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10/01/2015

Justes et injustes noces

 

Les contemporains de Beaumarchais ont vu dans  Le Mariage de Figaro une pièce qui annonçait la Révolution : « Figaro a tué la noblesse » disait Danton. Anne Ubersfeld affirmait que c’était la première pièce romantique. Jean-Paul Tribout en propose une nouvelle mise en scène aujourd’hui et montre combien les combats contre l’obscurantisme et l’arbitraire sont toujours nécessaires.

Nous ne redirons pas ici l’intrigue du Mariage, on devrait dire des mariages, puisqu’à celui de Figaro avec Suzanne, apparaissent, imbriqués, le mariage du Comte et celui, différé, de Marceline.

Mariage de Figaro, Théâtre 14, Beaumarchais, TriboutBeaumarchais, dans sa Préface  au Mariage de Figaro disait combattre « l’hypocrisie de la décence » pour revenir à « la franche et vraie gaieté » qui distingue « de tout autre le vrai comique de notre nation ». Il voulait Suzanne « spirituelle, adroite et rieuse », Agnès Ramy qui l’incarne est, comme aurait dit l’ami Wolinski, tout simplement, « bandante ». Figaro la choisit comme épouse, le Comte  (Xavier Simonin) la désire, Mariage de Figaro, Théâtre 14, Beaumarchais, TriboutBazile  (Xavier Simonin) la caresse, et ce petit garnement de Page (Thomas Sagols), y tenterait bien un coup d’essai. Affriolante en jupon et corset (costumes : Aurore Popineau), effrontée et lucide, elle comprend plus vite que Figaro (Éric Herson-Macarel), les intentions faussement généreuses du Comte : « Il y a, mon ami, que, las de courtiser les beautés des environs, monsieur Mariage de Figaro, Théâtre 14, Beaumarchais, Triboutle comte Almaviva veut rentrer au château, mais non pas chez sa femme; c'est sur la tienne, entends-tu, qu'il a jeté ses vues, auxquelles il espère que ce logement ne nuira pas. » C’est elle qui démasque les hypocrites : « Et c'est ce que le loyal Bazile, honnête agent de ses plaisirs, et mon noble maître à chanter, me répète chaque jour, en me donnant leçon. » Justes noces pour Suzanne, mais combien d'injustes noces dans ce monde tartuffié ?

Le Mariage de Figaro est une pièce à la gloire des femmes. Elles y sont solidaires. La mélancolique et timide Comtesse (Marie-Christine Letort) décide de prendre l’habit de Suzanne pour confondre son infidèle de mari. L’amère Marceline (Claire Mirande), une fois libérée de son secret, s’affranchit de la tutelle des mâles : « Dans les rangs même plus élevés, les femmes n'obtiennent de vous qu'une considération dérisoires ; leurrées de respects apparents, dans une servitude réelle ; traitées en mineures pour nos biens, punies en majeures pour nos fautes ! Ah  sous tous les aspects, votre conduite avec nous fait horreur ou pitié ! ». Elle aide alors ses sœurs à s’émanciper. Et même la petite Fanchette (Alice Sarfati), dénonce le grand seigneur.

Une des  grandes difficultés de la mise en scène du Mariage est la multiplicité des lieux. Cinq actes, cinq lieux différents, sans compter, comme le souligne Jean-Pierre de Beaumarchais, les lieux « d’invisibilté », à savoir au premier acte, le fauteuil de malade où peuvent se cacher Chérubin puis le Comte, et aux actes suivant l’alcôve, le cabinet, le jardin, le bois, le pavillon où se réfugient les pas encore amants, les pas encore fautifs, qui se comportent comme des coupables, menacés qu’ils sont par la colère du Comte. Amélie Tribout résout tous ces problèmes par un décor unique, plus rêvé que réel, un mur d’un bleu céleste où courent de jolis nuages duveteux, et qui dissimule trois portes. Les comédiens apportent et emportent quelques accessoires sur un plateau nu, les lumières de Philippe Lacombe fabriquent le reste.

Mariage de Figaro, Théâtre 14, Beaumarchais, TriboutJean-Paul Tribout ne se contente pas de diriger avec ingéniosité tous les comédiens – outre ceux qu’on a déjà nommés, n’oublions pas Jean-Marie Sirgue qui est tour à tour Gusman bégayeur et Brid’oison mauvais juge, Marc Samuel, en Bazile cauteleux puis en cumulard Double-Main, et Pierre Trapet un Antonio madré – il est aussi le Dr Bartholo, pétri de rancune, suborneur confondu. Et le metteur en scène restitue au Mariage  toute la dimension sensuelle que certains cachent sous des intentions socialisantes.

Il impose à la pièce un rythme de cavalcade. N’est-ce pas « la folle journée » ? Et de scène en scène, le public conquis par ce Mariage en savoure l’insolence, la justesse, et le bonheur.Mariage de Figaro, Théâtre 14, Beaumarchais, Tribout

 

Photos © Emmanuelle Ales

 

Le Mariage de Figaro de Beaumarchais

 jusqu’au 21 février

Théâtre 14

01 45 45 49 77

 

Jean-Pierre de Beaumarchais, Le Mariage de Figaro collection études littéraires, PUF.

 

 

03/12/2014

Des élans de tendresse

 

L’un joue du piano (Benoît Urbain,), l’autre de la guitare (Pascal Neyron) et le troisième du « valisophone » (Emmanuel Quatra). Vous ne savez pas ce que c’est ? théâtre,musique,théâtre michelImaginez un grand mât planté dans une valise, sur lequel on a tendu une corde qui sonne comme celle d'une contrebasse. C’est un instrument tout à fait congruent aux textes Frédéric Rose et Vincent Jaspard, petites scènes dans le pur style des Diablogues de Dubillard. Situations insolites, personnages naïfs ou acariâtres, joyeux farfelus ou tristes sires, ils n’ont pas le caractère facile, comme les élans.

Ce que les élans viennent faire là ? Rien. Juste un jeu de mots. Il y a l’élan A, l’élan B, et l’élancé. Alors je vous le demande, pourquoi pas les élans ? Ils montrent tant d’élans de tendresse envers leurs frères humains…

Les trois musiciens-chanteurs boivent un peu, trinquent quelquefois, délirent pour oublier une réalité morose, un quotidien banal qui ne les rend guère heureux, mais qui met en joie les spectateurs.

Ils semblent tellement complices qu’on les imagine ensemble depuis la maternelle, complotant leurs canulars pendant la récréation, ou le soir au dortoir. Eh bien, vous avez tout faux, c’est Laurent Serrano qui les a réunis et mis en scène, pour le plaisir des textes d’abord, et la partie chantée est devenue « le fil rouge du spectacle ».

théâtre,musique,théâtre michelOn ne raconte pas Les élans ne sont pas toujours des animaux faciles, on va les voir, et les entendre. Ils ponctuent leurs sketches de  chansons de Trenet et de Nougaro, de Gershwin de Cochran ou de Benoît Urbain. Leur trio fonctionne dans une parfaite harmonie, non seulement avec leurs instruments préférés, mais aussi a capella,passant de la java au jazz avec maestria !

Retenez votre place pour la saison des fêtes !

 

 

 

Photos © Cie Laurent Serrano

 

Les élans ne sont pas toujours des animaux faciles  de Frédéric Rose et Vincent Jaspard

Adaptation et mise en scène, Laurent Serrano

Théâtre Michel

01 42 65 35 02

du mardi au samedi à 21 h

samedi 16 h 30

10/11/2014

La flamme des pompières

 

 

Théâtre, théâtre de poche-montparnasse, poésieElles portent une canadienne rouge (costumes Arnaud Lazérat) et des galons de fantaisie. Pardon ! de poésie, car les pompières sont poétesses. Elles sont quatre, mais elles marchent par deux, en alternance, Juliette Allauzen, Delphine Biard, Emilie Chevrillon, Sophie Plattner, en « duo festif et fantasque. »Théâtre, théâtre de poche-montparnasse, poésie

Elles sont au Poche-Montparnasse tous les samedis, pour « raviver la flamme de la poésie », et sur un thème choisi libèrent des  poèmes pour les offrir aux spectateurs. Elles en connaissent des centaines mais ce sont les spectateurs qui, à tour de rôle, tirent la carte illustrée qui les délivrent. Et à tous les coups, on gagne !

Pendant une heure, vous pourrez ainsi écouter Baudelaire et Prévert, Rimbaud et Rilke, Michaux et Shakespeare, Andrée Chedid et Marceline Desbordes-Valmore, Louis Labé et Marina Tsvetaïeva, Paul Eluard et Victor Hugo, Esther Granek et Armelle Dumoulin, Max Jacob et René de Obaldia, ou d’autres, car elles sont intarissables. Elles s’accompagnent elles-mêmes au violon et au piano dans les lumières de Pierre Blostin. La poésie cascade, fluide et colorée, et le public est ravi.

« Chaque spectacle est unique » disent-elles. Leur malicieuse sarabande vous ramène aux portes de l’enfance, dans ces paroles magiques qui vous guident et vous font croire que tout est possible.

Et si c’était vrai ?

 

 photo :© D. R. 

 

 Les Pompières poétesses  de Juliette Allauzen

Mise en scène de Romain Puyelo

Théâtre de Poche-Montparnasse

01 45 44 50 21

Tous les samedis à 17 h jusqu’au 27 décembre.