06/03/2015
Noël joyeux
Ils sont six en coulisses et douze sur scène ! Non ce n’est pas le miracle d’un nouveau prophète, c’est Noël au balcon qui consacre le génie comique d’un auteur nouveau : Gilles Dyrek.
Nouveau ? Pas pour tout le monde ! Car en 2002, La Touche étoile avait fait 600 représentations, et en 2003, Venise Sous la neige 1 500, rien qu’à Paris. Et on ne compte pas les tournées, et les traductions en Allemagne, en Espagne, Finlande, Norvège, Tchéquie, Slovaquie, Autriche…
Disons donc qu’avec Noël au balcon, sa nouvelle pièce, il s’établit parmi les meilleurs auteurs comiques français.
Pour un Noël, c’est un Noël joyeux … pour les spectateurs !
Vous aviez sans doute lu ma note de lecture enthousiaste du 21 février. C’était insuffisant pour vous dire le bonheur d’une pièce réussie.
Je réitère. L’auteur en assure la mise en scène avec une équipe extraordinaire.
Imaginez deux balcons frontaux, dans une résidence moderne (décor de Caroline Mexme). Pour le réveillon de Noël, le balcon sert de desserte. On y a entreposé des boissons ou des plats, et la maîtresse de maison, ou son mari, vient les chercher. Il y a aussi les invités, tous de la famille, qui viennent s’isoler, pour un coup de téléphone, une explication, ou… une engueulade ! Eh oui ! C’est ainsi dans toutes les familles.
Séverine Debels est l’hôtesse, Éliane, pour la famille du balcon de gauche et Marjorie, la fille « instable » du balcon de droite. Elle critique, elle juge, elle jauge, parfaite dans les deux rôles. Florence Savignat est Solange, la belle-mère d’Éliane, perspicace, un brin soixante-huitarde, elle devient Anne-Cécile, enceinte jusqu’aux dents, dans l’autre famille. Elle a le ton cassant d’un côté, l’air attendri de l’autre : mention très bien.
Benjamin Alazraki est naturellement Benjamin, le fils d’Éliane, un petit garçon qui croit encore au père Noël et obéit à maman, mais sur l’autre balcon, il est Hubert, le maître de maison qui ne maîtrise plus rien du tout, ni son père, ni sa sœur, ni son frère, ni surtout l’accouchement de sa femme. Excellent !
Éric Mariotto est Sébastien, l’ado en pleine crise gothique qui trimballe un furet dans sa manche. Dissimulé sous une capuche cloutée, il a la voix qui mue, il ne regarde personne et attaque les attitudes des siens. Il obtient un triomphe dans ses jugements imagés : « L'horreur se mêle à la petitesse des esprits, et la putréfaction du climat côtoie la médiocrité de l'éphémère. » Impitoyable et inénarrable ! Quand il passe sur le balcon de droite, il devient Bernard, le frère célibataire de Hubert, celui qui pose les questions indiscrètes, veut jouer les boute-en-train et dont les blagues tombent à plat. Et pourtant, ce mal aimé sait parler d’amour à Éliane et chapitrer le mari indifférent. Très drôle et très émouvant.
Justement, parlons-en de ce mari : Patrick ! Il flanque la dinde par terre, laisse tomber la bûche et comme les grands faibles prend des colères terribles. C’est Xavier Martel, qui, dans l’autre famille est Christophe, le nouveau fiancé de Marjorie qui en est à son troisième Christophe. Beaucoup de finesse dans ces rôles contrastés. Il sait gagner la sympathie du public.
Alexis Victor interprète Etienne, le père de Sébastien, angoissé par les appels téléphoniques d’une femme qui s’accroche et les lubies d’un adolescent sans repères. Il est aussi Jacques, le grand-père indigne dans l’autre famille. Deux beaux personnages qu’il incarne avec brio.
Ajoutez que cette joyeuse bande navigue d’un balcon à l’autre avec aisance, réussissant le pari fou de jouer deux rôles sans manquer un seul effet.
« Mort de rire », disent les enfants ! J’en suis sortie bien vivante, joyeuse et heureuse : je n’avais pas autant ri depuis des lustres !
Noël au balcon de Gilles Dyrek
Café de la Gare à 21 h
01.42.78.52.51 (10h30-18h30)
Noël au balcon est publié aux éditions de La Traverse
Venise sous la Neige et La Touche étoile aux éditions de L'avant-Scène Théâtre
17:24 Écrit par Dadumas dans Blog, humour, Livre, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer
21/02/2015
À lire et à voir
Vous avez déjà vécu des rencontres familiales catastrophiques, où vous étiez arrivés pleins de bons sentiments et de bonnes intentions et d’où vous étiez partis l’injure aux lèvres et la rancœur chevillée à l’âme. Gilles Dyrek, maîtrise joyeusement ces conflits, ces disputes. Il évite, sur le fil du rasoir, les drames qui pourraient devenir sinistres et ramène toujours l’espoir.
Dans Noël au balcon qui vient d’être créé au Café de la Gare, il nous fait la démonstration brillante que nous pouvons tous sortir indemnes, ou presque, de toutes les situations désespérées.
Grand-mère grincheuse, grand-père tendance alcoolo, père volage, ado en crise, enfant capricieux, mari maladroit, femme surmenée, sœur instable, tous les spécimens de fauteurs de mésentente sont réunis pour Noël dans deux familles différentes, mais qui vont se retrouver sur les balcons de leur résidence. La dinde est trop sèche, la bûche renversée, le Père Noël a sifflé trop de champagne et Anne-Cécile est prête à accoucher…
C’est joyeux, dynamique, caustique, mais jamais méchant. Gilles Dyrek a de l’humour, un œil lucide sur ceux qui l’entourent, et de la tendresse pour ses personnages, ses pères paumés, ses femmes épuisées, ces hommes un peu balourds et tellement touchants, tellement naturels…
Les Éditions de la Traverse ont la bonne idée de publier le texte de cette pièce. Découvrez-la, lisez-la, vous aurez envie de la voir… ou de la jouer.
Noël au balcon de Gilles Dyrek
Fréquence Théâtre N°58, prix : 12, 50 €
Éditions de la Traverse
En ce moment au Café de la Gare à Paris dans une mise en scène de l’auteur.
22:57 Écrit par Dadumas dans Blog, humour, Livre, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer
13/02/2015
Pêcheurs et prêcheurs en eaux troubles
Vous connaissez sans doute Gabriel Lecouvreur dit « Le Poulpe » à cause de ses grands bras mobiles qui assomment ses adversaires. Le personnage, créé par Jean-Bernard Pouy, a maintenant plus de vingt ans et deux cent quatre-vingt six aventures au compteur. Défenseur de causes perdues, pourfendeur de nazis et autres associés, grand amateur de bières et de vieux coucous déglingués, Le Poulpe est un anarchiste qui traîne dans des coups pas très politiquement corrects où il remet à leur place les fauteurs d’injustice. Depuis 1995, Le Poulpe est réinventé régulièrement par des auteurs différents. Ils se laissent guider par leur affinités mais obéissent à des règles précises : celle du fait divers, et de la contrainte, naissent de périlleuses et savoureuses entreprises.
La quartier général du Poulpe est le rade de Gérard, Le Pied de porc de Sainte-Scolasse, et c’est sans doute à ce comptoir que Abbi Patrix le conteur, justicier à ses heures, Phil Reptil (guitare et musique électroacoustique) et Vincent Mahey (musicien, ingénieur du son) se sont retrouvés pour inventer un nouvel épisode à ses aventures.
Tous les trois nous emmènent jusqu’à l’île de La Réunion, en passant par Rungis et retour chez Gérard pour un "polar électro-conté". Pas de combat spectaculaire, tout est dans les mots, la voix, la musique et une bande son hautement suggestive. On entend les rumeurs de Rungis, les tumultes des foules subjuguées par un prêcheur, les chants des oiseaux, les gazouillis du ruisseau, les vrombissements des moteurs, les craquements du bateau. C’est inventif, concret, dynamique et jubilatoire.
À la fin, le prêcheur et les pêcheurs en eaux troubles sont punis et Le Poulpe mérite toute notre reconnaissance.
Allez-y, ça change des classiques et le trio, sur scène vaut le voyage !
Photo : © Philippe Stisi
Le Poulpe de Julien Tauber
Théâtre de l’Etoile du Nord
01 42 26 47 47
mardi, mercredi et vendredi à 20 h 30
jeudi à 19 h 30
samedi à 17 h
Autour du spectacle :
Les mardis à 19 h 30, Julien Tauber vous accueille avec ses musiciens invités : Linda Edsjo percussionniste, Alexandra Grimal, saxophoniste, Florent Colautti, « artiste protéiforme ».
Les mercredis : le 18 février : Jean-Bernard Pouy, créateur du personnage de Gabriel Lecouvreur, dit Le Poulpe.
Le 25 février : Hervé Sard auteur du dernier Poulpe : La Catin habite au 21.
Les jeudis : « Bords de scène » avec l’équipe artistique.
Les vendredis : « After musical » avec, le 20 février : Tarik Chaouach,
Le 27 février : Girafe et Bruno Girard.
Les samedis : « Paroles de quartier », atelier de création dès 14 h (01 42 26 29 21), où, à partir de faits divers, les spectateurs écriront de courts récits répondant à la question : « Que ferait le Poulpe dans ce cas-là ? »
À lire pour mieux connaître Gabriel : La Petite Écuyère a cafté de Jean-Bernard Pouy,
Arrêtez le carrelage de Patrick Raynal
Nazis dans le métro de Didier Daeninckx
Chili incarné de Gérard Delteil
L’Amour tarde à Dijon de Jacques Vallet
Etc.
14:06 Écrit par Dadumas dans Blog, humour, Livre, Musique, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre de l'etoile du nord, le poulpe, abbi patrix | Facebook | | Imprimer