24/09/2011
La Femme qui cause
Avec La femme qui frappe, nous voici revenus en « un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître », celui des machines à écrire. L’auteur, Victor Haïm, qui ici, met aussi en scène, situe l’action au moment où l’homme a marché sur la lune. Et plus précisément, le lendemain de la fameuse nuit du 21 juillet que « la femme qui frappe » (Marianne Soumoy) a passé à taper le manuscrit d’un roman « long comme la Bible racontée par un bègue à quelqu’un qui est dur de la feuille. ». Douze mille pages !
Elle semble épuisée, les courriers porteurs de nouveaux feuillets se succèdent. Mais nécessité fait loi, et si elle trime comme une damnée, c’est pour pouvoir acheter le sapin de son bien-aimé, qui, pour l’instant repose, dans une paix précaire, sur le divan de son triste logis.
Et elle est scrupuleuse, elle hésite devant une virgule. Elle se permet de déranger l’auteur… Il est d’abord gentil, alors, elle ne frappe plus, elle cause. Elle s’épanche, et l’autre au bout du fil, l’humilie.
Marianne Soumoy met dans son personnage la gouaille populaire d’une Arletty, elle y met aussi du désespoir, de la colère. Elle est « épatante, cette petite femme-là » !
On vous annonce un « cauchemar drolatique », vous vivrez avec cette farce noire, la vie d'une femme qui se débat pour garder la dignité qu’un homme méprise, et pourtant, vous en rirez ! C’est tout l’art de Victor Haïm !
La femme qui frappe de Victor Haïm
Ciné 13 théâtre
01 42 54 15 12
23:12 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, victor haïm, marianne soumoy | Facebook | | Imprimer
22/09/2011
" Sans blague ! "
Quelques mesures d’un limonaire le précèdent. Puis Brock entre par la salle, valise à la main et, sur la tête, un drôle de petit chapeau tyrolien à plumes. Il salue les spectateurs « Ah ! C’est toi ! » « C’est nous ! ». Il offre une plume, il grimpe sur scène. Une guirlande de lampes s’allume, comme pour le bal du 14 juillet. Mais ce soir, c’est le « bal d’Obaldia », le roi de la soirée, et le petit homme jovial qui l’ouvre, est un drôle de clown, tantôt Auguste, tantôt clown blanc, en passe de devenir le roi des clowns, comme le célèbre Grock dont son pseudonyme s’inspire.
Brock, nous l’avions entendu d’abord en voix off, bruiteur, complice de Victor Haïm dans La Peau d’un fruit. Puis il enchanta les Fantaisies de Stéphanie Tesson, chaque année, à Versailles et dans des jardins remarquables. Et en juin dernier, il fut le comédien protéiforme de sa revue d’un monde en vrac. Il change de voix, il change de sexe, il change d’époque, de personnages, il est humain, animal, végétal, il est une troupe théâtrale à lui tout seul. « Sans blague ! »
Stéphanie Tesson, pour le festival Obaldia, a cousu des textes choisis de notre Immortel*, et, les a confiés à Brock, pour un florilège poético-naturalo-érotico-caustique. Qu’il soit râleur réactionnaire : « que des manchots ! des impotents ! », mère désabusée, star déchue, aventurier désabusé : « laissez-moi reposer sur le ventre des veuves ! », suborneur de pucelles, petit nègre qu’on « trouvera bien le moyen d’expulser », Brock joue tout avec brio. Et René de Obaldia glissant d’un genre à l’autre avec un anarchisme éblouissant, le maître a trouvé en lui l’interprète idéal.
Presque pas de décor : une table de bistro, une chaise, un porte manteau, Stéphanie Tesson installe et dirige son comédien avec art et simplicité, les lumières de Florent Barnaud donne la tonalité, la musique de Frédéric Ozanne, le tempo.
C’est un début de soirée pour spectateurs gourmets. On peut enchaîner avec Du vent dans les branches de sassafras. Et croire de nouveau que la vie vaut la peine d’être vécue…
* René de Obaldia a été élu à l’Académie-Française en juin 1999.…
Au bal d’Obaldia, florilège de textes de René de Obaldia
Du 21 septembre au 23 octobre
Théâtre du Ranelagh à 19 h, en alternance avec L’Amour à trois
01 42 88 64 44
16:08 Écrit par Dadumas dans humour, langue, Musique, Poésie, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : théâtre, rené de obaldia, stéphanie tesson, brock | Facebook | | Imprimer
21/09/2011
Tempête en Alaska
Le blizzard souffle en rafales menaçantes (Ambiance sonore : Axel Lussiez) quand Rosannah (Isabelle Duperray) trouve enfin refuge. Il était temps ! Avec sa robe de mariée en soie (costumes : Valérie Montagü) et ses escarpins bordés de dentelle, elle risquait la mort. Elle est glacée, affamée, n’a pas dormi depuis des jours. Elle reprend vie dans la chaleur d’une habitation rudimentaire, genre cabane de trappeur. Elle s’écroule au moment où s’éveille le propriétaire des lieux, un certain Henry (Norbert Ferrer), qui y vit comme un ermite.
« La scène est le lieu des conflits », répétait à l’envi Anne Ubersfeld qui fut un remarquable professeur de théâtre. Rosannah est raffinée et bavarde. Henry est du style taiseux et balourd. Tout est donc pour le mieux dans la meilleure dramaturgie possible.
Lorsque la belle se réveille, qu’elle a troqué ses vêtements de fête contre des nippes informes et des godillots, il faudra bien qu’elle explique cette cavale insensée depuis l’Arizona jusqu’à l’Alaska. Il faudra bien qu’il avoue ses éternels remords pour expliquer cette retraite au bout du bout du monde. Il vont se trouver des points communs, et surtout s’apercevront qu’ils ont besoin l’un de l’autre.
Avec peu de moyens, dans un petit théâtre de Montmartre, cette jeune équipe réussit le pari d’une charmante création. Allez l'encourager… Émotion garantie pour un public de tout âge.
Une lueur en Alaska (Brilliant Traces) de Cindy Lou Johnson
Traduction de Blandine Pélissier
Le Funambule Montmartre
du Mardi au Samedi à 21h30
jusqu’au au 29 octobre 2011.
01 42 23 88 83
15:18 Écrit par Dadumas dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, isabelle duperray, norbert ferrer, funambule | Facebook | | Imprimer