30/06/2015
Universelle magie
Universelle magie
L'exposition Magie, Anges et démons dans la tradition juive devait finir le 28 juin. Vous avez de la chance, elle est prolongée jusqu'au 19 juillet.
J’y ai découvert des objets, des rites, des croyances, des documents communs à nos trois religions monothéistes. Oh ! Bien entendu, rabbins, prêtres, pasteurs, imams combattent officiellement magie et sorcellerie, mais les pratiques populaires perdurent, ancrées dans des traditions millénaires et, ainsi que le dit Yehoudah ben Samuel de Ratisbonne (vers 1150-1217), dans Le livre des pieux : « On ne doit pas croire dans les superstitions, mais il est plus sûr de les respecter. »
Car, enfin, pour quelles raisons l’homme se livre-t-il à ces rites que la religion tente de décourager ? Pour protéger la vie de sa famille, réussir ses projets, apaiser ses tourments, et quelquefois guérir.
Du temps où il croyait aux démons multiformes, il a voulu les contrôler, leur interdire l’accès de sa maison, de la chambre de ses enfants, du ventre de la mère porteuse de vie. Il a écrit des incantations contre Lilit, ce démon femelle, première femme d’Adam, chassée du jardin d’Eden. Il a façonné des objets apotropaïques[1], et, sur ces amulettes, gravé des prières où apparaissent le nom de trois anges : Sanoï ; Sansanoï et Semangelof.
Comme le peuple juif est celui du Livre, beaucoup de ces protections sont des textes écrits et dessinés, insérés dans des pendentifs, ciselé sur des bagues, et tracé, même sur des bols. L’art a magnifié les textes…
Ces pratiques magiques entraînèrent souvent des persécutions. Chez les juifs comme chez les chrétiens les mots de « charlatanisme et de détournement de la religion » furent prononcés, mais en vain ! Le peuple les sanctifia. Et la « kabbale pratique » perdura. La magie chrétienne s’inspira de la magie juive et quand le monde arabophone devint musulman les coutumes s’adaptèrent. Ainsi peut-on voir ce que nous connaissons comme « main de fatma », chez les juifs comme chez les musulmans. La main (hamsah en hébreu, khama en arabe) assurait la bénédiction (berakah en hébreu, baraka en arabe) à celui qui la portait.
Pourquoi, au nom de Dieu ou de la Raison devrions-nous bannir ce qui rassure ?
Musée d'art et d'histoire du judaïsme
71, rue du Temple
01 53 01 86 65
ouvert de 11 h à 18 h, les lundi, mardi, jeudi, vendredi
mercredi de 11 h à 21 h
dimanche de 10 h à 19 h
11:33 Écrit par Dadumas dans Blog, culture, exposition, Film, Littérature, Livre, Loisirs, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : magie, exposition, traditions juives, chrétiennes, musulmanes. | Facebook | | Imprimer
28/06/2015
De rerum natura
Tout avait commencé avec les Fantaisies potagères, à Versailles, en 2003. Puis il y eut d’autres Fantaisies, les bucoliques, les microcosmiques, les mythologiques, les gourmandes, touts crées pour le Potager du Roi, dans les dédales des vergers, au bord des fontaines, à l’abri des espaliers. Stéphanie Tesson, la metteuse en vie de ces promenades spectacles fit appel à soixante-cinq auteurs pour les imaginer.
Aujourd’hui, elle signe seule le spectacle de Monologues en plein champ, où les choses de la Nature vous parlent de la nature des choses. Elle est à la fois auteure, et interprète. Marguerite Tanguy des Déserts les met « en images ».
Et c’est un ravissement !
Corinne Pagé a composé pour elle une robe-manteau d’un vert soyeux très tendre, peinte comme un tableau que l’École de Barbizon (ou celle de Bléneau) n’aurait pas renié.
Accompagnée par deux musiciens qui ponctuent les saynètes avec talent et humour : Emmanuelle Huteau et Olivier Depoix, elle sera Vent, Cloporte, Papillon, Punaise, Fourmi, Champignon Arbre (mais lequel ?), Ronce, Hibou, Ver (de terre), Mouche, Caillou, Escargot, Guêpe et même… attachée de presse citadine.
Car, voyez-vous, face à cette Nature peu disciplinée, têtue, foisonnante, l’Homme et naturellement la Femme sont des prédateurs redoutables.
L’avant-première a eu lieu Place Saint-Sulpice, dans le cadre de la Foire Saint-Germain.
Il n’y a pas de tournée ! Et pourtant ce ne sont pas les jardins extraordinaires qui manquent, en France.
Tenez, au hasard, le jardin de Chaumont qui ouvre la nuit pendant l’été, et qui avec ses illuminations, n’a pas prévu de donner la parole à ses plantes et ses arbres. Il faudrait pourtant qu'il soit "dans le Vent".
Je lui recommande ces Monologues de plein champ, Shakespeare (Le Songe d’une nuit d’été) et Hugo (La Forêt mouillée), en seront enchantés.
photo : © N. D.
Monologues de plein champ, texte paru dans la collection des Quatre-Vents, éditions de l’Avant-Scène Théâtre, 12 €. Le texte est suivi de la réédition de Cœur de laitue, une des premières pièces de Stéphanie Tesson : un petit bijou de tendresse envers les plantes.
11:24 Écrit par Dadumas dans Blog, cabaret, culture, éducation, humour, Littérature, Poésie, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, poésie, musique, stéphanie tesson, nature, jardin de chaumont, jardins. | Facebook | | Imprimer
20/06/2015
Chénier vu par Hugo et Vigny
Vous souvenez-vous que dans nos études, on nous présentait Alfred de Vigny comme un aristocrate « hautain », pessimiste et solitaire, s’isolant volontiers dans une « tour d’ivoire » et dédaignant un peu ses amis romantiques ?
Déjà, mes certitudes avaient été ébranlées en lisant les Mémoires d’Alexandre Dumas qui racontait, comment, pendant qu’il recevait ses invités, le soir de la première Christine, Hugo et Vigny lui avaient corrigé « une centaine de vers empoignés » et avaient réalisé « une douzaine de coupures » avec des mains « habiles et paternelles. »
Eh bien! J’ai appris cette semaine une nouvelle extraordinaire.
Martine Contensou, chargée des manuscrits à la Maison de Victor Hugo, a découvert un manuscrit d’Alfred de Vigny et un article inédit de Madame Hugo consacré au poète après sa mort[1].
C’est donc dans les papiers de Hugo qu’on a enfin retrouvé les vingt-trois premiers vers du Symentha qui manquaient sur le manuscrit. Et on a constaté que l’écriture de Vigny voisinait avec une autre. Devinez laquelle ? Les experts sont unanimes. C’est celle de Victor Hugo ! « Ils ont travaillé conjointement » disent les amis d’Alfred de Vigny.
Ils auraient donc collaboré ! Normal puisqu’ils étaient amis ! Vigny sera même témoin au mariage de Victor ! Ce que les détracteurs de Hugo démentent, et quand on leur présente les documents qui prouvent qu’ils ont tort, ils disent que « le témoin »[2] n’en parle pas. Ce qui est totalement faux !
Mais où la mauvaise foi va-t-elle se nicher ?
L’Association des Amis d’Alfred de Vigny reçue le jeudi 16 juin à 18h30 dans le salon rouge de l’appartement de Victor Hugo, a rétabli les faits et Ferdinand Brunetière qui colportait ces erreurs dans La Revue des deux mondes en 1891, n’a plus qu’à se voiler la face !
Lui qui affirmait aussi : « Joseph de Maistre, Mme de Staël, Chateaubriand, — ajoutons-y Walter Scott, — voilà les maîtres de Vigny, comme aussi bien de toute la jeunesse de son temps. » aurait été bien étonné d’entendre Esther Pinon et Martine Contensou exposer comment Chénier inspira les deux poètes.
Et de nous lire la scène des Misérables,où Luc-Esprit Gillenormand, le grand-père de Marius doit renoncer à sa hargne contre « les brigands » de la Révolution, pour complaire à Marius. Un régal ![3]
Alors, quand devant vous on médira des romantiques, renvoyez les détracteurs aux Amis de Vigny, et aux Amis de Victor Hugo !
http://maisonsvictorhugo.paris.fr
[1]- Tous deux seront publiés prochainement dans le bulletin de l’Association des Amis d’Alfred de Vigny.
[2] - Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, paru en 1863, est écrit par Adèle Hugo, éditions Ollendorf, P. 148. L’autre témoin, pour V. Hugo, est Alexandre Soumet, poète et dramaturge. Ouvrage réédité chez Plon en 1985.
[3]- Lecture assurée par Sacha Petronijevic, comédien, et Sylvain Ledda, universitaire.
18:51 Écrit par Dadumas dans Blog, culture, éducation, Histoire, Littérature, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, hugo, vigny, maisons victor hugo | Facebook | | Imprimer