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16/02/2014

Le retour de la féerie

 

 

Le beau Lysandre (Sébastien Poudéroux)  aime la jeune Hermia (Suliane Brahim) mais le papa d’icelle, Egée (Elliot Jennicot) veut qu’elle épouse Démétrius (Laurent Lafitte) dont Héléna (Adéline D’Hermy) est amoureuse. Le duc Thésée (Michel Vuillermoz) qui va lui-même épouser Hippolyta (Julie Sicard), la somme d’obéir à son père. Elle a une nuit pour réfléchir.

Hermia veut la mettre à profit en s’enfuyant avec Lysandre, mais ils s‘égarent dans la forêt où les rivaux les suivent, où se sont donnés rendez-vous des comédiens (Stéphane Varupenne, Jérémy Lopez, Pierre Hancisse, Benjamin Laverne, Matëj Hofmman, Gabriel Tur) , Théâtre, Comédie-Française, Shakespeareet où tout une peuple de fées et de lutins rivalise de sortilèges sous la baguette d’Obéron (Christian Hecq). Les maladresses de Puck (Louis Arène), les caprices de Titania (Martine Chevalier), les incarnations étranges, Toile d’Araignée (Lola Felouzis), Groin (Paul Mc Aleer), Fleur des pois (Heidi-Eva Clavier), Graine de Moutarde (Pauline Tricot) vont créer la confusion parmi les hommes et les déités.

Au lever du jour, et à l’heure prescrite par le Duc, tout s’arrange. La nuit n’aura été qu’un rêve - mâtiné de cauchemar par instants pour les protagonistes - : Le Songe d’une nuit d’été. C’est une comédie de Shakespeare, une des plus belles du répertoire.

Pour sa mise en scène, Muriel Mayette-Holtz rend justice à la traduction de François-Victor Hugo, délicate et malicieuse. Elle place les humains dans la salle. Le Duc s’assied au premier rang des spectateurs entouré de ses sujets. Les êtres surnaturels s’ébattent sur scène avec les fugitifs. Les costumes de Sylvie Lombart soulignent cette dichotomie, atemporels pour les humains, soyeux pour la cour, de lin brut pour les comédiens, ils se hérissent de poils et de plumes pour les créatures imaginaires. La musique originale et les chants signés Cyril Giroux délient les uns et les autres. Pas de décor construit, la scénographie de Didier Monfajon court dans la fluidité des lumières (Pascal Noël), imposant le retour d’un genre un peu oublié : la féerie.

Un spectacle total pour ceux qui rêvent de se libérer des contraintes quotidiennes.

 

 

 Photo : © Raynaud de Lage

 

Le Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare

Traduction de François-Victor Hugo

Comédie-Française

Salle Richelieu

En alternance jusqu’au 15 juin 2014

 

0825 10 1680

www.comedie-francaise.fr

 

 

 

 

21/12/2013

Hollywood revisité

 

 

Amis des animaux sauvages, réjouissez-vous, dans El Tigre, il n’y a pas de tigre sur la scène du Rond-Point, mais de bien curieux personnages, venus des mythologies du cinéma et d’un endroit d’Argentine où des « cinéfolles » se perdent dans des chimères hollywoodiennes. Vous vous souvenez peut-être du Baiser de la femme araignée d’Hector Babenco où Molina le détenu  homosexuel réconfortait Valentin le politique torturé, en lui racontant des films de légende. Dans El Tigrela tragédie cède la place à une comédie loufoque chantée (composition musicale de Bruno Coulais)  et chacun est libre d’aimer à sa guise dans ce Hollywood revisité.

Théâtre du Rond-Point, Alfredo Arias, Musique, film, cabaretAlors, pourquoi le tigre ? Alfredo Arias nous apprend qu’il s’agit d’un endroit au Nord de Buenos Aires où, « une quantité d’îlots qui flottent au confluent du Gran Paraná, rivière descendant des Chutes d’Iguaçu jusqu’au Río de la Plata », dessinent la peau d’un tigre en vue aérienne. Là, « se dressent des maisons : type datcha russe, chalet suisse ou petit palais indonésien,  où se réfugie toute une population qui fuit la fièvre chaotique » de la ville, et dit-il, « J’ai su dès ma jeunesse que dans ces maisons de villégiature aquatique s’était établie une communauté de gays qui profitaient du calme et du dépaysement pour se perdre dans des rêveries cinématographiques, en se racontant les films de telle ou telle autre star, les imitant, et jouissant des dernières tragédies des reines du celluloïd. »

Dans la maison de Holy (Carlos CasellaThéâtre du Rond-Point, Alfredo Arias, Musique, film, cabaret qui ressemble à Joan Crawford dans Johnny Guitar), Dark (Denis d’Arcangelo), l’homme « à tout faire qui devient femme pour lui plaire » voudrait rejouer un film de Douglas Sirk. Une créature extravagante, Fatafatale (Alejandra Radano), qui ressemble à la fois à Blanche-Neige et à la Reine de Walt Disney, hante les lieux. Un orage sur le marais dérègle leur projet. Et l’Indienne Tota (Andrea Ramirez) débarque, bientôt suivie de Lana Turner (Arielle Dombasle), « revenue sur terre/pour s’envoyer en l’air », puis apparaît sa meurtrière de fille Lanita (Alexie Ribes), « emmerdeuse » jalouse, et enfin, Vampira (Alejandra Radano) sortie d’une soucoupe volante, tente d’emmener tout ce monde vers d’autres sphères. Mais force reste à l’Argentine…

Théâtre du Rond-Point, Alfredo Arias, Musique, film, cabaretUn quatuor à cordes, deux violons (Christophe Guiot, Elisabeth Pallas) un alto (Françoise Gneri), un violoncelle (Jean-Philippe Audin), accompagne les comédiens-chanteurs dans une scénographie de Elsa Ejchenrand et José Cuneo où les lumières de Jacques Rouveyrollis illuminent les îlots verdoyants de la découverte. Et les costumes de Pablo Ramirez suivent les caprices de ces personnages excentriques.

Femmes de rêves ou travestis authentiques, « dernières de la classe et reines des garces », les personnages se moquent des clichés et des idées reçues pour mystifier et mythifier à loisir.

En cette fin d’année, avec ces comédiens surprenants, ils assument mieux que tous les Pères Noël des Champs-Elysées et on rit plus qu’à Broadway.

 

Photos : © Alejandro Lopez

 

 

El Tigre d’Alfredo Arias

Théâtre du Rond-Point

Jusqu’au 12 janvier

Tel.  01 44 95 98 21 - www.theatredurondpoint.fr

 

 

 

 

 

 

 

 

 

15/12/2013

L’Amour lui-même

 

 

Elle nous avait ravis quand elle avait adapté Le Loup, d’après Les contes du Chat perché (Marcel Aymé) pour la scène du studio. Aujourd’hui, Véronique Vella nous enchante avec sa Théâtre, Musique, Comédie-française, mise en scène de Psyché cette « tragédie-ballet » signée Molière, Corneille, Quinault, Lully que la Comédie-Française gardait dans son répertoire et ne donnait que par « fragments ».

Vous connaissez bien sûr Vénus (Sylvia Bergé), mais l’aviez-vous imaginée en belle-mère ? Car, pour son fils, l’Amour lui-même (Benjamin Jungers) « il est temps de sortir de cette longue enfance », et pour montrer son indépendance, le rebelle tombe amoureux de la belle Psyché (Françoise Gillard), dont Vénus est jalouse !

Elle n’est pas la seule. Les sœurs de la donzelle, Aglaure (Coraly Zahonero) et Cidippe (Jennifer Decker) sont prêtes à tout pour s’en débarrasser quand deux beaux partis, Cléomène (Félicien Juttner) et Agénor (Pierre Hancisse) jeunes princes à marier, les délaissent pour Psyché.

Aidé de Zéphire (Jérôme Pouly), et se faisant passer pour un monstre, l’Amour enlève Psyché, au grand désespoir du roi son père (Laurent Natrella) qui voyait en elle « le doux espoir de (sa) vieillesse ». Psyché découvre avec « le feu » qu’elle ne connaissait pas, que ledit monstre est le plus joli garçon de l’Olympe et s’abandonne à cet « excès d’amour ».

Vénus « impitoyable mère » et voix superbe, sépare les amants. Heureusement Jupiter (Claude Mathieu) intervient : « laisse-toi vaincre aux tendresses de mère », et comme il fait de Psyché une « immortelle »,  tout s’achève en ballets et chansons.

Dans cette version, Vincent Leterme remplace Lully et dirige au piano les chœurs et la musique, avec Véronique Briel, tandis qu’Elliot Jenicot a dirigé le travail chorégraphique. La scénographie de Dominique Schmitt et les toiles peintes d’Anne Kessler implantent l’action dans un cosmos original et souriant. Les chœurs, en redingote bleu royal et chapeaux melons assortis entourent les amoureux de blanc vêtus, Vénus impériale, rutile en pourpre (costumes de Dominique Louis), tandis que Jupiter avec sa cape de soie noire ressemble à Mandrake le magicien.

Le monde tourne comme le centre de la scène, dans les ombres et les lumières de Patrick Méeüs. C’est un éblouissement de soleils et de nuits.

Le charme opère. On les adore ! On est conquis.




 Photo © Brigitte Enguérand

Psyché  de Molière, Corneille, Quinault

www.comedie-francaise.fr

Tél. 0 825 10 1690