11/05/2013
Notre Dame des Amours
Hippolyte Wouters écrit en alexandrins, comme au Grand Siècle, celui de Ninon de Lenclos, qui devient sous sa plume l’héroïne d’une comédie. La belle courtisane, ne fut pas un parangon de vertu mais en femme cultivée et intelligente, elle tint, jusqu’à sa mort en 1705, un salon très fréquenté. On s’y disputait ses faveurs et elle fut célébrée sous le nom de Notre-Dame des Amours. Elle aurait, dit la chronique, eut une liaison avec le chanoine Gédouin (Sacha Petronijevic) à 77 ans !
Encapuchonnée de taffetas cramoisi, Ninon de Lenclos (Cyrielle Clair) le reçoit. Dans la pièce de Wouters, Ninon se refuse, mais lui raconte ses péchés, ses amours avec le marquis de Villarceaux (Sylvain Clama), ses démêlés avec Madame de Maintenon (Pauline Macia). Elle se vante d’ « aimer le prochain comme le précédent » et de « toujours chercher l’utile en faisant l’agréable. »
Les toilettes de Cyrielle Clair enchantent les spectatrices, et son charme les conquiert. Françoise d’Aubigné, dame de Maintenon n’a pas le beau rôle, mais on est venu pour se distraire et le pari est gagné.
Photo : © LOT
Ninon de Lenclos de Hippolyte Wouters
Théâtre des Mathurins
Depuis le 30 avril, du mardi au samedi à 19 h
01 42 65 90 00
22:49 Écrit par Dadumas dans Blog, culture, Histoire, Littérature, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, littérature, théâtre des mathurins, cyrielle clair | Facebook | | Imprimer
30/03/2013
Concerto en bleu
Jean Echenoz, dans son Ravel retrace les dix dernières années du musicien et le montre fragile mais fringant, toujours élégant, distant et susceptible.
Anne-Marie Lazarini, aime les auteurs qui « sont capables de toucher la réalité du bout d’un doigt pour qu’elle existe » et elle met en scène le roman (avec très peu de coupures). Une narratrice (Coco Felgeirolles) et un narrateur (Marc Schapira) se relaient. Ils accompagnent un Ravel (Michel Ouimet), tout de blanc vêtu (costumes de Dominique Bourde). Le plateau baigne dans un bleu atemporel et apaisant qui laque le piano, les maquettes, le transat, la carcasse réinventée d’une Peugeot, le fauteuil club, une baignoire, le bastingage du France, tous les accessoires (décors et lumières de François Cabanat).
Andy Emler, au piano, est le soliste de ce « concerto en bleu ». Il a composé My own Ravel avec des rythmes qui évoquent Ravel, des extraits des œuvres du maître, et des musiques qu’il aimait : Gershwin et Stravinsky. Il illustre et soutient ainsi le parcours des dix dernières années de Ravel, de la gloire au crépuscule.
Nous découvrons Ravel dans sa thébaïde de Montfort-L’Amaury, nous le suivons dans son voyage transatlantique sur le paquebot France, sa tournée aux U. S. A., sa fascination pour le jazz, ses insomnies, son ennui chronique. La narratrice devient Hélène Jourdan-Morhange, Marguerite Long, Ida Rubinstein. Le narrateur, joue aussi Georges Jean-Aubry, le commandant du France, son ami Zogheb, ou Wittgenstein, mais toujours sur le mode du récit : « il », et jamais « je ».
C’est une très judicieuse manière de mettre entre l ‘action et le comédien cette distance conforme au personnage Ravel qui ne montre jamais d’émotion, ne doute jamais de lui. Cependant, le succès fleurit là où le musicien ne l’attendait pas : ce Boléro, cette partition « qui s’autodétruit » et qui « marche extraordinairement. »
Puis vient la douloureuse descente aux enfers de la maladie, l’inquiétude impuissante de ses amis, la mort.
Anne-Marie Lazarini a su donner à sa transposition le mystère qui entoure le secret et la magie du compositeur. Parmi les créations théâtrales de la saison, celle-ci est un heureux miracle.
Photos : © Lot
Ravel de Jean Echenoz d’après le roman paru aux éditions de Minuit
Adaptation et mise en scène d’ Anne-Marie Lazarini
Théâtre des Artistic-Athévains
01 43 56 38 32
depuis le 27 mars jusqu’au 5 mai, puis du 15 novembre au 22 décembre
Tout Echenoz
(week-end de lectures, films, concert, exposition, causerie, librairie)
le samedi 13 avril à partir de 12 h
et dimanche 14 avril à partir de 14 h
www.artistic-athevains.com
23:38 Écrit par Dadumas dans Blog, culture, Littérature, Livre, Musique, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : théâtre, littérature, artistic athévains, echenoz, anne-marie lazarini | Facebook | | Imprimer
22/03/2013
Au coeur de la bataille
Ce siècle avait douze ans, et pour conquérir la plus haute magistrature de la République, beaucoup de Bonapartes, de l’extrême gauche à l’extrême droite, nous ont cité Victor Hugo. Les citations étaient souvent exactes, mais quelquefois tronquées, et toujours décalées dans l’espace et le temps. Il était donc logique que la Maison Victor Hugo se propose de retracer « le parcours politique » du poète.
Martine Contensou et Vincent Gille, commissaires de l’exposition, ont construit pour 2013, une exposition autour des grandes idées qui ont fait de la vie de Victor Hugo un combat contre la peine de mort, la misère, la violence en politique, le travail des enfants et pour la justice, l’enseignement et la laïcité. Des œuvres du poète, côtoient celles qu’il a inspirées : tableaux, gravures, sculptures, dessins, journaux, brouillons de discours, affiches, lettres, précieuses éditions, illustrent la chronologie d’un destin.
Le jeune Hugo, élevé par une mère royaliste doit ses premiers succès (et ses premières rétributions) à des poèmes glorifiant la Restauration. À la mort de sa mère, il découvre, l’épopée napoléonienne avec son père, Léopold Hugo, général d’empire en demi-solde.
Déjà, il fait tache chez les conservateurs. Il est hostile à la peine de mort, il parle d’éduquer le peuple, et, dans ses pièces, ses romans, dénonce l’injustice, l’arbitraire, l’hypocrisie des prêtres et des grands de ce monde. Son roman, Claude Gueux fait scandale, sa pièce Marion de Lorme est censurée, Le roi s’amuse est interdite.
Il est, sous Louis-Philippe, le chantre des révolutionnaires de 1830 - « Ceux qui pieusement sont morts pour la Patrie » - célébrés au Panthéon et le poète du retour des cendres de Napoléon Ier.
Il est élu à l’Académie française (1841), il devient pair de France (1845), mais le conservateur trahit définitivement sa caste. Depuis longtemps déjà il parlait de liberté et de fraternité, il va en faire une priorité pour résoudre les questions sociales. Il est alors au coeur de la politique, au coeur de la bataille. Il s’oppose au soulèvement populaire de juin 1848, mais il vote contre celui qu’il tient pour responsable de sa répression sanglante, le général Cavaignac candidat républicain. Cependant, quand Louis-Napoléon Bonaparte viole la constitution, Hugo appelle à l’insurrection. Il prend en exil, la stature de l’opposant irréductible à l’empire. Avec Napoléon le Petit et Les Châtiments (édités en Belgique) commence la lutte de l’écrivain contre tout pouvoir autoritaire.
Il est alors "le" républicain, défenseur de toutes les libertés, que toutes les minorités sollicitent, et qui il tente d’obtenir la grâce des condamnés à mort aux États-Unis, comme en Irlande.
Revenu en France en 1870, il partage les souffrances des Parisiens pendant le siège et contribue à l'effort de guerre. Élu en 1871, il démissionne parce que l’élection de Garibaldi, né à Nice, est invalidée. Son fils Charles meurt brutalement, et le 18 mars 1871, premier jour du soulèvement de la Commune, les insurgés laissent passer le cortège funèbre. Hugo est en Belgique pendant la pendant la Commune. « Je suis pour la Commune en principe, et contre la Commune en application », écrit Hugo le 28 avril.
Il n’approuve la violence ni du côté des insurgés, ni du côté des Versaillais. Opposant farouche aux condamnations à mort, il réclame l’amnistie dès 1871. Il mettra dix ans pour l’obtenir. Il est alors sénateur.
Bel itinéraire que celui d’un homme issu de la bourgeoisie, qui aurait pu rester conservateur avec les siens, et qui, par amour de la justice, de la liberté devient « révolutionnaire », par « évolution », se déterminant toujours par rapport « à ce qu’il voit, à ce qu’il ressent. »
Quand elle vint à Paris, Aung Suu Kyi déclara : « J’ai dit qu’une véritable révolution était une révolution de l’esprit et c’est pourquoi je tiens autant à Victor Hugo, car il a compris que toute véritable révolution part de l’intérieur ». Aujourd’hui, l’exposition lui est dédiée.
Photos : © Danièle Gasiglia-Laster
Hugo politique
Exposition dédiée à Aung Suu Kyi
maison Victor Hugo
6, Place des Vosges
du 14 mars au 25 août 2013
www.musee-hugo.Paris.fr
Conférences à la Maison de Victor Hugo de la place des Vosges, en marge de l’exposition Hugo politique :
17 avril : Hugo, 1848 et Histoire d’un crime, par Eric Hazan, historien, directeur des
éditions La Fabrique
15 mai : Victor Hugo, la peine de mort et la pénalité par Robert Badinter, ancien ministre
29 mai La question sociale et la question politique autour de 1848-1852 par Thomas Bouchet, historien, université de Dijon
5 juin Hugo orateur politique par Marieke Stein, université de Metz.
Entrée libre dans la limite des places disponibles. Inscriptions obligatoires au 01 42 72 71 52 ou à florence.claval@paris.fr
14:59 Écrit par Dadumas dans Blog, éducation, exposition, Littérature, Poésie, Politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : exposition hugo politique, maison victor hugo, littérature | Facebook | | Imprimer