit la tante Chose (Pierre Vial) qui le répète. Il y a aussi un beau jeune homme qui s’effeuille, Luca Oldani, comédien et strip-teaser.
Nous avons promis à Bernard Menez, le metteur en scène, de ne rien dévoiler des mystères du spectacle. Mais sachez qu’avec des situations tragiques, des personnages méchants, des situations catastrophiques, l’équipe conduit le public à rire de tout… jusqu’au délire.
Le pianiste, Chris Cody (ou Laurian Daire) les accompagne, et François Fouqué signe la composition musicale et Sophie Tellier la chorégraphie.
Attention aux cœurs purs, l’auteur ne respecte ni l’enfance, ni la maternité, ni la fidélité, ni la vieillesse, ni la mort. Jean-Paul Muel adore jouer les vieilles dames indignes, et Pierre Vial qu’on avait déjà vu chez Vitez, (Les Burgraves) se livrer à une interprétation extravagante de la sorcière Guanhumara, retrouve ici une seconde jeunesse.
On vous dira peut-être que c’est de mauvais goût, mais rappelez-vous qu’au théâtre il n’y a qu’un seul mauvais genre : le genre ennuyeux. Et là, on ne s’ennuie pas une seconde !
photos : David Siebert
Le Gros, la Vache et le Mainate, opérette Barge de Pierre Guillois
Théâtre du Rond-Point
Jusqu’au 3 mars
01 44 95 98 00
16:47 Écrit par Dadumas dans cabaret, Musique, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, cabaret, musique, théâtre du rond-point | Facebook | | Imprimer
01/02/2012
Au royaume du dollar
Carlos Ponzi a réellement existé. Il a donné son nom à un système frauduleux appelé « chaîne de Ponzi », dont vous trouverez le modèle mathématique sur la Toile. Et, si David Lescot dans Le Système Ponzi, prend quelque liberté avec la véritable histoire de cet escroc insigne, il en retrace le parcours exact et montre le mécanisme d’une des plus grandes escroqueries du siècle dernier, dont Bernard Madoff, plus récemment, semble s’être inspiré.
Avec dix comédiens, dont quatre sont aussi musiciens, l’auteur, qui signe aussi la mise en scène et la musique, fait jouer plus de cinquante personnages.
Au royaume du dollar, petits employés, artisans, commerçants, fonctionnaires, prêtres, tous rêvent de gagner beaucoup en investissant peu. Il rêvent de devenir riches, très vite, et ne cherchent pas à connaître les rouages de la spéculation.
Tous cupides et candides. Aussi, Ponzi (Scali Delpeyrat) semble-t-il moins coupable qu’eux, tout occupé qu’il est à satisfaire les clients qui le pressent, et Rose (Céline Millat-Baumgartner), la femme qu’il aime.
Elizabeth Mazev, Charlie Nelson, Odja Llorca, Jean-Christophe Quenon, Marie Dompnier, Clément Landais, Virgile Vaugelade, et l’auteur en personne, entraînent le spectateur dans un voyage épique à travers deux continents (Europe et Amérique), quatre pays (Italie, Canada, Etats-Unis, Brésil), et soixante ans d’Histoire. Adresses au public, récit choral, mimes, cabaret, théâtre, l’action fait feu de tous genres.
Malheureusement pour le spectateur, l’ensemble est un peu long et quelquefois répétitif. Dommage, car le début est flamboyant, rythmé, exceptionnel, et les comédiens brillants.
Le Système Ponzi de David Lescot
Théâtre de la Ville au Théâtre des Abbesses
Jusqu’au 10 février
01 42 74 22 77
16:56 Écrit par Dadumas dans Livre, Politique, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, david lescot, théâtre de la ville, théâtre politique | Facebook | | Imprimer