Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/01/2009

Dieu habite Hébertot

 

On nous avait dit, il y a trois ans : « Dieu habite Düsseldorf ». C’était sans doute provisoire, car depuis huit jours, Il apparaît tous les soirs sur la scène du Théâtre Hébertot. Oh ! Il n’a rien du Père Éternel des images saint-sulpiciennes. Mais tout de même, Il produit des miracles… Et, en temps de crise, quand on ne sait plus à quel saint se vouer, il vaut mieux s’adresser directement au chef, n’est-ce pas ?

Figurez-vous un certain Alain Kraft (Patrick Chesnais), enrichi dans l’immobilier, et qui se présente dans son agence bancaire pour retirer cinq cents euros. Il est pressé, un guichetier renfrogné (Sébatien Thiéry) le fait attendre.

Du vécu ! Rien d’anormal.

Mais peu à peu l’atmosphère devient pesante. Il apprend que la banque n’est plus française, que la direction est aux Indes, et soumise aux lois indiennes. « C’est New Delhi qui débloque la porte ! »

Vous avez sans doute entendu parler de telles cessions. Vous en riez, mais de peur d’en pleurer bientôt…

Une secrétaire zélée (Josiane Stoléru) lui demande ce qu’il compte faire de ces cinq cents euros, refuse d’accéder à sa demande, et la porte d’entrée reste obstinément verrouillée. Son compte est bloqué, un interrogatoire commence, suivi d’incarcération provisoire. De quoi est-il coupable ?

Ses parents étaient ouvriers, il est devenu commerçant : il a changé de caste. Il va être condamné pour cette trahison. Il se dit que « c’est un cauchemar ». Il se demande si ce guichetier « existe vraiment », s’il existe lui-même. « Vous existez, puisque vous avez peur », lui répond le guichetier qui porte le même prénom que lui. Kraft tente de le soudoyer.

Mais que peut demander ce petit employé, enfermé le jour dans l’agence, et qui dort dans le sous-sol, parce que se loger où il veut, c’est « trop cher », et où il peut « c’est trop triste » ? À force de résignation, il est devenu « insensible », et ce qu’il souhaite c’est « un câlin », « un p'tit bisou », être aimé, quoi ! Pour se sentir vivre ! Même chanson chez la secrétaire, en plus direct : « Tu m’sautes, j’te laisse sortir »…

Kraft est incapable de les satisfaire. Il doit se résoudre à attendre l’arrivée de sa mère (Anna Gaylor) laquelle semble accepter l’incongru de la situation. Elle ne s’étonne de rien la maman poule qui rassure son grand gaillard éperdu d’angoisse ! Et, comme au vu des résultats de l’enquête, le « ratio de réussite » de ce dernier est de 64, 3 %, ou il partage « ce qu’il a pris aux autres », ou il demeure prisonnier…

Le sketch délirant, inclus dans Dieu habite Düsseldorf, est devenu Cochons d’Inde, une des meilleures comédies de la rentrée. L’auteur, Sébastien Thiéry qui excellait dans la pièce courte, réussit une longueur de belle envergure. Sous la direction d’Anne Bourgeois, assistée de Sonia Sariel, les personnages prennent vie dans le décor clair, très vériste, de Stéfanie Jarre, et les lumières crues de Gaëlle de Malglaive. Les comédiens sont parfaits dans cet univers à la fois fantastique, absurde et réaliste. Les répliques fusent, hilarantes, mais désespérées. Cet homme, pris au piège d’une mondialisation démente, ne nous ressemblerait-il pas ?

Et Dieu dans tout ça ? Il (Partha Majumder) arrive à son heure, souriant et efficace.

Vous allez L'adorer !

 

 

 

 

Cochons d’Inde de Sébastien Thiéry

Théâtre Hébertot

01 43 87 23 23

Du mardi au samedi à 21 h

Matinées le samedi à 18 h

Dimanche à 16 h

21/01/2009

Réveillez-vous, v’là les FranJines !

 

 FranJines ? Voilà mon ordinateur qui proteste ! Ça ne s’écrirait pas comme ça ! Qu’est-ce qu’il en sait l’ignorant ? FranJines, c’est avec un J comme Jacques et je vais l’ajouter à sa mémoire limitée. Il faut le comprendre, le pauvre ! Il n’était même pas conçu du temps où les Frères Jacques entamaient une tournée internationale. En pleine guerre froide, par leur façon de jouer leurs chansons, ils réchauffaient les relations entre les peuples désunis.

Ils nous avaient quittés au début des années 80. Ils ont fait des émules. Après le quatuor masculin, voici les FranJines, qui renouvellent le genre avec une « facétie musicale ». FRERESJACQUESphoto1(H.Marcouyau).jpgElles ont gardé les gants blancs, mais renoncé au chapeau melon. Sur la tenue basique noire, elles ont enfilé un gilet de couleur comme leurs maîtres. Les leurs sont asymétriques. Marièle Chartier est « Bleu », Myriam Allais, « Rouge », Angélique Dessaint, « Jaune », Ève Druelle, « Vert ». Et de leurs voix colorées, elles forment un ensemble parfaitement ajusté dans le moindre geste et subtilement accordé dans le quart de ton et le huitième de mesure…

Pas de nostalgie, mais un hommage dynamique à leurs aînés. Sous la conduite de leur pianiste : Sophie Rieger qui joue la maîtresse d’école, les quatre espiègles suivent le chemin de la vie, de l’enfance à… plus tard, de La Confiture aux « souvenirs sur papier glacé » : La Photographie. Elles jouent certaines chansons, y ajoutent trois textes des Exercices de style, et ressuscitent Queneau, Prévert, Francis Blanche et Boris Vian. Les FranJines marquent des pauses ironiques dans leur récital, avec les images d’animation réalisées par Lisa Paclet. Taquines, dynamiques et tendres, elles vont vous séduire. Je vous les recommande.

Le bonheur n’est plus dans le pré, mais sous les combles du Théâtre des Variétés !

 

 

Frères Jacques…Dormez-vous

Petit Théâtre des Variétés

Du mardi au samedi à 19 h 30

01 42 33 09 92

                                                                                                                                                                                                                                      photo H.Marcouyau

 

19/01/2009

Une Célestine diabolique

La Célestine est une œuvre singulière : mi-roman, mi-drame, écrite et publiée anonymement au XVe siècle, elle se passe à Tolède, quand l’Inquisition emprisonne les âmes et dresse des barrières pour surveiller les mœurs. Elle porte en sous-titre : « tragi-comédie de Calixte et de Mélibée ». La tentation était donc grande de l’adapter à la scène. On y succomba. Une des plus remarquables, jouée à Avignon, il y a quelque vingt ans, tirait l’œuvre vers la tragédie. Celle d’Henri Lazarini choisit surtout le côté picaresque.

PHOTO%20CELESTINE%20(Biyouna%20et%20Myrian%20Bella).jpgLa Célestine (Biyouna), mère maquerelle, faiseuse d’anges, raccommodeuse de virginité, sorcière à l’occasion, marchande par nécessité, règne sur le monde des prostituées : Elicia (Rona Hartner), Areusa (Éloïse Labro), des soldats de fortune : Centurion (Didier Lesour), des valets cupides : Sempronio (Luis Rego), Parmeno (Gaspard Legendre), Lucrecia (Céline Caussimon). Cet univers corrompu et corrupteur n’épargne personne et engloutit la pureté de Mélibée (Myriam Bella), et l’amour de Calixte (Tristan Lhomel).

Nous n’entendrons pas la souffrance de Plébério, père noble désespéré, mais nous verrons le Mal sous le masque de la dévotion, la sensualité qui avilit, les ma chinations des uns et des autres, l’argent maître de l’honneur. La scénographie de Xavier Lazarini, (co-metteur en scène avec l'adaptateur) épure le décor, allège les costumes, simplifie l’intrigue.

Biyouna, incarne une Célestine arabo-hispanique terrible et superbe, madrée, rugueuse, diaboliquement hypocrite. Les valets sont enjoués, les prostituées friponnes. Mais d’où vient qu’on ne croie guère à l’amour de Calixte et de Mélibée ?

 

 

 

La Célestine de Fernando de Rojas

Adaptation Henri Lazarini

Du 14 janvier au 1er mars

Vingtième Théâtre

01 43 66 01 13